Communiqué de presse

Bahreïn doit libérer des prisonniers d’opinion faisant l’objet d’un verdict inacceptable

La décision d’une cour d’appel bahreïnite de confirmer les sentences prononcées contre 13 militants de l’opposition et prisonniers d’opinion est inacceptable, et les autorités doivent veiller à ce qu’elle soit annulée et que ces militants soient libérés immédiatement et sans condition, a déclaré Amnesty International mardi 4 septembre 2012.

La Haute cour criminelle d’appel de Bahreïn a confirmé la déclaration de culpabilité et les peines prononcées contre 13 hommes condamnés l’année dernière par des tribunaux militaires pour des infractions liées à des manifestations antigouvernementales. Amnesty International avait envoyé un observateur assister au procès.

« La décision prise aujourd’hui par la cour porte une nouvelle fois atteinte à la justice et démontre encore une fois que les autorités bahreïnites ne sont pas sur la voie de la réforme, mais semblent plutôt poussées par leur envie de vengeance, a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Ce verdict plonge davantage Bahreïn dans l’injustice. Au lieu de confirmer les sentences, qui vont de cinq ans de prison à la réclusion à perpétuité, les autorités bahreïnites doivent annuler la déclaration de culpabilité de ces 13 hommes, détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits humains, et les libérer immédiatement et sans condition. »

Ces 13 hommes – dont Abdulhadi Al Khawaja, militant de premier plan, et Ebrahim Sharif, militant politique de l’opposition – ont d’abord été condamnés en juin 2011 par une juridiction militaire à des peines allant de deux ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité pour des infractions comprenant la « mise en place de groupes terroristes en vue de renverser la monarchie et de modifier la Constitution ».

Tous clament leur innocence.

Farida Ismail, la femme d’Ebrahim Sharif, a déclaré : « Je m’attendais à ce verdict car nous savons bien que le gouvernement n’est pas prêt à rendre des comptes. Les procédures judiciaires continuent comme avant.
« Les pays étrangers ne font pas assez pression sur Bahreïn. Ce qui se passera à l’avenir dépendra des mesures prises par la communauté internationale et des décisions des États lors de la prochaine session de l’Examen périodique universel. Quant à notre gouvernement, il n’est clairement pas prêt pour la justice. »

La déclaration de culpabilité et les peines prononcées contre les 13 militants avaient déjà été confirmées par un tribunal militaire en septembre 2011.
Néanmoins, le 30 avril 2012, la Cour de cassation avait ordonné que ces personnes comparaissent en appel devant une juridiction civile. Le procès a démarré le 22 mai dernier et s’est achevé avec la décision du 4 septembre, prononcée à l’issue d’une audience qui n’a duré que trois minutes.
La situation des droits humains à Bahreïn sera examinée lors du prochain Examen périodique universel, qui se tiendra devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies à la mi-septembre. À cette occasion, le pays devra confirmer quelles sont les recommandations faites par d’autres États qu’il accepte.

Lors de la précédente session de l’Examen périodique universel, 176 recommandations lui ont été présentées, notamment des propositions cruciales qui, si elles sont adoptées, montreraient que ce pays s’engage à garantir l’obligation de rendre des comptes.

« Bahreïn n’aura pas carte blanche devant le Conseil des droits de l’homme, et nous exhortons les États à dire aux autorités bahreïnites que la décision du 4 septembre franchit la ligne rouge et qu’elles ne peuvent donc plus être considérées comme des partenaires fiables », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

Bien que le gouvernement bahreïnite essaye de convaincre qu’il est sur la voie de la réforme, en pratique presque rien n’a été fait pour garantir que les responsables d’atteintes aux droits humains rendent des comptes et que les victimes de ces agissements obtiennent justice.

Les violences continuent et les prisonniers d’opinion restent derrière les barreaux.

Amnesty International a également demandé une nouvelle fois aux autorités de diligenter sans délai une enquête indépendante sur des allégations faites par les prévenus lors d’audiences précédentes. Ceux-ci ont affirmé avoir subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements en détention, y compris des agressions sexuelles, qui avaient pour but de les faire « avouer ».

Quatorze militants de l’opposition ont été arrêtés entre le 17 mars et le 9 avril 2011 après avoir participé à des manifestations en faveur de réformes, à Manama. L’un d’eux a par la suite été libéré.

Nombre d’entre eux ont déclaré avoir été torturés pendant leurs premiers jours de détention, alors qu’ils étaient interrogés par des membres de l’Agence nationale de sécurité.

Aucun n’a été autorisé à consulter un avocat pendant ces interrogatoires. Certains ont vu leurs représentants légaux lors de leur comparution devant le procureur militaire, avant le procès.

D’autres n’ont pu s’entretenir avec eux qu’au moment de la première audience, en mai 2011. C’est aussi à cette occasion qu’ils ont tous revu leurs familles pour la première fois depuis leur arrestation.

Trois prévenus ont été acquittés le 4 septembre des charges pesant sur eux.
Complément d’information

Les quatorze militants arrêtés sont : Hassan Mshaima, Abdelwahab Hussain, Abdulhadi al Khawaja, Abdel Jalil al Singace, Mohammad Habib al Miqdad, Abdel Jalil al Miqdad, Saeed Mirza al Nuri, Mohammad Hassan Jawwad, Mohammad Ali Ridha Ismail, Abdullah al Mahroos, Abdul Hadi Abdullah Hassan al Mukhodher, Ebrahim Sharif, Salah Abdullah Hubail al Khawaja et Al Hur Yousef al Somaikh.

Ce dernier a depuis été remis en liberté car il avait déjà purgé la totalité de sa peine, ramenée à six mois d’emprisonnement par la Cour de cassation.
D’autres prisonniers d’opinion sont actuellement incarcérés à Bahreïn, notamment :

Nabeel Rajab, président du Centre bahreïnite pour les droits humains et directeur du Centre du Golfe pour les droits humains, qui purge une peine d’emprisonnement de trois ans pour avoir appelé à des « rassemblements illégaux » et y avoir participé. Son procès en appel doit commencer le 10 septembre.

Mahdi Issa Mahdi Abu Dheeb, ancien président de l’Association des enseignants bahreïnites, qui purge une peine de 10 ans d’emprisonnement prononcée par un tribunal militaire, pour avoir profité de ses fonctions pour « appeler à une grève des enseignants, bloquer le processus d’enseignement et inciter à la haine contre le régime », entre autres chefs d’accusation. Aucun élément ne prouve qu’il ait employé ou prôné la violence.

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