Azerbaïdjan. Cinq journalistes libérés

Déclaration publique

EUR 55/001/2008

Amnesty International se réjouit de la libération de cinq journalistes en Azerbaïdjan, à la suite d’une grâce officielle accordée par le président Ilham Aliev le 28 décembre 2007. L’organisation reste cependant préoccupée par le maintien derrière les barreaux dans ce pays d’autres journalistes indépendants ou d’opposition, en vertu de motifs contestables, notamment la diffamation, l’usage illégal de stupéfiants et le « houliganisme ». Les autorités azerbaïdjanaises montreraient leur engagement en faveur de la liberté d’expression en libérant sans délai tous les journalistes qui sont encore incarcérés. Elles pourraient aussi trouver là une bonne occasion de dépénaliser la diffamation, chef d’inculpation souvent invoqué par les responsables gouvernementaux contre les journalistes qui publient des informations sur les abus de pouvoir et la corruption.

Trois des cinq journalistes libérés, Rovsan Kebirli, Yasar Agazade et Faramaz Novruzoglu, ont été incarcérés en 2007 pour diffamation après avoir publié des articles sur des personnalités politiques de haut niveau ou avoir mentionné des faits de corruption imputables à des fonctionnaires. Les deux autres, Rafiq Tagi et le rédacteur en chef Samir Sadaqatoglu, ont été condamnés en mai à trois et quatre années d’emprisonnement respectivement, pour incitation à la haine religieuse, après avoir écrit et publié un article qui critiquait l’islam dans le journal Sanat. Amnesty International considère Rafiq Tagi et Samir Sadaqatoglu comme des prisonniers d’opinion ; par ailleurs, l’organisation exhorte les autorités azerbaïdjanaises à assurer la sécurité de ces journalistes à la suite de la fatwa émise par l’ayatollah iranien Fazel Lankarani, qui a lancé un appel au meurtre de ces hommes.

Plusieurs autres journalistes indépendants ou d’opposition emprisonnés pour des motifs contestables ou à l’issue de procès iniques sont maintenus en détention. Amnesty International prie les autorités azerbaïdjanaises, qui viennent de libérer cinq journalistes, de mettre également en liberté sans délai et sans conditions le prisonnier d’opinion Eynulla Fatullayev. Jugé deux fois en 2007, accusé de diffamation, de terrorisme, d’incitation à la haine interethnique et de fraude fiscale, Eynulla Fatullayev est passible de onze années d’emprisonnement. Les deux journaux dont il était rédacteur en chef, Realny Azerbaïdjan (en russe) et Gündelik Azarbaycan (en azéri) ont cessé de paraître en mai en raison de pressions exercées par les autorités.

Sakit Zahidov et Qanimat Zahid, deux frères, l’un journaliste satirique, l’autre rédacteur en chef du journal d’opposition Azadliq, sont eux aussi toujours incarcérés. Sakit Zahidov a été condamné le 4 octobre 2006 à trois années d’emprisonnement pour usage illégal de stupéfiants. Selon lui et selon des militants azerbaïdjanais pour les droits humains, ces accusations sont sans fondement. Les éléments médicaux présentés à son procès pour étayer les faits qui lui étaient reprochés n’étaient pas convaincants. Le procès lui-même n’était pas conforme aux normes internationales d’équité. Amnesty International a demandé qu’il soit de nouveau jugé conformément aux normes d’équité des procès, ou bien remis en liberté. Qanimat Zahid a été arrêté le 10 novembre pour « houliganisme », et se trouve actuellement détenu dans l’attente de son procès. Selon certaines informations, il aurait attaqué deux passants devant le siège du journal le 7 novembre, accusation reçue avec scepticisme par les organisations de défense des droits humains, dans le pays comme à l’étranger. Amnesty International demande qu’une enquête soit menée sur cette affaire dans de brefs délais. S’il s’avère que Qanimat Zahid a été victime d’une machination, il doit bénéficier d’une indemnisation et les responsables doivent être traduits en justice.

La libération de cinq journalistes emprisonnés constitue une étape vers l’amélioration des conditions d’exercice du droit à la liberté d’expression. Ce droit ne sera pleinement garanti que le jour où les citoyens auront accès à une vaste gamme d’opinions dans toutes sortes de médias différents, et où les journalistes pourront rédiger des articles sans éprouver la moindre crainte. Garant de la Constitution azerbaïdjanaise, qui prévoit le droit à la liberté d’expression, et partie à de nombreux instruments internationaux en matière de droits humains qui garantissent également ce droit, l’État azerbaïdjanais est dans l’obligation de mettre en place ces conditions. Amnesty International prie instamment les autorités azerbaïdjanaises de prendre de nouvelles mesures pour satisfaire à cette obligation.

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