CORÉE DU SUD : MORT DE KIM DAE-JUNG, ANCIEN PRÉSIDENT DÉFENSEUR DES DROITS HUMAINS

L’ancien président sud-coréen Kim Dae-jung est mort mardi 18 août à l’âge de 85 ans. Cet homme, qui avait reçu le prix Nobel de la paix pour son action en faveur de la réconciliation avec la Corée du Nord, laisse en héritage son engagement en faveur des droits humains et de la démocratie.

Ancien prisonnier d’opinion, Kim Dae-jung a milité toute sa vie pour la promotion des droits humains tant en Corée du Sud que dans le reste du monde. Ayant lui-même été incarcéré dans le quartier des condamnés à mort, il était un fervent opposant à la peine capitale.

« Ses prises de position courageuses et sa lutte en faveur de la démocratie avaient fait de Kim Dae-jung dans les années 1970-1980 un héros et une source d’inspiration pour Amnesty International et de nombreuses personnes dans le monde, a déclaré la secrétaire générale d’Amnesty International Irene Khan.

« Amnesty International est honorée d’avoir milité en sa faveur lorsqu’il était prisonnier d’opinion, pendant ses années d’incarcération et lorsqu’il avait été condamné à mort. »

Kim Dae-jung avait été considéré comme un dangereux extrémiste dans les années 1970-1980 lorsque la Corée du Sud était soumise à une dictature militaire. Il avait survécu à des tentatives d’assassinat et d’enlèvement, échappé à une condamnation à mort et été contraint à l’exil à deux reprises.

Dans plusieurs interviews vidéos qu’il avait accordées à Amnesty International en avril, Kim Dae-jung avait évoqué son enfance (il était le fils d’un fermier), son expérience en tant que prisonnier d’opinion, l’attentat dont il avait fait l’objet à Tokyo en 1973 et ses années de présidence. L’un des principaux sujets de conversation avait cependant été la peine de mort. Il avait déclaré :

« Un être humain ne devrait jamais tuer un autre être humain. Nous devons abolir la peine de mort en Asie ... l’abolition de la peine capitale sur le continent asiatique pourrait avoir un effet d’entraînement sur l’Amérique centrale, l’Amérique du Sud, l’Afrique et le reste du monde ... la question de la peine de mort est l’une des questions fondamentales auxquelles sont confrontés les êtres humains et j’espère que les pays d’Asie montreront l’exemple en ce qui concerne la résolution de ce problème. »

Ce défenseur des droits humains avait été victime à plusieurs reprises de violences pour avoir exercé, de manière pourtant pacifique, son droit à la liberté d’expression.

En 1973, il avait été enlevé par des agents sud-coréens à l’hôtel Grand Palace de Tokyo. Il avait été traîné dans un bateau depuis lequel il était convaincu qu’il allait être jeté à la mer. Le gouvernement des États-Unis était intervenu en sa faveur et les agents avaient renoncé à leur plan. Cette tentative d’assassinat était sans doute liée au fait que Kim Dae-jung s’était opposé publiquement à une révision de la Constitution qui donnait plus de pouvoir au général Park Chung-hee, chef du régime militaire sud-coréen.

Kim Dae-jung avait passé la plupart des années 1970 en résidence surveillée ou en prison. C’est pendant cette période qu’il avait été adopté une première fois comme prisonnier d’opinion par Amnesty International.

Il avait été arrêté en mars 1976 pour avoir été un des signataires importants d’une déclaration pour la démocratisation nationale. Il avait été arrêté de nouveau en mai 1980, juste avant le massacre de Kwangju contre des civils qui s’étaient opposés à la dictature militaire. Accusé d’avoir « fomenté » la révolte, Kim Dae-jung avait été condamné à mort en septembre 1980.

Pendant cette période, Amnesty International et de nombreux autres groupes de pression et de défense des droits humains avaient mené campagne vigoureusement en faveur de Kim Dae-jung.

En 1981, à l’issue d’une grande campagne de protestation menée par plusieurs organisations dans le monde, sa condamnation à mort avait été commuée et, en 1982, il avait été libéré, en étant toujours sous le coup d’une condamnation avec sursis. Il était alors allé à Boston où il enseignait à l’Université de Harvard.

En février 1985, il avait été de nouveau placé en résidence surveillée le jour même de son retour de deux ans d’exil aux États-Unis. Assignation à résidence et harcèlement s’étaient poursuivis jusqu’en février 1986.

Lors d’une visite à Londres en 1993, Kim Dae-jung avait présenté à Amnesty International une calligraphie qu’il avait faite de quatre caractères chinois signifiant « toutes les nations ne forment qu’une famille ».

Il avait été élu président de la Corée du Sud en décembre 1997. C’était la première fois dans l’histoire du pays qu’un président du parti au pouvoir transmettait la fonction gouvernementale à un leader de l’opposition.

Pendant sa présidence, en 2000, Kim Dae-jung était devenu le premier, et jusqu’à ce jour l’unique, Coréen à recevoir le prix Nobel de la paix. Il devait cette récompense au fait d’avoir instauré la « politique de la main tendue » en vue d’un rapprochement avec la Corée du Nord communiste.

Kim Dae-jung avait quitté ses fonctions de président de la Corée du Sud en 2003.

« Récipiendaire elle aussi du prix Nobel de la paix, Amnesty International était honorée de partager l’opposition acharnée de Kim Dae-jung à la peine de mort et touchée de son engagement indéfectible en faveur des droits humains », a conclu Irene Khan.

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