ALGÉRIE : Le procès d’Habib Souaïdia souligne les préoccupations sur l’absence d’enquêtes

Index AI : MDE 28/040/02

Amnesty International a appelé ce jour (vendredi 28 juin) les autorités algériennes à cesser de faire obstruction aux enquêtes concernant les graves atteintes aux droits humains, au moment où doit s’ouvrir le procès d’Habib Souaïdia, ancien officier de l’armée accusé de diffamation par Khaled Nezzar, général à la retraite et ancien ministre de la Défense algérien. Ce procès doit débuter lundi prochain à Paris.

Habib Souaïdia est l’auteur d’un livre publié en 2001, La Sale Guerre, qui contient des informations sur des cas de torture, des exécutions extrajudiciaires et d’autres graves atteintes aux droits humains commises au cours du conflit actuel par les forces de sécurité, les milices armées par l’État et les groupes armés. Les poursuites pour diffamation engagées par Khaled Nezzar contre Habib Souaïdia s’appuient sur les propos que ce dernier a tenus sur une chaîne de télévision française en mai 2001 au sujet du général à la retraite.

« Habib Souaïdia a formulé des allégations sérieuses, a déclaré Amnesty International. Alors que des milliers de familles attendent toujours, parfois depuis dix ans, de connaître la vérité sur ce qui est arrivé à leurs proches assassinés ou « disparus », il est grand temps que les autorités algériennes respectent leurs obligations internationales en prenant des mesures concrètes pour faire la lumière sur ces crimes et sur d’autres du même ordre. »

L’organisation lance de nouveau un appel aux autorités algériennes pour qu’elles mettent immédiatement en place une commission d’enquête indépendante et impartiale qui soit chargée de mener des investigations sur les milliers d’homicides, de « disparitions », d’actes de torture et d’autres atteintes aux droits humains dont se sont rendus coupables depuis 1992 les forces de sécurité, les milices armées par l’État et les groupes armés.

Par ailleurs, un fait inquiétant s’est produit récemment dans le cadre des poursuites pour torture engagées en France en avril 2001 contre Khaled Nezzar. L’un des trois plaignants, Abdelouahab Boukezouha, a retiré sa plainte en avril 2002 après que son fils eut été arrêté en Algérie et accusé d’entretenir des liens avec un groupe armé. Deux victimes de torture ainsi que la famille d’une troisième, qui vivent toutes en France, avaient porté plainte contre Khaled Nezzar, affirmant que celui-ci était responsable des tortures commises à l’époque où il occupait la fonction de ministre de la Défense en Algérie, de 1990 à 1993.

Rachid Mesli, un avocat algérien exilé qui est spécialisé dans les droits humains, devrait comparaître en tant que témoin de la défense dans le procès qui est sur le point de s’ouvrir. Accusé d’appartenance à un groupe « terroriste » opérant à l’étranger, il fait l’objet depuis le mois d’avril 2002 d’un mandat d’amener international décerné par les autorités algériennes. Cette accusation semble s’appuyer sur le fait que Rachid Mesli avait l’intention d’envoyer un téléphone portable à un contact se trouvant en Algérie, qui lui transmettait des informations sur la situation des droits humains dans le pays.

Ce contact et au moins trois autres personnes liées à Rachid Mesli ont subi des traitements particulièrement durs. Arrêtés dans le cadre d’événements distincts en mars et avril 2002 et accusés d’entretenir des liens avec un groupe « terroriste », ils auraient tous été placés en détention dans la base de la sécurité militaire de Ben Aknoun, où ils ont apparemment été torturés à de multiples reprises pendant plusieurs jours.

« L’ironie des choses veut que ce procès s’ouvre le jour de l’entrée en vigueur de la Cour pénale internationale, alors que les autorités algériennes continuent à créer des difficultés à ceux qui expriment leur inquiétude concernant la situation des droits humains dans le pays », a ajouté l’organisation.

Ces derniers mois, les militants locaux des droits humains ont été la cible de mesures de répression, tandis que les mécanismes de surveillance des droits humains au sein des Nations unies et les organisations internationales de défense des droits humains comme Amnesty International continuent à se voir refuser tout accès au territoire algérien.

Rappel des faits

À la suite de la publication de son livre, Habib Souaïdia a fait l’objet d’un mandat d’amener. Le 29 avril 2002, le tribunal criminel d’Alger l’a condamné à vingt ans de réclusion par contumace pour participation à une entreprise de démoralisation de l’armée et complot portant atteinte à l’intégrité du territoire national. Habib Souaïdia étant exilé en France, ce procès s’est déroulé en son absence. Selon le ministère public, un site Internet indique qu’Habib Souaïdia a déclaré être « prêt à retourner en Algérie pour porter les armes contre les généraux ».

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