Libye. Les miliciens doivent libérer les professionnels des médias arrêtés alors qu’ils couvraient les élections

Les deux professionnels des médias de la ville de Misratah, arrêtés par des miliciens à Beni Walid alors qu’ils couvraient les élections nationales historiques en Libye, le 7 juillet, doivent être libérés immédiatement et sans condition, a déclaré Amnesty International mercredi 11 juillet.

Le reporter et caméraman Abdelkader Fusuk et le caméraman Youssef Baadi couvraient les élections dans les villes de Mizda et Nesma, à quelque 160 kilomètres au sud de Tripoli, pour la chaîne de radio et de télévision Tobakets, basée à Misratah. Ils auraient été arrêtés par des miliciens à Beni Walid alors qu’ils rentraient à Misratah.

Ils auraient été placés en détention dans un centre non officiel à Beni Walid.

Dans une vidéo diffusée après leur capture, on entend un homme non identifié les accuser d’être entrés dans une zone militaire, à bord d’un véhicule militaire, sans autorisation.

Pourtant, selon les informations dont dispose Amnesty International, ils circulaient tous deux à bord d’un pick-up appartenant à la chaîne Tobakets et avaient sur eux leur carte de presse et leur accréditation.

Selon des informations parues dans les médias, leurs ravisseurs ont exigé comme condition à leur remise en liberté que des prisonniers originaires de Beni Walid incarcérés à Misratah soient relâchés.

« Garantir la liberté d’expression était un objectif clé de la " Révolution du 17 février ". Il est inconcevable que deux professionnels des médias soient détenus uniquement pour avoir fait leur travail et être entrés dans une ville sans autorisation, a estimé Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

« Si les milices de Beni Walid s’inquiétaient de leur comportement, elles auraient dû les remettre aux autorités, au lieu de faire la loi elles-mêmes. Elles ne doivent certainement pas les utiliser comme des pions pour résoudre leurs tensions régionales avec Misratah. »

Le père de Youssef Baadi a confié à Amnesty International que son fils avait appelé à la maison, indiquant qu’il était bien traité, mais qu’on ne lui avait pas encore expliqué les motifs précis de son placement en détention.

Le 10 juillet, le vice-Premier ministre, Mostafa Abou Shakour, a condamné la détention d’Abdelkader Fusuk et de Youssef Baadi, demandant leur libération immédiate tout en insistant sur le fait que seul le gouvernement était en charge de l’application des lois.

Cette déclaration a fait suite au tollé suscité par l’événement. En outre, des milices de Misratah avaient menacé de prendre les armes pour libérer les deux hommes.

Selon certaines informations, les forces armées de Misratah se préparent à l’assaut, si les deux hommes ne sont pas libérés à la date limite fixée, à savoir le 12 juillet.

« Si le maintien en détention d’Abdelkader Fusuk et de Youssef Baadi est inacceptable, se lancer à l’assaut de la ville de Beni Walid n’est pas la solution. Cela ne fera qu’aggraver la situation et engendrer de nouvelles atteintes aux droits humains. Un assaut de ce type mettrait en péril la population locale et sèmerait les germes de futures tensions régionales », a mis en garde Hassiba Hadj Sahraoui.

Le 5 juillet, Amnesty International a publié un rapport sur la Libye, intitulé Libya : Rule of law or rule of militias ?, qui condamne les atteintes aux droits humains généralisées imputables aux milices armées, notamment les arrestations arbitraires et les actes de torture, et appelle les autorités qui sortiront des urnes à placer au premier rang de leurs priorités le rétablissement de l’état de droit et le respect des droits fondamentaux.

Comptant parmi les derniers bastions pro-Kadhafi durant le soulèvement de 2011, la ville de Beni Walid est tombée aux mains des forces du Conseil national de transition (CNT) le 17 octobre 2011.

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