Communiqué de presse

Albanie. Le gouvernement doit respecter les droits des anciens prisonniers politiques

Amnesty International appelle le gouvernement albanais à rencontrer l’Association des anciennes victimes de persécutions politiques et à établir un dialogue en vue de répondre rapidement à leurs préoccupations.

Depuis trois semaines, 24 anciens prisonniers politiques observent une grève de la faim pour protester contre le retard pris par le gouvernement dans le versement de leurs indemnisations. D’après l’association, les anciens prisonniers n’auraient perçu qu’un huitième des sommes dues depuis 2007, année où une loi leur octroyant des compensations a été adoptée. Nombre d’entre eux vivent dans des conditions de pauvreté extrême.

La semaine dernière, le mouvement de protestation a pris des proportions inquiétantes. Le 8 octobre, l’un des grévistes de la faim, Gjergj Ndreca, s’est immolé par le feu, et l’un de ses compagnons, Llazi Koçi, s’est gravement brûlé. Un troisième gréviste, Lirak Bejko, a également tenté de s’immoler deux jours plus tard. D’autres anciens prisonniers politiques ont exprimé leur solidarité en manifestant devant le Parlement albanais. De nombreuses personnes qui ont cessé de s’alimenter sont âgées et infirmes.

Amnesty International se félicite qu’une première rencontre ait été organisée vendredi 12 octobre entre les grévistes de la faim et le président Bujar Nishani, bien que l’intervention préalable de l’ambassade des États-Unis et de la délégation de l’Union européenne en Albanie ait été nécessaire.

Toutefois, le Premier ministre Sali Berisha a continué d’affirmer que la conduite des manifestants était guidée par des considérations politiques. Amnesty International demande instamment au Premier ministre d’apporter une réponse aux préoccupations des anciens prisonniers et de veiller à ce qu’ils perçoivent sans plus attendre les indemnisations qui leur sont dues.

Sous le régime communiste, entre 1944 et 1991, de nombreux opposants au gouvernement ont été pris pour cible en raison de leurs opinions politiques et emprisonnés, contraints à l’exil, dépossédés de leurs biens ou victimes d’autres persécutions. Les détenus étaient également soumis aux travaux forcés, souvent dans des conditions éprouvantes ; les rations alimentaires étaient minimales et les soins médicaux restreints. Selon les estimations de l’Association des anciens prisonniers politiques, 5 577 hommes et 450 femmes ont été exécutés, et des dizaines de milliers d’autres personnes ont été emprisonnées ou envoyées dans des camps de travail. Conformément à la législation albanaise, les anciens prisonniers peuvent prétendre à une indemnisation s’élevant à 14,30 euros pour chaque jour de détention.

Le chef de la délégation de l’Union européenne en Albanie, l’ambassadeur Ettore Sequi, a appelé au dialogue pour trouver une solution aux préoccupations des manifestants ainsi qu’à certains cas individuels non résolus par le dispositif de 2007. Trois organisations albanaises de défense des droits humains (le Comité d’Helsinki d’Albanie, le Centre albanais des droits humains et le Centre albanais pour la réhabilitation des victimes de la torture) ont également demandé à l’Assemblée d’examiner ce problème lors sa prochaine séance, ou de convoquer une session extraordinaire à cet effet.

Si les anciens prisonniers politiques ont été libérés et graciés il y a 20 ans, ils n’ont toujours pas obtenu d’autres formes de réparation de la part du gouvernement. Amnesty International estime qu’ils sont en droit de bénéficier de réparations complètes, pouvant prendre la forme d’une restitution, d’une indemnisation, d’une réhabilitation, d’une satisfaction et de garanties de non-répétition. Parmi les anciens prisonniers, dont ceux qui ont subi des actes de torture ou d’autres formes de mauvais traitements, rares sont ceux qui ont bénéficié d’une mesure de réadaptation, notamment d’un soutien psychologique, en dehors de celles mises en œuvre par les organisations non gouvernementales.

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