L’Italie doit abandonner ses accords de contrôle des migrations avec la Libye

Les garde-côtes italiens récupèrent des migrants à Lampedusa, mai 2011 © UNHCR/F. NoyEn dépit des informations publiques incontestables mettant en évidence les violations dont sont toujours victimes les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile, l’Italie a conclu le 3 avril 2012, un nouvel accord avec la Libye en vue de contrôler les migrations. Amnesty International n’a cessé de demander aux autorités italiennes de rendre public le contenu de tels accords, en vain. Ce texte a été révélé récemment par la presse.
Le contenu de l’accord de coopération avec la Libye que les autorités italiennes n’avaient pas l’intention de rendre public montre clairement que l’Italie privilégie le contrôle des migrations sur la protection des migrants, demandeurs d’asile et réfugiés.

Amnesty International demande aux autorités italiennes de prendre les mesures immédiates pour : 

  • - suspendre tout accord de contrôle des migrations avec la Libye
  • - rendre public tout accord de contrôle des migrations négocié avec la Libye ou tout autre pays
  • - fournir des informations précises sur la mise en oeuvre de tous les projets de coopération conclus 
  • - s’engager à ne conclure de nouveaux accords avec la Libye que sous réserve du respect et de la protection par ce pays des droits humains des migrants, demandeurs d’asile et réfugiés.

Selon cet accord, la Libye s’engage à renforcer ses frontières de façon à empêcher le départ des migrants de son territoire et l’Italie s’engage à fournir l’entraînement et l’équipement nécessaires pour renforcer la surveillance aux frontières.

Cet accord fait également référence à la construction de nouveaux « centres d’accueil » et au soutien de l’Europe pour réhabiliter les centres existants. Ces centres sont en réalité des centres de détention, en outre pour la plupart hors du contrôle des autorités libyennes.

Rien dans cet accord ne concerne les garanties relatives au respect des droits humains. Ainsi, nulle part dans cet accord n’apparaît un mécanisme permettant de prendre en charge les personnes qui ont un besoin de protection internationale. Les autorités libyennes n’ont toujours pas reconnu le droit de demander l’asile et d’en bénéficier, n’ont pas signé la convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés et, à ce jour, aucun accord n’existe avec le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Depuis 2007, l’Italie a conclu plusieurs accords avec la Libye dont plusieurs concernent pour partie le contrôle des migrations, mais sans référence à la protection des droits humains. L’Italie a également fourni une assistance financière et technique pour la réalisation des activités de contrôle des migrations et a accepté que des personnes tentant de traverser la mer pour rejoindre l’Europe puissent être renvoyées en Libye. Des centaines de personnes ont été interceptées par les patrouilles italiennes et renvoyées en Libye, où nombreuses furent détenues et maltraitées.

Les recherches effectuées par Amnesty International montrent clairement les violations dont sont victimes les réfugiés, demandeurs d’asile et migrants en Libye, pas seulement sous le régime de Kadaffi mais également pendant et après le conflit ayant conduit à son renversement. Ont été répertoriés des cas de détention illimitée dans des conditions extrêmement difficiles, des mauvais traitements et dans certains cas, la torture.

Le 23 février 2012, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la pratique des renvois forcés et refoulements conduits par l’Italie dans l’affaire Hirsi Jamaa et autres contre l’Italie.

Le gouvernement italien s’est publiquement engagé à respecter et mettre en œuvre cette décision. Cependant, quelques semaines après, le 3 avril 2012, l’Italie et la Libye ont décidé de reprendre leur coopération dans le domaine du contrôle des migrations.

Le nouvel accord ainsi signé avec la Libye prévoit la planification d’opérations en mer, dans le cadre d’accords bilatéraux. Pourtant, c’est bien la mise en œuvre de ces accords qui a conduit la Cour européenne à condamner l’Italie.
Le contenu de cet accord confirme ce qu’Amnesty International craignait depuis longtemps : les autorités italiennes ont encore délibérément ignoré que tout accord conclu avec la Libye dans le domaine du contrôle des migrations, dans la situation actuelle du pays, risque d’exposer les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés à des violations graves de leurs droits humains. 

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