Barack Obama, le président américain, doit exhorter Mohammed VI, le roi du Maroc, à abroger des lois au titre desquelles des femmes et des jeunes filles peuvent être obligées à épouser leur violeur, et les adolescents s’embrassant dans un lieu public encourent une peine de prison, a déclaré Amnesty International avant la rencontre des deux chefs d’État vendredi 22 novembre.
Plusieurs adolescentes victimes de violences sexuelles ont mis fin à leurs jours ces derniers mois.
Les pressions de l’opinion publique en faveur de la protection des victimes de violences sexuelles ont culminé en mars 2012, lorsque Amina Filali, une jeune Marocaine de 16 ans, s’est suicidée en avalant de la mort-aux-rats après avoir été forcée à se marier avec un homme qui l’avait selon elle violée.
« Il est effrayant que cet état d’esprit soit entériné par la loi. Le Code pénal permet aux violeurs d’échapper aux poursuites en épousant leur victime. La législation introduit une discrimination à l’égard des femmes et des jeunes filles, et ne prévoit guère de protection lorsqu’elles subissent des violences sexuelles », a déploré Philip Luther, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International.
Tandis que le président Obama et le roi Mohammed VI se rencontreront à Washington, trois adolescents comparaîtront au Maroc pour s’être embrassés et avoir publié des photos sur Facebook. Deux garçons de 15 ans et une fille de 14 ans ont été inculpés d’« outrage public à la pudeur » ; un des garçons a en outre été accusé d’« attentat à la pudeur » sur mineure pour un baiser. Il encourt une peine comprise entre deux et cinq ans de prison, ainsi qu’une amende.
« La visite du roi aux États-Unis donne au président Obama l’occasion de se joindre à tous les Marocains qui réclament que ces questions pressantes soient résolues », a indiqué Philip Luther.
« Malgré les promesses du pouvoir concernant la réforme du Code pénal, les autorités marocaines n’ont rien fait ces deux dernières années pour protéger les femmes et les filles de la violence, ni pour garantir la liberté d’expression. »
Plus tôt ce mois-ci, le gouvernement marocain a finalement soumis un projet de loi sur la protection des femmes contre la violence au Parlement – près d’un an après qu’un groupe parlementaire l’ait proposé.
« Les retards enregistrés dans le cadre de la réforme juridique au Maroc laissent les femmes et les jeunes filles à la merci des abus. D’autres vies seront mises en danger à moins que l’on ne réduise l’écart entre le discours des autorités sur les améliorations à apporter à la loi et la mise en œuvre de ces changements », a précisé Philip Luther.
Deux ans après l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution marocaine, dont la qualité a été saluée, les atteintes aux droits humains restent une réalité quotidienne. Des lois et pratiques laissant à désirer continuent à priver Marocains et Sahraouis – les habitants du Sahara occidental, un territoire annexé par le Maroc en 1975 – de procès équitables et de la liberté d’expression, de réunion et d’association, entre autres droits fondamentaux.