Communiqué de presse

Kenya : le Parlement doit rejeter les amendements aux lois portant réforme de la police

En tentant de vider d’une bonne partie de leur substance des réformes essentielles de réglementation des forces de police du pays, le gouvernement kenyan permettra que de nouvelles violations des droits humains aient lieu et que des agents de l’État continuent d’agir en toute impunité, a averti Amnesty International mardi 30 juillet.

Des amendements aux lois portant réforme de la police seront probablement débattus par le Parlement au cours de la semaine du 29 juillet au 2 août. Ces lois ont été initialement adoptées pour que les graves atteintes aux droits humains commises par les forces de police kenyanes lors des violences post-électorales de 2007/2008 n’aient plus jamais lieu.

Or, les amendements proposés par l’inspecteur général de la police et avalisés par le ministre de l’Intérieur et de la Coordination nationale affaibliraient gravement les réformes et supprimeraient un grand nombre de garde-fous mis en place pour encadrer la police et appliquer, le cas échéant, des mesures disciplinaires.

« Ces réformes sont fondamentales pour le Kenya. La situation serait catastrophique si elles étaient édulcorées au dernier moment », a déclaré Sarah Jackson, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

« La police se comporte comme si elle était au-dessus des lois depuis des années. Le gouvernement doit honorer les engagements qu’il avait pris dans le sillage des violences post-électorales et mener à bien ces réformes vitales », a ajouté Sarah Jackson.

À la suite du scrutin de 2007, environ 1 300 personnes étaient mortes et quelque 600 000 autres avaient été déplacées.

En réaction à la montée des troubles civils et des violences, la police avait employé une force excessive qui avait fait plusieurs centaines de morts et de blessés parmi les manifestants. Des policiers avaient également été accusés d’avoir violé et agressé des femmes et des filles, en particulier dans les zones contrôlées par l’opposition.

Même si les élections de mars 2013 se sont déroulées de manière globalement pacifique dans la plus grande partie du pays, plusieurs personnes sont mortes et d’autres ont été blessées par la police lors des troubles survenus le 30 mars 2013 dans la ville de Kisumu.

Les lois adoptées en 2011 prévoyaient une réforme complète et une réorganisation structurelle de la police pour remédier aux défaillances qui autorisent et perpétuent l’impunité pour les auteurs de violences policières.

Les propositions de modification de certaines de ces lois, qui vont probablement être examinées à la hâte par le Parlement au cours de la semaine, représenteraient un revers de taille si elles sont adoptées.

« Le gouvernement kenyan fait un pas avant, suivi de deux pas en arrière. Alors que ces réformes annonçaient la mise en œuvre d’un remaniement absolument nécessaire, il est peu probable qu’elles permettent d’atteindre leur objectif principal, la création d’un service de police professionnel et responsable, à l’abri de toute ingérence du gouvernement », a expliqué Sarah Jackson.

Les pouvoirs les plus importants initialement accordés à la Commission nationale des services de police, organe indépendant et composé en grande partie de civils, soit seraient transférés à l’inspecteur général de la police, soit nécessiteraient une consultation de l’inspecteur général et du ministre de l’Intérieur et de la Coordination nationale. Ces pouvoirs, qui incluent les fonctions de recrutement, de contrôle et de sanction des agents de police, risqueraient donc davantage de subir une ingérence politique.

L’indépendance de la fonction elle-même d’inspecteur général est menacée car, aux termes des amendements proposés, la nomination de celui-ci pourrait être faite par le président ou le Parlement, sans procédure ouverte de recrutement.

Amnesty International s’inquiète aussi des modifications concernant les règles d’utilisation des armes à feu. À l’heure actuelle, les policiers ne sont autorisés à en faire usage que pour sauver ou protéger des vies, ou bien en cas de menace imminente pour la vie ou de blessure grave. Or, les nouveaux amendements permettraient leur utilisation pour protéger la propriété, pour arrêter une personne en fuite inculpée d’un crime grave ou bien un complice qui l’aide à s’évader.

Ces conditions supplémentaires vont à l’encontre des normes internationales relatives à l’usage de la force et laisse la porte ouverte aux homicides illégaux.

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