ÉTATS-UNIS : L’administration des États-Unis continue d’ignorer les droits des détenus de Guantánamo

L’administration des États-Unis continue d’ignorer les normes fondamentales relatives aux droits humains dans son traitement des détenus à Guantánamo, a déclaré Amnesty International ce jeudi 8 juillet.

« Le gouvernement devrait faire tout son possible pour faciliter une révision complète de la légalité de ces détentions », a déclaré Amnesty International. « Au lieu de cela, il essaye apparemment de diminuer la portée de cette révision judiciaire, tout en poursuivant son programme de procès devant des commissions militaires qui bafouent les normes fondamentales pour un procès équitable. »
Environ 600 détenus d’une quarantaine de nationalités sont toujours détenus sans inculpation ni procès à la base navale des États-Unis, à Guantánamo. Certains s’y trouvent depuis le début du mois de janvier 2002. La semaine dernière, la Cour suprême des États-Unis a rejeté l’un des principes de base de la politique de détention de l’administration, dans le cadre de la « guerre au terrorisme ». La Cour suprême a en effet décidé que les détenus de Guantánamo ont le droit de remettre en cause la légalité de leur détention devant les tribunaux des États-Unis. Ce mercredi 7 juillet, le Pentagone a annoncé la création de tribunaux d’examen du statut du combattant, devant lesquels les détenus de Guantánamo pourront remettre en cause leur soi-disant statut de « combattant ennemi ».

« Les détenus ne disposeront pas d’un avocat dans cette procédure, qui dans son intégralité, se déroulera dans le cadre militaire », a remarqué Amnesty International. « Tous les éléments à charge pourront être retenus, y compris des témoignages anonymes ou ayant pu être obtenus par la contrainte. »

Amnesty International craint que le dossier limité obtenu par cette procédure soit utilisé par la suite devant les tribunaux des États-Unis, si un détenu remet en cause la légalité de sa détention. Le Pentagone a déclaré que les détenus seront informés de leur droit à déposer une requête en habeas corpus devant les tribunaux des États-Unis : cette procédure permet de contester la légalité d’une détention.
« Nous craignons que l’administration ne tente de limiter l’appréciation des tribunaux au dossier incomplet qui sortira des tribunaux d’examen du statut du combattant », a déclaré Amnesty International. « L’administration doit, au minimum, informer les détenus de leur droit à une révision judiciaire complète devant un tribunal, et faciliter leur accès à un avocat, pour qu’une procédure équitable et complète puisse avoir lieu. »

Ce mercredi 7 juillet, le Pentagone a également annoncé que le président Bush avait soumis neuf détenus étrangers supplémentaires au décret militaire qu’il a signé le 13 novembre 2001. Ce décret permet une détention pour une durée indéfinie, sans procès ou avec procès par des commissions militaires, organes exécutifs dotés du pouvoir d’infliger la peine de mort, et sans droit d’appel devant aucun tribunal. Cette annonce porte à 15 le nombre de détenus concernés par le décret militaire. Trois d’entre eux ont été inculpés.

« Les procès devant les commissions militaires - des organes exécutifs, et non des tribunaux indépendants ou impartiaux - violeraient les normes élémentaires pour un procès équitable », a déclaré Amnesty International. « L’absence de droit d’appel, les restrictions imposées à la défense, et l’application discriminatoire du droit à un procès équitable constituent autant de sources d’inquiétude. »
Les six personnes concernées pour l’instant par le décret militaire sont détenues depuis des mois à l’isolement dans les cellules de Camp Echo, dénuées semble-t-il de fenêtres. Leur santé mentale suscite de graves inquiétudes, ainsi que d’éventuelles contraintes qui leur seraient imposées pour obtenir d’eux des plaidoiries de culpabilité ou des déclarations à charge, qui seraient alors admises dans la procédure de la commission militaire. Amnesty International craint que, sur les neuf détenus récemment visés par le décret militaire, certains ou tous soient transférés à Camp Echo, dans des conditions d’isolement cruelles.

Dans un rapport publié le mois dernier, Amnesty International a souligné que la révision judiciaire de la légalité d’une détention constitue un principe fondamental du droit international relatif aux droits humains, qui couvre désormais toutes les personnes détenues à Guantánamo. Cette révision judiciaire fait partie intégrante de l’interdiction de la détention arbitraire et constitue une protection fondamentale contre la torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.
L’organisation a également demandé qu’une commission d’enquête indépendante du gouvernement ait les pleins pouvoirs pour enquêter sur les politiques, les pratiques et les lieux de détention des États-Unis relevant de la « guerre au terrorisme », afin de demander des comptes à tous ceux qui auraient autorisé, commis ou approuvé la torture ou les mauvais traitements.

Amnesty International demande la libération de tous les détenus de Guantánamo, à moins qu’ils soient inculpés et traduits en justice, sans recours à la peine de mort, dans une procédure respectant pleinement les normes internationales pour un procès équitable.

Index AI : AMR 51/113/2004

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