Iran/États-Unis. Roxana Saberi fait les frais des relations politiques tendues entre les deux pays

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Roxana Saberi est un pion sur l’échiquier des relations politiques entre l’Iran et les États-Unis et devrait être considérée comme une prisonnière d’opinion, a déclaré Amnesty International alors que l’organisation demandait, ce lundi 20 avril, la libération immédiate et inconditionnelle de la journaliste irano-américaine.

« Le fait que Roxana Saberi ait fait l’objet d’accusations changeantes entre son arrestation et son procès montre bien que les autorités iraniennes cherchaient un alibi pour la maintenir en détention », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. À moins que les autorités iraniennes ne puissent fournir des éléments prouvant de manière convaincante qu’elle a commis une infraction pénale prévue par la loi, rien ne justifie la détention de Roxana Saberi. »

Âgée de 31 ans, Roxana Saberi, qui est née aux États-Unis et vit depuis six ans en Iran où elle travaille comme journaliste, a été condamnée, à huis clos, le 18 avril, à huit ans d’emprisonnement pour « espionnage ».

Son père a indiqué que des "aveux" qu’elle avait faits sous la contrainte avant d’être jugée pourraient avoir été utilisés comme éléments à charge lors du procès.

Amnesty International a noté que dans une déclaration, dimanche 19 avril, le président Mahmoud Ahmadinejad avait demandé au procureur général de Téhéran de veiller à ce que Roxana Saberi jouisse de tous les droits prévus par la loi pour assurer sa défense ; l’organisation a pris note également de la déclaration, lundi 20 avril, du responsable du pouvoir judiciaire, qui a demandé que la journaliste bénéficie d’une procédure d’appel rapide et juste.

« Les propos récents du président Ahmadinejad s’apparentent à une reconnaissance tacite d’un fait que nous soulignons depuis des années, à savoir qu’en Iran il n’est pas facile d’obtenir justice », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

« Si, comme cela semble être le cas, Roxana Saberi est détenue uniquement pour des raisons politiques liées aux relations entre les États-Unis et l’Iran ou parce qu’elle a exercé son droit internationalement reconnu à la liberté d’expression, alors la journaliste est une prisonnière d’opinion et elle devrait être libérée immédiatement et sans condition. Nous espérons qu’au moins la justice sera rendue en appel. »

Complément d’information

Arrêtée le 31 janvier, Roxana Saberi a été accusée dans un premier temps d’avoir acheté de l’alcool, ce qui est interdit en Iran. Elle a été détenue à la prison d’Evin à Téhéran où les informations faisant état d’actes de torture et de mauvais traitements sont monnaie courante. Les charges retenues contre elle ont ensuite été modifiées et elle a été accusée d’avoir continué à exercer son activité de journaliste alors que le ministère de la Culture et de l’Orientation islamique lui avait retiré son accréditation en 2006.

Roxana Saberi a finalement été inculpée d’espionnage le 13 avril, à l’issue d’une audience au cours de laquelle elle est revenue sur ses "aveux" précédents. La déclaration de culpabilité et la sentence ont été rendues publiques le 18 avril. Après le procès, son père, Reza Saberi, a indiqué que sa fille avait "avoué" certaines activités au début de sa détention – sans doute pendant les cinq premières semaines au cours desquelles elle ne pouvait pas entrer en contact avec un avocat – parce qu’on lui avait dit qu’elle serait libérée si elle coopérait. Roxana Saberi est revenue sur ces aveux lors du procès. Son avocat a annoncé son intention d’interjeter appel de la reconnaissance de culpabilité et de la sentence. Le responsable de l’appareil judiciaire a écrit au juge de Téhéran pour lui demander de faire en sorte que le plus grand soin soit apporté à la procédure d’appel et que celle-ci se déroule en toute équité et dans les meilleurs délais.

Plusieurs citoyens irano-américains ont été arrêtés en Iran au cours des dernières années depuis que le Congrès américain a annoncé l’attribution de 75 millions de dollars à un fonds de « soutien à la démocratie en Iran ». Il s’agit notamment de Haleh Esfandiari, Kian Tajbakhsh, Parnaz Azima et Ali Shakeri. La plupart ont été accusés d’agissements contre la sécurité nationale, et plus particulièrement de participation à une « révolution douce » en Iran.

Cinq diplomates iraniens arrêtés en Irak en 2007 sont actuellement détenus aux États-Unis. Lors d’une rencontre avec son homologue suisse le 19 avril, le président Ahmadinejad a demandé qu’ils soient libérés. Certains commentateurs ont suggéré que l’arrestation et le jugement de Roxana Saberi pouvaient aussi être dus en partie à des rivalités internes en Iran au sujet de l’élection du président Obama aux États-Unis et de ses récents gestes d’ouverture en direction de l’Iran.

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