« Il est affligeant que les tribunaux aient dû intervenir parce que les responsables politiques ont manqué à leur devoir envers les femmes en Irlande du Nord. » Grainne Teggart
Amnesty International salue la décision rendue lundi 30 novembre par la Haute Cour de Belfast dans le cadre d’une révision judiciaire, qui a conclu que les lois régissant l’avortement en Irlande du Nord en cas de grave malformation du fœtus et de grossesse résultant d’un crime sexuel bafouent l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Le juge Mark Horner de la Haute Cour de Belfast a statué que les droits des femmes étaient bafoués par les lois en vigueur :
« Dans les circonstances, étant donné qu’il est peu probable que les législateurs se saisissent de cette question dans un avenir proche, et qu’il est légitime que les citoyens d’Irlande du Nord voient leurs droits inscrits dans la Convention protégés par les tribunaux, je conclus que les dispositions contestées bafouent les droits garantis par l’article 8 des femmes en Irlande du Nord qui sont enceintes d’un fœtus présentant des malformations mortelles ou dont la grossesse résulte d’un crime sexuel. »
En Irlande du Nord, il est illégal de procéder à un avortement, sauf lorsque la vie ou la santé mentale de la mère est en danger. Toute personne qui pratique un avortement illégal encourt la détention à perpétuité.
La Haute Cour avait été saisie par la Commission nord-irlandaise des droits de l’homme (NIHRC), à laquelle s’est associée Amnesty International ainsi que Sarah Ewart, une Irlandaise. Lors de sa première grossesse, on a annoncé à Sarah Ewart que le fœtus souffrait d’une malformation mortelle, et elle a dû se rendre en Angleterre pour interrompre sa grossesse, les lois nord-irlandaises ne lui permettant pas de recevoir de traitement médical dans la région.
Grainne Teggart, chargée de la campagne Mon corps, mes droits d’Amnesty International, a déclaré :
« La décision rendue aujourd’hui par la Haute Cour est un grand pas en avant vers l’accès à l’avortement pour les femmes et les jeune filles en Irlande du Nord qui ont été violées, ont été victimes d’inceste ou en cas de malformation mortelle du fœtus.
« Les lois sur l’avortement en Irlande du Nord datent du 19e siècle et prévoient les sanctions pénales les plus dures de toute l’Europe.
« La décision de la Cour est une remise en cause de l’incapacité de l’exécutif à accorder la priorité à la santé des femmes. Il est affligeant que les tribunaux aient dû intervenir parce que les responsables politiques ont manqué à leur devoir envers les femmes en Irlande du Nord.
« Les lois nord-irlandaises relatives à l’avortement doivent être alignées sur le 21e siècle et sur le droit international de toute urgence. »
Lors de sa première grossesse, Sarah Ewart était enceinte d’un fœtus souffrant d’une malformation mortelle. Elle a dû se rendre en Angleterre pour interrompre sa grossesse, car les lois nord-irlandaises ne l’autorisaient pas à recevoir de traitement médical dans la région. Elle a déclaré :
« J’espère que la décision rendue aujourd’hui se traduira par le fait que moi-même et les autres femmes dans mon cas, nous n’aurons plus à endurer la souffrance que j’ai subie : j’ai dû me rendre en Angleterre, loin des médecins et de la sage-femme qui me connaissaient, pour obtenir les soins dont j’avais besoin.
« Nos responsables politiques ont manqué à leurs obligations à mon égard, et à l’égard des femmes dans mon cas. Tout d’abord, ils ne m’ont pas laissé d’autre choix que de me rendre en Angleterre pour y recevoir des soins. Ensuite, en refusant de modifier la loi, ils ne m’ont pas laissé d’autre choix que de saisir les tribunaux en mon nom et au nom d’autres femmes.
« Je suis une femme ordinaire qui a souffert d’une tragédie familiale très personnelle, que la loi nord-irlandaise a transformé en véritable cauchemar. »