Lettre ouverte à Son Excellence Levy Mwanawasa, président de la République de Zambie, en sa qualité de président de la Communauté de développement de l’Afrique australe

Monsieur le Président,

Je vous écris en votre qualité de président de la Communauté de développement de l’Afrique australe pour vous demander de convoquer les chefs d’État et de gouvernement à une réunion d’urgence de la SADC au sujet de la détérioration de la situation des droits humains au Zimbabwe.

Depuis mars 2007, Amnesty International est attentive aux actions entreprises par les États de la SADC pour faire en sorte que les conditions soient remplies pour la tenue d’élections libres et justes au Zimbabwe. Nous nous étions félicités de la réunion d’urgence organisée le 12 avril 2008 à Lusaka pour essayer de résoudre l’impasse politique dans laquelle se trouvait le Zimbabwe après le scrutin du 29 mars. Cependant, les efforts de la SADC pour mettre fin à la crise sont mis à mal par la violence, le harcèlement et les manœuvres d’intimidation cautionnés par l’État dont font actuellement l’objet les personnes soupçonnées d’être affiliées au Mouvement pour le changement démocratique (MDC). Des personnes se font actuellement tuer, torturer et maltraiter tandis que les auteurs de ces agissements bénéficient d’une impunité totale.

Amnesty International a exprimé sa consternation jeudi 19 juin à la découverte des corps, abandonnés ici et là dans le pays, de 12 personnes qui avaient été enlevées. Dans certains cas, les victimes avaient été frappées à mort. Ce type de violations des droits humains semble gagner en intensité au fur et à mesure qu’approche le second tour de l’élection présidentielle, qui doit avoir lieu ce vendredi 27 juin. Les observateurs électoraux africains qui se trouvent actuellement au Zimbabwe ont également été témoins de violences.

Dans la plupart des cas, les instigateurs de ces violences semblent être des soldats déployés dans les zones rurales puis dans les centres urbains pour coordonner la campagne de réélection du président Mugabe. Les soldats, qui œuvrent en étroite collaboration avec les « vétérans » et les sympathisants de la ZANU-PF, intimident et harcèlent les personnes soupçonnées d’avoir « mal » voté au premier tour de l’élection. Des sources fiables au Zimbabwe ont également fait état d’attaques en représailles de la part du MDC.

L’armée et la police du Zimbabwe ne respectent pas l’obligation qu’elles ont aux termes de la Constitution de protéger les droits de tous, y compris le droit à la vie et le droit de ne pas être torturés ni soumis à d’autres formes de mauvais traitements. La police nationale et les Forces de défense du Zimbabwe ont choisi d’agir de manière partisane en laissant se propager les atteintes et violations aux droits humains.

Amnesty International demande par conséquent à la SADC de :

• convoquer les chefs d’État et de gouvernement de la SADC à une réunion d’urgence pour évoquer la détérioration de la situation des droits humains au Zimbabwe

• soutenir le déploiement d’observateurs de l’Union africaine et des Nations unies pour enquêter sur toutes les allégations de violations des droits humains, et d’appuyer la mise en œuvre de leurs recommandations

• exhorter le gouvernement du Zimbabwe à prendre immédiatement des mesures pour que soient respectés pour tous le droit à la vie, le droit de ne pas être torturés ni soumis à d’autres formes de mauvais traitements et le droit à la liberté d’expression et de réunion. Le gouvernement devrait dénoncer publiquement tous les actes de violence perpétrés par des sympathisants de la ZANU-PF, des « vétérans » et des soldats, ou par tout autre parti, et collaborer avec le MDC et la société civile pour mettre fin immédiatement à la violence politique. Il devrait aussi rappeler immédiatement les soldats déployés dans les zones rurales et urbaines qui semblent être à l’origine d’agressions contre les personnes soupçonnées d’avoir voté pour le MDC

• utiliser l’Organe de la Communauté de développement de l’Afrique australe chargé des questions de politique, de défense et de sécurité pour mettre immédiatement en place une instance indépendante et impartiale qui enquête sur les violences à caractère politique. Les résultats de ces enquêtes et les recommandations auxquelles elles donneront lieu devront être rendus publics.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma très haute considération

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit