Malaisie. La loi relative à la sécurité intérieure est utilisée pour punir les défenseurs des droits humains

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

De nouvelles informations obtenus par les chercheurs d’Amnesty International sur l’arrestation arbitraire de cinq Malaisiens critiques à l’égard du gouvernement montrent à quel point il est important que le Parlement abolisse immédiatement la Loi relative à la sécurité intérieure.

Une récente mission de recherche de l’organisation sur la situation des droits humains en Malaisie a en effet permis d’établir que cinq membres de la Force d’action pour les droits des hindous (HINDRAF), groupe de défense des droits des Sud-asiatiques de Malaisie, avaient été arrêtés uniquement pour avoir exprimé leur préoccupation au sujet de la marginalisation au sein de la société malaisienne des personnes d’origine sud-asiatique, et plus spécifiquement pour avoir organisé des manifestations à ce sujet.

« Ces arrestations montrent exactement ce qui ne va pas avec la Loi relative à la sécurité intérieure, a déclaré Donna Guest, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Ces hommes sont traités comme des délinquants, alors qu’ils n’ont jamais été inculpés et encore moins condamnés pour quelque infraction que ce soit. Ils doivent être immédiatement libérés. »

Le gouvernement a accusé ces hommes d’être les « dirigeants et les conseillers juridiques d’une organisation qui met en péril la sécurité de la Malaisie en tenant des réunions illégales, en envoyant des notes et en organisant des forums qui incitent les Indiens à des sentiments et une haine racistes envers le gouvernement ».

L’HINDRAF avait organisé une série de réunions et de rassemblements qui avaient culminé le 25 novembre 2007 avec une manifestation rassemblant 20 000 personnes à Kuala-Lumpur. Les cinq hommes, Ganabathirau Veraman, Kenghadharan Ramasamy, Manoharan Malayalam, Uthayakumar Ponnusamy et Vasantha Kumar Krishnan, sont actuellement détenus au Centre de détention de Kamunting, dans l’État de Perak.

« Si les partis d’opposition malaisiens veulent vraiment mener une réforme politique, ils doivent engager le processus d’abolition de cette loi draconienne, a déclaré Donna Guest. Cela fait trop longtemps qu’elle est utilisée pour éliminer toute critique légitime du gouvernement. »

Complément d’information

En 2007, le gouvernement a démoli plusieurs temples hindous au profit de projets immobiliers, sans tenir compte des pétitions signées par la population hindoue concernée. L’HINDRAF a organisé une série de réunions et de rassemblements qui ont culminé avec une manifestation rassemblant 20 000 personnes à Kuala-Lumpur, le 25 novembre 2007.

En octobre 2007, les autorités locales ont détruit un temple hindou datant de quatre-vingts ans à Taman Karuppiah dans la ville de Shah Alam, la veille de la fête hindoue de Deepavali. La police a tiré sur des fidèles qui s’opposaient à la démolition, elle a blessé plusieurs d’entre eux et a procédé à 14 arrestations. Lorsque les avocats Ganabathirau Veraman, Manoharan Malayalam et Uthayakumar Ponnusamy, ainsi que le dirigeant de l’HINDRAF, Waytha Moorthy, se sont rendus au poste de police pour obtenir la libération sous caution des 14 personnes appréhendées, la police les a également arrêtés. Ils ont été libérés le lendemain.

Deux jours avant une manifestation qui devait avoir lieu au temple hindou de Batu Caves, Uthayakumar Ponnusamy, Ganabathirau Veraman et Waytha Moorthy ont été arrêtés et placés en détention pour sédition. Ils ont été remis en liberté par la suite. Lorsque les fidèles hindous se sont rassemblés dans le temple, le 25 novembre à l’aube, la police les a dispersés en utilisant un liquide chimique et du gaz lacrymogène. Les policiers ont procédé à l’arrestation de plusieurs fidèles, dont la plupart ont été libérés par la suite.

Le 11 décembre, Uthayakumar Ponnusamy a été arrêté pour sédition et condamné à payer une amende de 50 000 ringgits (environ 10 000 euros), alors que le montant maximum pour une libération sous caution pour sédition s’élève à 5 000 ringgits (environ 1 000 euros). Il a déposé une caution mais a été de nouveau arrêté, puis libéré le lendemain. Le 13 décembre, la police a arrêté Ganabathirau Veraman, Kenghadharan Ramasamy, Manoharan Malayalam, Uthayakumar Ponnusamy et Vasantha Kumar Krishnan. Waytha Moorthy, qui était au Royaume-Uni au moment de ces arrestations, a demandé l’asile dans ce pays.

Les avocats des membres de l’HINDRAF détenus ont introduit une requête en habeas corpus (procédure permettant la comparution immédiate d’un détenu devant une autorité judiciaire, afin de contester la légalité de la détention, et de permettre ainsi une éventuelle remise en liberté), qui a été rejetée par la Cour fédérale le 15 mai 2008. Se fondant sur d’autres éléments, ils ont réintroduit une demande le 4 août, au sujet de laquelle la haute cour d’Ipoh doit se prononcer le 8 septembre.

Au moins 65 personnes sont incarcérées au centre de détention de Kamunting en application des dispositions de la loi sur la sécurité intérieure concernant la détention administrative. La Loi relative à la sécurité intérieure autorise la police à arrêter les personnes qu’elle soupçonne d’avoir agi, ou d’être « sur le point d’agir » ou « susceptibles d’agir », d’une manière mettant en péril la sécurité, les « services essentiels » ou la « vie économique » de la Malaisie (article 73-1 b).

Les personnes arrêtées peuvent être détenues jusqu’à soixante jours aux fins de l’enquête policière, à la suite de quoi la Loi relative à la sécurité intérieure autorise le ministre de l’Intérieur à émettre une ordonnance de placement en détention pour une durée de deux ans. Ces deux ans de détention peuvent être renouvelés indéfiniment sans que les détenus soient inculpés ni jugés. Sous sa forme actuelle, la Loi relative à la sécurité intérieure est contraire aux principes fondamentaux du droit international, qui garantit le droit à la liberté, le droit de ne pas être soumis à une arrestation arbitraire, le droit à la présomption d’innocence et le droit à un procès juste devant un tribunal.

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