Amnesty International alerte le Nigeria face à une montée de la violence à l’approche des élections

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI

18 mars2011

Amnesty International a exhorté les autorités nigérianes à prendre des mesures pour endiguer une vague grandissante de violence politique, ethnique et religieuse qui risque de menacer la stabilité des élections d’avril.

Un nouveau rapport publié par l’organisation, intitulé Loss of life, insecurity and impunity in the run up to Nigeria’s elections, montre que des centaines de personnes ont été tuées au cours de violences communautaires, interconfessionnelles et motivées par des considérations politiques dans le pays à l’approche des élections présidentielles et législatives.

Les autorités n’ont pas conduit les responsables présumés de ces actes devant la justice et ne font rien pour empêcher de nouvelles atteintes aux droits humains. Les enquêtes sont peu fréquentes et souvent insuffisantes. Presque personne n’a été condamné pour les homicides commis.

« Les autorités nigérianes doivent prendre des mesures pour protéger la vie des personnes et tous les candidats politiques doivent dénoncer la violence et exhorter leurs sympathisants à mener campagne pacifiquement, a déclaré Tawanda Hondora, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International.

« Les candidats doivent dire aux électeurs ce qu’ils feront pour faire cesser les homicides insensés et améliorer la sécurité et la justice au Nigeria. Le débat présidentiel du vendredi 18 mars est une excellente occasion de prendre cet engagement. »

Au cours de l’un des pires épisodes de violence, un attentat à l’explosif commis dans la ville de Jos le 24 décembre 2010 a tué environ 80 personnes. Cette attaque, revendiquée plus tard par le groupe religieux armé Boko Haram, a également déclenché plusieurs mois de représailles entre différents groupes ethniques et religieux dans l’État du Plateau, qui ont fait au moins 120 morts supplémentaires.

Un habitant a indiqué à Amnesty International que les autorités n’avaient pas déployé des efforts suffisants pour empêcher les attaques à Jos, précisant que « des signaux évidents montraient que quelque chose allait se passer mais [les forces de sécurité] n’étaient pas sur le terrain ».

Un autre a déclaré pendant les violences : « C’est le chaos, il y a des gens qui tournent à moto, ils entrent dans un quartier et jettent [des bombes]. »

Plus de 50 personnes ont également été tuées depuis juillet 2010 dans des violences directement liées aux élections. Les défenseurs des droits humains, qui joueront un rôle essentiel dans la surveillance du déroulement des élections d’avril, sont de plus en plus la cible de menaces et d’actes de violence, sans être suffisamment protégés par les forces de sécurité.

Malgré les nombreux morts, aucune campagne nationale contre la violence électorale n’a été menée et très peu d’arrestations ont eu lieu.

Les autorités n’ont pas non plus poursuivi de manière compétente les responsables présumés des violences commises à Jos et dans le reste de l’État du Plateau, et les résultats des enquêtes menées précédemment par le gouvernement sur les raisons à l’origine de ces violences n’ont jamais été rendus publics.

Dans l’État de Borno (nord-est), Boko Haram a été accusé d’attaques commises contre des agents des forces de sécurité, des fonctionnaires et des responsables religieux. Une cinquantaine de personnes, dont des passants, ont été tuées depuis juillet 2010.

Les forces de sécurité ont réagi par diverses atteintes aux droits humains, telles que des disparitions forcées, des exécutions extrajudiciaires et des détentions arbitraires pratiquées sans discernement.

Amnesty International a recueilli le témoignage d’un habitant : « Après les homicides [commis par Boko Haram], ils sont venus arrêter tous ces gens dans les environs [...]. Maintenant, si un événement se produisait dans une zone donnée, vous verriez la plupart des voisins faire leurs valises et quitter les lieux. »

Un autre habitant a décrit sa détention après avoir été arrêté parce qu’il était soupçonné de faire partie de Boko Haram : « Nous avons été conduit à la SARS [Brigade spéciale de répression des vols], à Abuja. Ces locaux sont surnommés l’abattoir […]. Nous n’étions pas vivants. Nous n’avions ni nourriture ni eau […]. Nous étions environ 45 par cellule […]. Il y avait aussi cinq jeunes enfants là-bas. »

L’insuffisance des enquêtes de police compromet les efforts visant à conduire les responsables présumés devant la justice.

Amnesty International engage les partis politiques et leurs candidats à placer la justice, la sécurité et les droits humains au cœur de la campagne électorale, afin de rompre le cycle de la violence qui s’étend au pays tout entier.


« Quand personne n’est conduit devant la justice pour des violences, cela laisse penser qu’on peut tuer en toute impunité »
, a ajouté Tawanda Hondora.

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