Espagne. Le gouvernement autonome de Catalogne doit prendre des mesures contre les policiers reconnus coupables de torture


DECLARATION PUBLIQUE

Index AI : EUR 41/021/2008 -
ÉFAI

Londres – Amnesty International exprime sa profonde préoccupation à propos des informations selon lesquelles deux membres de la police autonome de Catalogne auraient bénéficié d’une promotion alors qu’ils faisaient l’objet d’une information judiciaire pour torture et agression.

Le 20 novembre 2008, le tribunal provincial de Barcelone a reconnu ces deux policiers et trois de leurs collègues coupables de torture et d’agression à l’encontre de Lucian Padurau, au cours d’une arrestation survenue en 2006 à Barcelone. Trois de ces policiers ont été condamnés à six ans de prison, un autre à deux ans, et le dernier à plusieurs amendes. Tous les cinq sont maintenant suspendus de leurs fonctions et ne perçoivent plus leur salaire. Le gouvernement autonome de Catalogne a été condamné à verser des dommages et intérêts à Lucian Padurau.

Depuis de nombreuses années, Amnesty International s’inquiète des graves problèmes de torture et d’autres mauvais traitements aux mains d’agents de la force publique en Espagne, ainsi que de l’incapacité persistante des autorités à prendre les sanctions nécessaires contre les responsables de ces actes. L’organisation craint fortement que le fait d’accorder une promotion à deux policiers se trouvant sous le coup d’une information judiciaire pour de graves accusations de violations des droits humains ne fasse qu’encourager un climat d’impunité pour ce type d’agissements. Par ailleurs, elle constate que les autorités policières catalanes n’ont pas suivi les recommandations du Comité des Nations Unies contre la torture, qui a conseillé que les agents de la force publique faisant l’objet d’une enquête pour mauvais traitements soient suspendus de leurs fonctions pendant toute la durée de la procédure (rapport du Comité contre la torture à l’Assemblée générale des Nations Unies, doc. ONU A/56/44).

Les autorités catalanes et espagnoles doivent faire clairement savoir à tous les agents des forces de l’ordre que tout acte de torture ou autre mauvais traitement entraînera des sanctions disciplinaires sévères proportionnelles à la gravité de l’infraction commise. C’est le seul moyen de mettre un terme à ces agissements et de protéger la réputation de l’ensemble des organes responsables de l’application des lois. Le grand public, ainsi que la majorité des agents de la force publique qui exercent leurs fonctions avec professionnalisme et dans le respect des lois, doivent avoir la certitude qu’il n’y a pas de place au sein des forces de l’ordre pour les policiers qui abusent de leurs pouvoirs.

Amnesty International appelle les autorités policières catalanes à prendre, conformément aux normes juridiques internationales et aux recommandations des organismes internationaux, des sanctions disciplinaires appropriées contre tous les policiers reconnus coupables de violations des droits humains. Elle leur demande également de veiller à ce que les agents de la force publique faisant l’objet d’une information judiciaire pour des actes de torture ou d’autres mauvais traitements présumés soient suspendus de leurs fonctions dans l’attente des conclusions d’une enquête exhaustive et impartiale.

Complément d’information

Lucian Padurau a été arrêté par des policiers en civil le 27 juillet 2006 à Barcelone, à la suite d’une erreur d’identité. Des témoins de l’arrestation ont déclaré à l’audience avoir vu les policiers le jeter à terre sans aucun avertissement, lui piétiner la tête et lui donner des coups de pied dans les côtes. Les policiers n’ont révélé qu’ils étaient de la police que lorsqu’un attroupement s’est formé et que la foule leur a crié d’arrêter. La compagne de Lucian Padurau, qui était enceinte de trois mois à l’époque, a elle aussi été interpellée par les policiers. Des témoins ont vu ces derniers la tirer par les cheveux et la pousser violemment dans un véhicule de police.

Lucian Padurau a été emmené en voiture au poste de police de Les Corts, à Barcelone. Pendant le voyage, les policiers ont continué de le frapper bien qu’il les ait suppliés d’arrêter, leur expliquant qu’il était hémophile et qu’il risquait de mourir des blessures qu’ils lui infligeaient. L’un des policiers lui a aussi mis un pistolet dans la bouche et a menacé de le tuer. Au poste de police, les violences se sont poursuivies jusqu’à ce qu’un autre policier prévienne ses collègues que les caméras vidéos étaient en marche.

En novembre 2007, Amnesty International a publié un rapport intitulé Spain : Adding insult to injury : The effective impunity of police officers in cases of torture and other ill-treatment, dans lequel elle décrivait, entre autres, le cas de Lucian Padurau. Ce rapport dénonçait le caractère généralisé et persistant de la torture et des autres mauvais traitements en Espagne, et révélait que, trop souvent, les responsables de ces actes bénéficiaient d’une impunité de fait en raison de la médiocrité et de l’iniquité des enquêtes menées à propos des plaintes déposées par les victimes.

FIN

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