Trois ans après cette répression meurtrière, les autorités iraniennes refusent toujours d’ouvrir la moindre information judiciaire sur les innombrables crimes et violations des droits humains perpétrés par les forces de sécurité iraniennes pendant et après les manifestations, comme des homicides illégaux, des disparitions forcées, des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements, ainsi que des procès contraires aux règles d’équité les plus élémentaires ayant débouché sur l’exécution d’au moins un manifestant et sur des condamnations à mort pour plusieurs autres.
Au contraire, fidèles à leur habitude de dissimulation et de déni, les autorités ont intimidé et harcelé les familles des victimes pour les empêcher de s’exprimer. Elles ont aussi fait de fausses déclarations et diffusé des vidéos de propagande dans le but de nier ou de déformer la vérité quant aux agissements illégaux des forces de sécurité, qui ont fréquemment tiré à balles réelles sur des manifestant·e·s ne représentant pas de menace imminente de mort ou de grave blessure, et pour attribuer de façon mensongère la responsabilité des homicides commis pendant les manifestations à des « émeutiers » armés à la solde des « ennemis » de la République islamique d’Iran.
Le porte-parole de l’appareil judiciaire a déclaré le 14 janvier 2018 que 25 personnes avaient été tuées pendant les manifestations, mais Amnesty International estime que le bilan réel pourrait être plus lourd.
L’impunité généralisée dont bénéficient les forces de sécurité et la réaction très modérée de la communauté internationale n’ont fait qu’encourager les autorités iraniennes à renforcer leur recours illégal à la force meurtrière au cours des grandes manifestations de novembre 2019, qui se sont soldées par des centaines de morts.
Au lendemain de la répression meurtrière de décembre 2017 et janvier 2018, le recours à la peine de mort comme arme de répression politique s’est également intensifié. Au moins un manifestant a été exécuté en lien avec les manifestations (Mostafa Salehi, en août 2020), et cinq autres risquent de l’être (Mohammad Bastami, Mehdi Salehi, Hadi Kiani, Abbas Mohammadi et Majid Nazari). Pour la première fois depuis des décennies, les autorités ont également exécuté un journaliste dissident, Rouhollah Zam, à qui elles ont ôté la vie en décembre 2020 en raison des informations publiées sur la chaîne populaire qu’il administrait, Amad News, accusée d’avoir attisé les manifestations de décembre 2017 et janvier 2018.
Les effusions de sang répétées auxquelles se livrent les autorités iraniennes doivent cesser.
Il incombe à la communauté internationale de faire pression sur les autorités iraniennes pour que celles-ci cessent de recourir systématiquement à la force meurtrière pour écraser les manifestations ; le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, notamment, doit ouvrir une enquête internationale indépendante sur les manifestations de novembre 2019, date à laquelle la répression a atteint un niveau inédit depuis les années 1980.
Complément d’information
Entre la fin décembre 2017 et la mi-janvier 2018, dans plus de 100 villes de tout le pays, des milliers de personnes sont descendues dans la rue pour protester contre la pauvreté, la corruption, la répression politique et l’autoritarisme. L’Iran n’avait pas vu de manifestations d’une telle ampleur depuis l’élection présidentielle controversée de 2009.