Corée du Sud. Le recours à la force contre des manifestants opposés aux importations de bœuf nécessite une enquête approfondie


COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI

La police sud-coréenne a eu recours à une force excessive contre des manifestants pacifiques qui protestaient contre la politique commerciale de leur gouvernement, a déclaré Amnesty International ce vendredi 18 juillet en présentant les conclusions préliminaires de son enquête sur les atteintes aux droits humains perpétrées lors des manifestations contre les importations de bœuf américain qui se sont déroulées dans le centre de Séoul entre le 25 mai et le 10 juillet.

« Le gouvernement doit faire la preuve de son engagement à respecter les règles du droit en faisant en sorte que les policiers ayant fait usage d’une force excessive aient à répondre de leurs actes et en veillant à ce que les manifestants passibles de poursuites pénales bénéficient des garanties d’une procédure régulière, a déclaré Norma Kang Muico, chargée de recherches auprès d’Amnesty International.

« Généralement, manifestants et policiers font preuve d’une remarquable organisation et s’imposent des limites. Ces manifestations, et la réponse qui leur a été apportée, montrent de manière générale la force de la société civile sud-coréenne et de ses institutions légales, mais nous avons recueilli plusieurs témoignages faisant état d’atteintes aux droits humains. »

Depuis le début du mois de mai, des dizaines de milliers de manifestants protestent contre la reprise des importations de bœuf américain, par crainte de l’ESB (encéphalopathie spongiforme bovine)ou maladie de la vache folle. Les manifestations, impliquant souvent des dizaines de milliers de personnes, ont été pacifiques pour la plupart, mais à plusieurs reprises des violences ont éclaté lorsque la police anti-émeute a tenté de contrôler la foule qui déferlait et que des manifestants ont attaqué et vandalisé des véhicules de police.

Au cours de veillées silencieuses organisées les 31 mai et 1er juin, les policiers ont fait usage d’extincteurs et de canons à eau contre des manifestants ; la faible distance à laquelle ils ont été utilisés ont occasionné des blessures graves, telles que perte de vision, fractures et commotions cérébrales.

L’enquête menée par Amnesty International montre que :

  à plusieurs reprises, les policiers ont eu recours à une force excessive et fait un usage abusif de dispositifs de lutte antiémeutes non meurtriers tels que des canons à eau et des extincteurs ;

  les policiers ont procédé à l’arrestation arbitraire de manifestants et de passants ;

  certaines des personnes interpellées ont été soumises à un traitement cruel, inhumain et dégradant et privées notamment de soins médicaux ;

  le gouvernement coréen n’a encore mené d’enquête appropriée sur ces allégations.

Un exemple concerne une employée de bureau de vingt-quatre ans, qui est tombée lorsque les policiers ont brusquement chargé dans la foule. Elle s’est retrouvée entourée d’au moins cinq policiers qui l’ont frappée à coups de matraque et lui ont donné à plusieurs reprises des coups de pied dans la tête. Pour se protéger, elle a couvert son visage de ses bras. Souffrant d’un bras cassé, le visage et la tête sévèrement contusionnés, elle présentait de nombreuses coupures et contusions sur la partie supérieure du corps. Elle n’a pas pu reprendre son travail et est hospitalisée depuis le 30 juin.

Un autre exemple est celui d’un garçon de quatorze ans qui prenait part aux veillées en compagnie de sa mère, de ses camarades de classe et de ses professeurs. Lorsque les policiers ont chargé la foule, tout le monde s’est mis à courir pour se mettre à l’abri. Un policier a frappé le garçon à l’arrière de la tête avec son bouclier, au moment où le garçon s’enfuyait en courant. Il s’est évanoui, saignant abondamment de la tête. Il a été amené à l’hôpital Severance de l’université Yonsei où les médecins lui ont fait des points de suture.

« Ces manifestations ont rassemblé des citoyens qui faisaient valoir leur point de vue avec force, mais pacifiquement pour la plupart. Leur propre gouvernement n’a su leur opposer qu’une force excessive et cela mérite une enquête plus approfondie », a déclaré Norma Kang Muico.

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