Communiqué de presse

L’Égypte doit mettre fin aux attaques visant la société civile

La décision de lever une interdiction de voyager, imposée à sept ressortissants américains poursuivis dans le cadre d’une opération répressive menée contre les organisations non gouvernementales (ONG) en Égypte, est une mesure positive mais elle ne va pas assez loin, a déclaré Amnesty International.

L’organisation a demandé que ces poursuites, ouvertes en vertu d’une loi sévère sur les ONG, soient abandonnées et que les autorités cessent de s’en prendre à la société civile.

Les sept accusés en question font partie d’un groupe de 43 personnes – qui, à l’exception de 14 d’entre elles, sont toutes étrangères – actuellement jugées pour avoir, semble-t-il, porté atteinte à la loi égyptienne sur les associations.

Une interdiction de voyager continue à peser sur d’autres personnes citées dans l’enquête. Il est à craindre que cette affaire ne soit qu’un prélude à une offensive plus étendue contre les organisations égyptiennes de défense des droits humains. D’autres étrangers seraient également visés par une interdiction de voyager dans le cadre d’une autre affaire.

« Les autorités égyptiennes ne doivent pas se servir de ce cas très médiatisé pour détourner l’attention de la communauté internationale de la situation à laquelle sont confrontées les organisations égyptiennes des droits humains en Égypte », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International.

« Une fois que la communauté internationale ne s’intéressera plus à cette affaire, les défenseurs des droits humains en Égypte seront frappés de plein fouet, que ce soit devant les tribunaux ou face à la menace d’une loi sur les associations encore plus répressive. »

Lorsqu’il a annoncé que l’interdiction de voyager serait levée, le juge de la cour d’appel a fixé le montant de la caution pour ces ressortissants américains à deux millions de livres égyptiennes (environ 250 000 euros). En réaction aux poursuites engagées contre ces citoyens des États-Unis, les autorités américaines envisageaient de geler les aides militaires annuelles à l’Égypte à hauteur de 1,3 milliard de dollars (environ 976 millions d’euros).

Outre les sept Américains visés par cette mesure – neuf des 16 Américains concernés par cette affaire avaient quitté l’Égypte avant que l’interdiction de voyager ne soit décrétée – les autres personnes poursuivies incluent des Égyptiens, des Serbes, des Norvégiens et des Allemands. Des Palestiniens et des Jordaniens auraient aussi été inculpés.

Tous travaillent pour des ONG ayant leur siège aux États-Unis ou en Allemagne, qui se proposaient d’observer les élections législatives en Égypte avec le consentement des autorités ou de dispenser des formations sur la participation politique.

Amnesty International a assisté à la première audience du procès, au tribunal pénal du nord du Caire dimanche 26 février ; seuls les 14 accusés égyptiens comparaissaient.

Il leur était notamment reproché de travailler pour des organisations qui, contrairement à ce qui est prévu par la draconienne loi égyptienne sur les associations, acceptaient des financements étrangers et travaillaient illégalement dans le pays. Il est avéré qu’au moins trois de ces organisations ont officiellement déposé une demande d’enregistrement auprès des autorités égyptiennes.

La loi égyptienne sur les associations (loi 84 de 2002) est régulièrement critiquée par les organes de suivi des traités des Nations unies et par les spécialistes des droits humains.

Mercredi 29 février, après que les magistrats chargés du cas se soient récusés, la suite de ce procès est devenue très floue. La prochaine audience est programmée pour le 26 avril.

On s’attend à ce que les organisations égyptiennes de défense des droits humains soient les prochaines à se trouver dans la ligne de mire.
Le Conseil suprême des forces armées et d’autres instances égyptiennes ont eu tôt fait de reprocher aux organisations égyptiennes des droits humains d’être à l’origine des troubles, parce qu’elles dénonçaient des violations des droits humains.

« Les autorités égyptiennes essaient de faire des organisations égyptiennes des droits humains les boucs émissaires des troubles sociaux », a déploré Hassiba Hadj Sahraoui.

« Elles doivent savoir qu’autoriser ces citoyens américains à quitter le pays ne détournera pas l’attention de la communauté international des poursuites engagées contre les militants égyptiens. »

Le 29 décembre 2011, des bureaux utilisés par des ONG égyptiennes et internationales ont fait l’objet de descentes dans le cadre d’une enquête officielle.

Parmi les organisations concernées figuraient le Centre arabe pour l’indépendance de la justice et des professions juridiques, et l’Observatoire du budget et des droits humains. Depuis ces raids, des membres de ces deux organisations ont été convoqués et interrogés dans le cadre des investigations menées par les autorités.

Les résultats d’une enquête ouverte par le gouvernement ont filtré en septembre 2011 ; ils accusent plusieurs organisations de défense des droits humains d’enfreindre les lois sur l’enregistrement et les financements étrangers. Cette année, au moins deux membres d’organisations de défense des droits humains ont dit avoir été interrogés au sujet des activités de leur organisation.

Les autorités égyptiennes essaient par ailleurs de faire adopter une loi qui limiterait encore davantage les activités de la société civile.

Ce texte accorderait aux autorités des pouvoirs étendus leur permettant de déterminer si les activités d’une organisation sont acceptables, tout en maintenant des règles strictes quant au financement et en renforçant les restrictions relatives à l’enregistrement.

Enfreindre cette loi serait passible d’une peine d’un an de prison et d’amendes d’un montant pouvant atteindre des milliers de livres égyptiennes.

« Les autorités égyptiennes doivent abandonner ce projet de loi qui va au-delà de la loi sur les associations, déjà répressive, et veiller à ce que la législation dans son ensemble respecte le droit à la liberté d’association », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

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