La Commission internationale de juristes et Amnesty International ont fait part le 6 décembre de leur préoccupation quant au procès de Mohamed Belbouri devant le tribunal pénal d’Oran en Algérie. La prochaine audience doit avoir lieu le 9 décembre.
Mohamed Belbouri, 29 ans, comparaît comme seul accusé dans l’affaire du meurtre du professeur Ahmed Kerroumi, un militant politique algérien. Ahmed Kerroumi a été assassiné en avril 2011, peu après avoir rencontré le rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté d’expression, Frank La Rue, en Algérie.
La Commission internationale de juristes et Amnesty International demandent aux autorités algériennes de garantir le droit de la famille d’Ahmed Kerroumi de connaître la vérité sur son homicide et d’amener pénalement le ou les auteurs à rendre des comptes dans le respect des normes internationales d’équité.
Les deux organisations déplorent que le procès de Mohamed Belbouri ne soit pas conforme à ces normes, et bafoue notamment le droit des accusés d’être présumés innocents et le droit de se défendre. En outre, elles s’inquiètent des allégations selon lesquelles Mohamed Belbouri a subi des actes de torture et des mauvais traitements lors de son interrogatoire dans les locaux de la police du 12 au 17 mai 2011, semble-t-il dans le but de lui faire « avouer » le meurtre d’Ahmed Kerroumi .
Mohamed Belbouri affirme qu’on lui a asséné des coups sur le crâne, au visage, dans le ventre et sur les pieds, qu’il a été électrocuté, contraint de rester agenouillé pendant des heures avec une chaise sur la tête, et qu’on l’a menacé de maltraiter ses proches s’il ne passait pas aux « aveux ».
« Les autorités algériennes doivent respecter et garantir le droit de Mohamed Belbouri d’être entendu équitablement devant un tribunal indépendant et impartial, conformément aux normes internationales d’équité, a indiqué Wilder Tayler, secrétaire général de la Commission internationale de juristes.
« Elles doivent veiller à ce que toutes les informations faisant état de torture ou de mauvais traitements dans cette affaire fassent l’objet d’investigations poussées et impartiales, et que toute déclaration possiblement obtenue par ces moyens ne soit pas retenue à titre de preuve. »
Les deux avocats qui représentent les accusés et la famille du professeur Ahmed Kerroumi ont affirmé que le procès était entaché d’irrégularités ; le tribunal a notamment refusé d’autoriser la défense à faire citer des témoins et à procéder au contre-interrogatoire des témoins, y compris l’expert médicolégal qui a réalisé l’autopsie d’Ahmed Kerroumi, et à remettre en cause et examiner les preuves avancées par l’accusation.
« La justice ne serait pas rendue en condamnant – possiblement à mort – un homme qui clame son innocence depuis le début, alors que de très nombreux doutes pèsent sur le sérieux de l’enquête », a conclu Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.