Il faut concrétiser la résolution de l’ONU par le biais de la justice internationale pour les victimes du conflit de Gaza

DÉCLARATION PUBLIQUE

Index AI : MDE 15/021/2011

25 mars 2011

La résolution adoptée vendredi 25 mars par le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies (ONU) concernant le conflit de 2008-2009 dans la bande de Gaza et le sud d’Israël, si elle est imparfaite à certains égards, crée néanmoins une occasion pour les victimes d’obtenir justice à l’échelon international, à condition que l’Assemblée générale des Nations unies agisse avec fermeté.

Cette résolution engage l’Assemblée générale des Nations unies à lutter contre l’impunité persistante pour les crimes de guerre et possibles crimes contre l’humanité commis lors du conflit de 2008-2009 dans la bande de Gaza, en appelant le Conseil de sécurité de l’ONU à saisir le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de la situation. Amnesty International exhorte l’Assemblée générale à faire avancer le processus le plus rapidement possible afin de trouver une issue à la question sur le terrain de la justice internationale.

Les victimes palestiniennes et israéliennes de ce conflit ayant duré 22 jours dans la bande de Gaza et le sud d’Israël attendent encore justice plus de deux ans après les faits, et les autorités se sont montrées inaptes ou réticentes à les aider dans ce domaine. Amnesty International s’est prononcée en faveur d’un recours à la justice internationale afin de mettre un terme au cycle de l’injustice et de l’impunité. L’Assemblée générale doit désormais faire le nécessaire pour que la question soit inscrite à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, de sorte à favoriser une action concrète et en particulier la saisine de la CPI.

La résolution de vendredi 25 mars a été rédigée par l’Autorité palestinienne et adoptée par le Conseil des droits de l’homme à 27 voix pour, trois contre et 16 abstentions. Le vote a fait suite au second rapport d’un comité d’experts indépendants chargé d’effectuer un suivi des enquêtes menées par Israël et le Hamas sur les violations commises lors du conflit, document soumis au Conseil des droits de l’homme le 18 mars 2011. Le comité d’experts est parvenu dans ce rapport à la même conclusion qu’Amnesty International, à savoir que plus de 18 mois après que la délégation chargée de la mission d’établissement des faits de l’ONU sur le conflit de Gaza eut constaté que des crimes de droit international avaient été commis par les deux camps, les autorités israéliennes et le gouvernement de facto du Hamas n’ont toujours pas mené d’enquête conforme aux normes internationales en termes d’indépendance, d’impartialité, de rigueur, d’efficacité et de promptitude.

Le rapport remis en septembre 2009 à la suite de la mission d’établissement des faits de l’ONU dirigée par le juge Richard Goldstone indiquait que l’armée israélienne et des groupes armés palestiniens avaient perpétré des crimes de guerre et peut-être même des crimes contre l’humanité au cours du conflit. Il préconisait que le Conseil de sécurité saisisse la CPI du dossier si les autorités ne menaient pas dans les six mois des enquêtes crédibles et indépendantes respectant les normes internationales. La résolution adoptée vendredi 25 mars par le Conseil des droits de l’homme recommande que l’Assemblée générale réexamine le rapport de la mission d’établissement des faits lors de sa 66e session, qui s’ouvrira en septembre 2011, et transmette ce document au Conseil de sécurité, qui ne l’a pas encore étudié.

L’Assemblée générale a déjà engagé à deux reprises - dans des résolutions adoptées en novembre 2009 et en février 2010 - les autorités des deux camps à mener des enquêtes crédibles et indépendantes sur les atteintes graves au droit international humanitaire et relatif aux droits humains recensées par la mission d’établissement des faits de l’ONU. Ces appels n’ont clairement pas été entendus et l’Assemblée générale doit soumettre sans délai la question au Conseil de sécurité. Ce faisant, l’Assemblée générale doit également veiller à ce que les deux rapports du comité d’experts indépendants soient présentés au Conseil de sécurité, bien que la résolution adoptée vendredi 25 mars par le Conseil des droits de l’homme n’ait pas prévu que ces rapports soient transmis à l’Assemblée générale.

Parallèlement, Amnesty International a noté que le procureur de la CPI n’a pas encore demandé aux juges de la Chambre préliminaire de déterminer s’il est habilité à ouvrir une enquête sur les crimes commis pendant le conflit sur la base d’une déclaration faite en janvier 2009 par l’Autorité palestinienne. Cette dernière y reconnaissait la compétence de la CPI au regard des crimes « commis sur le territoire de Palestine depuis le 1er juillet 2002. » Des experts juridiques contestent le fait que l’Autorité palestinienne soit un « État » pouvant faire une déclaration de ce type en vertu du Statut de Rome. Si les juges déterminaient que la CPI peut agir sur la base de cette déclaration, une saisine par le Conseil de sécurité ne serait pas nécessaire pour que la Cour ouvre une enquête. Amnesty International continue à exhorter le procureur de la CPI à demander dans les meilleurs délais à la Chambre préliminaire de trancher.

Face aux éléments accablants montrant que les autorités israéliennes et du Hamas à Gaza privent de justice les victimes palestiniennes comme israéliennes, Amnesty International continue également à engager tous les États à enquêter sur les crimes de droit international perpétrés durant le conflit et à engager des poursuites devant leurs juridictions nationales en exerçant leur compétence universelle.

Depuis janvier 2011, Amnesty International a recueilli la signature de près de 109 000 de ses membres et sympathisants à travers le monde en faveur d’une pétition appelant le Conseil des droits de l’homme – qui n’a pas pris d’initiatives concrètes lors de sa 15e session, en septembre 2010 – à soutenir une solution de justice internationale pour les victimes.


Complément d’information

L’opération Plomb durci, l’offensive militaire lancée par Israël contre la bande de Gaza ayant pris fin le 18 janvier 2009 au bout de 22 jours, a tué 1 400 Palestiniens, des civils pour la plupart, et détruit des zones étendues dans la bande de Gaza. Treize Israéliens, dont trois civils, ont perdu la vie au cours du conflit. Les deux camps ont violé le droit international humanitaire. Les forces israéliennes ont tué des civils en utilisant des armes de précision, lancé des attaques aveugles ne faisant aucune distinction entre cibles militaires légitimes et civils, et attaqué des immeubles et infrastructures civiles, des locaux des Nations unies, ainsi que des installations médicales et des professionnels de santé. La branche militaire du Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ont mené des attaques aveugles à la roquette et au mortier contre le sud d’Israël.

La résolution adoptée le 25 mars par le Conseil des droits de l’homme, élaborée et proposée par l’Autorité palestinienne, n’inclut pas de référence directe aux violations perpétrées par des groupes armés palestiniens au cours du conflit, ni au fait que les autorités du Hamas n’ont pas mené d’enquête satisfaisante. Elle ne prévoit pas non plus la transmission des deux rapports du comité d’experts indépendants à l’Assemblée générale. Amnesty International a critiqué le projet de résolution pour ces deux raisons (voir http://livewire.amnesty.org/2011/03/21/un-body-can-help-bring-international-justice-for-gaza-conflict-victims/#more-3189). Les États-Unis, le Royaume-Uni et la Slovaquie ont voté contre cette résolution, tandis que des États membres de l’Union européenne se sont abstenus, ainsi que l’ont fait plusieurs autres pays.

Le rapport de la mission d’établissement des faits de l’ONU sur le conflit de Gaza (septembre 2009) est disponible à l’adresse suivante : http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/specialsession/9/FactFindingMission.htm

L’évaluation, mise à jour, d’Amnesty International concernant les enquêtes israélienne et palestinienne est présentée à l’adresse suivante : http://www.amnesty.org/fr/library/info/MDE15/018/2011/fr

Les rapports du Comité d’experts indépendants se trouvent aux adresses ci-dessous :
http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/docs/15session/A.HRC.15.50_en.pdf et http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/docs/16session/A.HRC.16.24_AUV.pdf.

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