Communiqué de presse

Cambodge. Il faut libérer les deux hommes injustement emprisonnés pour le meurtre d’un syndicaliste

Il faut immédiatement libérer les deux hommes injustement condamnés et emprisonnés pour le meurtre, en 2004, du syndicaliste de premier plan Chea Vichea, a déclaré Amnesty International mercredi 1er mai, jour de la fête du travail.

Born Samnang, 32 ans, et Sok Sam Oeun, 45 ans, ont été condamnés en 2005, à l’issue d’un procès inique, à 20 ans de prison. Ils avaient été déclarés coupables du meurtre, l’année précédente, de Chea Vichea, alors président du Syndicat libre des travailleurs du Cambodge.

À la suite d’une campagne menée par des groupes de défense des droits humains, la Cour suprême avait libéré les deux hommes sous caution le 31 décembre 2008 et ordonné la tenue d’un nouveau procès. Mais le 27 décembre 2012, quatre ans après leur libération provisoire, la cour d’appel a confirmé le premier verdict et les a renvoyés en prison, bien qu’aucun élément nouveau n’ait été présenté. Les deux hommes ont fait appel de cette décision.

« Au vu de l’enquête entachée de graves irrégularités, du procès manifestement inéquitable et de l’absence de preuve, ces deux hommes n’auraient jamais dû être condamnés », a affirmé Rupert Abbott, chercheur sur le Cambodge, le Laos et le Viêt-Nam à Amnesty International.

« Les autorités cambodgiennes doivent veiller à ce que ces deux hommes soient libérés immédiatement et sans condition une bonne fois pour toutes. Ils doivent pouvoir essayer de reconstruire leurs vies. »

Born Samnang et Sok Sam Oeun ont été arrêtés en janvier 2004. Ils étaient soupçonnés du meurtre de Chea Vichea.

Cet homme, qui avait reçu des menaces de mort, avait été abattu devant un kiosque à journaux dans le centre de Phnom Penh un peu plus tôt dans le mois.

Des policiers ont menacé et arrêté les personnes qui fournissaient un alibi aux deux suspects et ont intimidé d’autres témoins. Born Samnang a affirmé que la police l’avait battu et contraint à faire des « aveux », qui ont été utilisés comme principal élément de preuve lorsque les deux hommes ont été condamnés.

Un juge d’instruction qui avait abandonné les charges pour manque de preuves a été démis de ses fonctions et sa décision a été révoquée.

Le roi Norodom Sihanouk, aujourd’hui décédé, avait estimé que les deux hommes étaient des boucs émissaires. L’ancien chef de la police de Phnom Penh, Heng Pov, lui-même actuellement en prison, a déclaré qu’ils étaient innocents.

« L’enquête, le procès et le procès en appel ont été parsemés de graves irrégularités qui bafouent le droit à un procès équitable, protégé par la Constitution cambodgienne et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le pays est partie », a souligné Rupert Abbott.

« Amnesty International appelle de nouveau les autorités cambodgiennes à ouvrir une enquête exhaustive, indépendante et impartiale sur la façon dont cette affaire a été menée, en particulier sur les allégations d’actes de torture et d’autres mauvais traitements aux mains de la police, d’intimidation de témoins et d’ingérence politique dans la procédure judiciaire. »

Tandis que Born Samnang et Sok Sam Oeun croupissent en prison, les véritables assassins de Chea Vichea n’ont jamais été inquiétés.

Chea Vichea était à la tête du Syndicat libre des travailleurs depuis 1999 et il plaidait en faveur des droits des travailleurs de l’industrie du textile, alors en plein essor dans le pays.

Il était l’un des membres fondateurs du Parti de la nation khmère, parti d’opposition devenu Parti de Sam Rainsy en 1998. En 1997, alors qu’il participait à une manifestation réclamant des réformes judiciaires, il a été blessé par une grenade qui a fait 16 morts et plus de 100 blessés.

Personne n’a été traduit en justice pour cet attentat.

Un film ayant pour sujet le meurtre de Chea Vichea en janvier 2004, Qui a tué Chea Vichea ?, est interdit au Cambodge et les autorités ont interrompu plusieurs tentatives de projection.

Depuis la mort de cet homme, deux autres militants du Syndicat libre des travailleurs ont été tués à Phnom Penh et de nombreux autres syndicalistes ont été victimes de harcèlement, d’intimidation et de violences.

« Amnesty International appelle encore une fois les autorités cambodgiennes à faire le nécessaire pour qu’une enquête impartiale et efficace soit menée sur le meurtre de Chea Vichea et pour que les responsables présumés soient déférés à la justice », a déclaré Rupert Abbott.

« Cela, et la libération de Born Samnang et Sok Sam Oeun, aiderait à restaurer la confiance dans le système judiciaire cambodgien, un objectif pour lequel Chea Vichea lui-même a milité. »

Pour en savoir plus :

Cambodge. Les personnes injustement condamnées pour le meurtre d’un responsable syndical doivent être libérées, déclaration publique, Amnesty International, 22 janvier 2008.

Cambodia : The murder of trade unionist Chea Vichea : Still No Justice, déclaration publique, Amnesty International, 30 juillet 2006.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit