« Deux ans après la mort tragique de Berta Cáceres, l’incapacité à résoudre cette affaire et à traduire tous les responsables présumés en justice adresse un message inquiétant, à savoir que les défenseurs des droits humains peuvent être tués en toute impunité s’ils osent s’élever contre ceux qui sont au pouvoir au Honduras », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice du programme Amériques à Amnesty International.
« Rendre justice à Berta suppose également d’identifier les commanditaires de son assassinat, ce que cette enquête entachée de graves irrégularités n’a pas fait. Par leur inaction, les autorités honduriennes manquent à leur obligation de protéger les défenseurs des droits humains contre de nouvelles attaques. »
Le 2 mars 2016, Berta Cáceres, défenseure courageuse des droits de l’environnement et des droits des indigènes, a été abattue par des hommes de main à son domicile, dans la province d’Intibucá, au Honduras. Avec d’autres membres du Conseil civique d’organisations indigènes et populaires du Honduras (COPINH), elle a fait campagne contre la construction du barrage hydroélectrique d’Agua Zarca à cause de ses répercussions sur le territoire du peuple indigène lenca.
Amnesty International a recueilli des informations mettant en évidence les menaces et la stigmatisation accrue dont font l’objet ceux qui réclament vérité, justice et réparations pour son assassinat et ceux qui osent encore dénoncer les actions des puissantes entreprises contre les peuples indigènes ou les communautés paysannes.
En 2017, l’ONG Global Witness a qualifié le Honduras de pays le plus meurtrier au monde pour les militants écologistes, ayant recensé plus de 120 cas de défenseurs tués depuis 2010.
Amnesty International demande aux autorités honduriennes d’enquêter sur ceux qui ont commandité le meurtre de Berta et de se pencher sérieusement sur les preuves et les pistes d’enquête fournies par sa famille et ses avocats. Elle les invite également à mener dans les meilleurs délais une enquête approfondie et efficace sur les menaces et les attaques signalées par le COPINH et d’autres défenseurs des droits à la terre et des droits de l’environnement, et à mettre en œuvre des mesures de protection efficaces adaptées à leurs besoins et respectant leurs souhaits.
La famille demande une enquête plus large
Un rapport récent de l’équipe indépendante d’avocats internationaux engagés par la famille de Berta Cáceres a mis en lumière les graves irrégularités de l’enquête officielle. Ce rapport contient des éléments de preuve qui impliqueraient dans ce crime des dirigeants d’entreprises et des responsables de l’État.
Le bureau du procureur général hondurien a arrêté huit personnes en lien avec le meurtre de Berta : certaines sont liées à Desarrollos Energéticos S.A. (DESA), l’entreprise chargée de la construction du barrage d’Agua Zarca, d’autres entretiennent des liens avec l’armée. Le COPINH déplore toutefois qu’aucun haut responsable du gouvernement ou de l’entreprise n’ait fait l’objet d’investigations pour avoir commandité le meurtre.
À l’approche du procès qui doit s’ouvrir en juin, les avocats de la famille de Berta et le COPINH demandent au bureau du procureur et aux autorités judiciaires de garantir que ceux qui sont responsables d’avoir ordonné l’assassinat de Berta fassent aussi l’objet d’enquêtes et soient traduits en justice.