DÉCLARATION PUBLIQUE
ÉFAI-
20 octobre 2009
Les informations des médias faisant état de la présence de nombreux civils parmi les personnes tuées ou blessées lors de l’attentat-suicide perpétré le 18 octobre 2009 dans le sud-est de l’Iran laissent craindre, indique Amnesty International, que cette attaque revendiquée par le Mouvement de la résistance populaire d’Iran (MRPI) ait été disproportionnée et contraire aux principes du droit international humanitaire, que ce mouvement s’est engagé à respecter. L’organisation est également préoccupée par les informations selon lesquelles le MRPI s’en est pris à des responsables politiques locaux.
Par ailleurs, Amnesty International fait part de son inquiétude devant les déclarations du gouvernement iranien, qui a promis une « réponse destructrice » à l’attentat, laquelle entraînera probablement des violations des droits humains. Les craintes de l’organisation sont renforcées par l’attitude des autorités iraniennes face à de tels attentats dans le passé, et les représailles (arrestations arbitraires, torture de suspects et exécutions sommaires) conduites contre la population civile baloutche.
Selon les informations parues dans la presse, au moins 42 personnes sont mortes et une dizaine d’autres ont été blessées lors d’un attentat-suicide perpétré dans la province de Sistan-e Baloutchistan, dans le sud-est de l’Iran. Cette attaque était dirigée contre des commandants des Gardiens de la révolution en visite dans le district de Pishin, proche de la frontière pakistanaise, où ils devaient rencontrer des dirigeants tribaux locaux. Six responsables des Gardiens de la révolution au moins ont été tués ; les autres victimes, parmi lesquelles se trouvent des chefs de tribu, se compteraient pour un grand nombre au sein de la population civile.
Également connu sous le nom de Joundallah, le MRPI est un groupe armé baloutche opposé au gouvernement iranien, qui se revendique comme défenseur des Baloutches et des sunnites.
Le mouvement est à l’origine de plusieurs attaques menées ces dernières années contre les forces gouvernementales iraniennes dans la province de Sistan-e Baloutchistan, notamment de bombardements, d’attentats-suicides et d’enlèvements de responsables suivis d’assassinats, autant d’actes qu’Amnesty International n’a cessé de condamner.
Le 28 mai 2009, peu avant l’élection présidentielle du mois de juin, un kamikaze du MRPI a fait exploser la bombe qu’il portait dans une mosquée de Zahedan, la capitale de la province. Vingt-cinq personnes au moins auraient été tuées et des dizaines d’autres blessées lors de l’attentat qui, selon le MRPI, a été mené en représailles à l’exécution de plusieurs ecclésiastiques sunnites ces dernières années.
Moins de quarante-huit heures après les faits, trois hommes désignés comme responsables ont été pendus en public non loin du lieu de l’attentat. Des déclarations ultérieures ont permis de comprendre qu’ils se trouvaient en fait en détention au moment de l’attaque, mais avaient « avoué » avoir fourni les explosifs utilisés lors de celle-ci. De nouveaux troubles ont éclaté par la suite, faisant environ dix morts et donnant lieu à des dizaines d’arrestations.
Le 14 juillet 2009, 13 prisonniers baloutches, appartenant au MRPI selon les autorités iraniennes et condamnés pour « inimitié à l’égard de Dieu » pour avoir « enlevé des étrangers, tués des innocents et perpétré des attentats terroristes au nom du groupe Joundallah », ont été exécutés dans la prison de Zahedan.
En 2007, cinq jours après l’attentat à l’explosif perpétré en février à Zahedan contre un bus transportant des gardiens de la révolution, les autorités ont annoncé l’exécution de Nasrollah Shanbezehi. Arrêté dans les heures qui ont suivi les faits, cet homme a été pendu en public sur les lieux de l’attentat. On a pu voir sur des photos prises au moment de l’exécution que son visage portait la marque d’une blessure. Il aurait été jugé et condamné par une chambre du tribunal révolutionnaire après que ses « aveux » eurent été diffusés par la télévision le lendemain de l’attentat. Selon des sources baloutches, il aurait été arrêté parce qu’il prenait une photo du bus au moyen de son téléphone portable.
L’Iran, estime Amnesty International, a certes la responsabilité de maintenir la sécurité et de traduire devant les tribunaux les responsables présumés d’atteintes aux droits humains ; mais les autorités de Téhéran doivent agir dans le respect du droit international relatif aux droits humains. Le MRPI doit pour sa part cesser immédiatement de commettre de telles atteintes – attentats contre des civils, y compris des responsables politiques locaux, attaques aveugles et disproportionnées, prises d’otages et exécution d’otages ou de membres des forces de sécurité enlevés.
Complément d’information
La minorité baloutche d’Iran est victime de discriminations imposées par les autorités nationales, qui se traduisent par des violations flagrantes de ses droits économiques, sociaux et culturels. Vivant principalement dans les provinces de Sistan-e Baloutchistan et de Kerman, elle représenterait entre 1 et 3 % de la population totale du pays (environ 70 millions d’habitants). Il s’agit pour la plupart de musulmans sunnites, tandis que la population iranienne est majoritairement chiite.
Pour plus d’informations, veuillez consulter les documents suivants :
http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/news/iran-presidential-election-amid-unrest-and-ongoing-human-rights-violations-20090605