AFRIQUE - Une approche globale et systématique est nécessaire pour lutter contre l’impunité

Index AI : AFR 51/004/2006

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International se félicite de ce que l’ancien président du Libéria Charles Taylor se soit livré au Tribunal spécial pour la Sierra Leone, où il a été inculpé et devra répondre de 11 chefs d’accusation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. L’organisation se félicite également de l’arrestation, le 17 mars 2006, de Thomas Lubanga, dirigeant d’un groupe politique armé en République démocratique du Congo qui est soupçonné de crimes de guerre et a été remis à la Cour pénale internationale.

Ces arrestations constituent des étapes importantes de la lutte contre l’impunité en Afrique et véhiculent le message que les personnes impliquées dans des violations des droits humains doivent rendre des comptes. Cependant, d’autres auteurs présumés de violations des droits humains en Afrique, comme l’ancien président du Tchad Hissène Habré, doivent eux aussi être déférés à la justice.

Depuis que Charles Taylor s’est rendu, le Tribunal spécial a demandé que, pour des raisons de sécurité, le procès soit transféré à La Haye (Pays-Bas). Amnesty International a soutenu l’instauration d’un Tribunal spécial, dont le rôle est primordial pour rendre justice aux milliers de victimes des crimes contre l’impunité, des crimes de guerre et des autres infractions au droit international perpétrés en Sierra Leone. Pour l’organisation de défense des droits humains, Charles Taylor peut être jugé à Freetown ou dans un autre lieu relevant du Tribunal spécial, mais il est primordial que la protection de tous les témoins soit garantie et que le procès soit porté à la connaissance des victimes, de leur famille et de l’ensemble de la société sierra-léonaise et qu’il leur soit accessible. De telles mesures sont indispensables pour assurer la pertinence et la communication du message fondamental selon lequel l’impunité pour les crimes de droit international ne sera pas tolérée et justice sera obtenue pour les victimes de ces crimes, — afin que justice soit à la fois rendue et vue comme telle.

Amnesty International partage l’opinion du secrétaire général des Nations unies lorsqu’il se dit « fermement convaincu que la capture et le procès de Taylor adresseront un message très fort dans la région et au-delà, faisant comprendre que l’impunité ne sera pas tolérée et que le droit doit prévaloir ».

Au cours des dernières décennies, de nombreuses régions d’Afrique ont été touchées durement par des crimes de droit international. Des hommes, des femmes et des enfants ont été victimes de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et d’autres infractions au droit international. Les auteurs présumés de ces crimes sont rarement jugés du fait qu’ils bénéficient d’amnisties ou de mesures similaires, et les victimes sont ainsi le plus souvent privées de véritables réparations.

« Condamnation et rejet de l’impunité » figurent parmi les principes et objectifs fondamentaux de l’Acte constitutif de l’Union africaine. Amnesty International appelle donc les gouvernements africains à veiller à ce que les auteurs présumés de crimes de droit international ne bénéficient d’aucune impunité. Les États africains doivent juger ces personnes en respectant les normes d’équité des procès et sans avoir recours à la peine de mort, les extrader vers les États qui sont prêts à poursuivre les auteurs présumés de tels crimes en conformité avec les normes internationales d’équité ou les remettre aux tribunaux internationaux. Les gouvernements doivent également satisfaire aux requêtes de la Cour pénale internationale concernant la remise de personnes inculpées.

Complément d’information

Charles Taylor doit répondre de 11 chefs d’accusation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité contre la population de Sierra Leone prononcés par le Tribunal spécial. Ces crimes incluent l’homicide ; la mutilation ; le viol et d’autres formes de violence sexuelle ; l’esclavage sexuel ; le recrutement et l’utilisation d’enfants-soldats ; l’enlèvement, et l’utilisation de travail forcé par les groupes armés d’opposition sierra-léonais. En 2003, Charles Taylor a reçu le statut de réfugié au Nigéria. Le 29 mars 2006, il a été remis au Tribunal spécial pour la Sierra Leone à Freetown, à la suite d’une requête du gouvernement libérien.

Le 17 mars 2006, Thomas Lubanga Dyilo, ressortissant de la République démocratique du Congo (RDC) fondateur et dirigeant présumé de l’Union des patriotes congolais (UPC), a été remis à la Cour pénale internationale (CPI). Il est accusé aux termes de l’article 8 du Statut de Rome de la CPI de crimes de guerre commis en RDC à partir de juillet 2002 tels que le fait d’« avoir enrôlé et conscrit des enfants de moins de 15 ans et les avoir fait participer activement à des hostilités ».

Hissène Habré, ancien président du Tchad, a été inculpé par un tribunal belge le 19 septembre 2005 de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et torture. La Belgique a demandé au Sénégal de l’extrader. Les autorités sénégalaises ont arrêté Hissène Habré le 15 novembre 2005. Cependant, le 25 novembre 2005, la Cour d’appel de Dakar a statué qu’elle n’était pas habilitée à se prononcer sur cette demande d’extradition. En janvier 2006, l’Assemblée de l’Union africaine a donné mandat à un Comité d’éminents juristes africains (Comité) « d’examiner tous les aspects et toutes les implications du procès d’Hissène Habré ainsi que les options disponibles pour son jugement » ; elle lui a demandé de « finaliser ses travaux et de soumettre un rapport à la prochaine session ordinaire en juillet 2006 ».

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