Migration : la Belgique doit choisir le multilatéralisme plutôt que le repli

Après deux ans de négociations, le Pacte mondial pour les migrations doit être adopté les 10 et 11 décembre prochains à Marrakech sous l’égide des Nations Unies.

Ce pacte est le premier texte international d’une telle envergure qui se penche sur les mouvements migratoires dans toutes leurs dimensions. L’objectif final est d’arriver à l’élaboration d’un cadre commun pour l’ensemble des acteurs concernés par les migrations : pays de départ, de transit, d’arrivée et bien évidemment les personnes migrantes.

Depuis deux ans, la Belgique joue son rôle et participe de façon constructive à l’élaboration de ce Pacte mondial. Elle consulte les différents départements concernés, la société civile, ses partenaires européens et internationaux. Elle joue, à juste titre, la carte de la diplomatie, du compromis et du multilatéralisme. Car que ce soit sur les dossiers du climat, de la paix ou des migrations, il est évident que le cadre national est trop étroit. Il faut une vision globale, multi-acteurs et à long terme. C’est cette approche qui a prévalu pour l’élaboration de ce texte, initié par l’ancien Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon.

Dix principes et vingt-trois objectifs

En juillet 2018, le texte a été finalisé. Le résultat est un accord non contraignant qui repose sur dix principes et vingt-trois objectifs. Parmi ces principes, on retrouve formulée l’importance d’une approche centrée sur le droit international et, en particulier, les différentes générations de droits humains. On réaffirme aussi le respect de la souveraineté des Etats. Il s’agit d’un texte nuancé. Il décline une série d’actions à mener pour garantir le respect des droits fondamentaux, mais recommande aussi de mettre en place les conditions d’un modèle positif pour toutes et tous : favoriser la mobilité par le travail, faciliter les transferts financiers des migrants vers leur communauté d’origine, valoriser les compétences professionnelles, etc. C’est pourquoi notre Premier ministre avait raison de souligner en septembre que « ce texte est une avancée dans la bonne direction, qui clarifie les différents concepts et qui peut être un levier pour demain, une gestion plus organisée et maîtrisée de la mobilité internationale ».

Ne pas rejoindre le club du repli

Comment expliquer, dès lors, qu’après avoir annoncé officiellement son adhésion, le 27 septembre à l’Assemblée générale de l’ONU, notre gouvernement puisse désormais envisager de faire volte-face ? Comment imaginer, aujourd’hui, que sous un prétexte non fondé, à savoir des doutes sur le caractère contraignant du document et les risques de perte de souveraineté qu’il entraînerait, notre pays n’adopte pas un document qu’il a largement eu l’occasion d’amender au fil des négociations ? La Belgique se placerait ainsi du côté de pays tels que les Etats-Unis, l’Autriche et la Hongrie. En rejoignant ainsi le club du repli, elle tournerait le dos au groupe réunissant la quasi-totalité des Etats dans le monde, décidés à adopter le premier accord international sur l’un des enjeux majeurs du XXIe siècle.

Il n’y a plus lieu de tergiverser. Avec ce Pacte, c’est bien le débat entre les sociétés ouvertes et fermées qui se pose.

D’un côté, la proposition de mettre en place des conditions de long terme, basées sur la coopération internationale et le respect des droits humains, pour qu’à terme chaque être humain puisse vivre dignement et contribuer à la prospérité collective, dans son pays d’origine ou en se déplaçant. De l’autre, celle du repli sur soi, qui passe par le refus de l’autre, mais aussi par celui de la coopération entre Etats.

Le Pacte mondial sur les migrations est un symbole qui peut permettre à l’Europe et au reste du monde de sortir par le haut de la crise de l’accueil dans laquelle nous nous sommes enfermés. C’est exactement la raison pour laquelle certains tentent aujourd’hui de l’arrêter. C’est aussi la raison pour laquelle notre pays n’a pas d’autre choix que d’y adhérer. Sans réserve.

Signataires : Philippe Hensmans, Directeur d’Amnesty International ; Frédéric Rottier, Directeur du Centre Avec ; Sotieta Ngo, Directrice du CIRÉ ; Arnaud Zacharie, Secrétaire général du CNCD-11.11.11 ; Marc Becker et Anne Léonard, Secrétaires nationaux de la CSC ; Thierry Bodson, Secrétaire général de la FGTB wallonne ; Estelle Ceulemans, Secrétaire générale de la FGTB Bruxelles ; Baudouin Van Overstraeten, directeur de JRS Belgique ; Olivia Venet, Présidente de la Ligue des droits de l’Homme ; Pierre Verbeeren, Directeur de Médecins du Monde ; Christian Kunsch, Président du Mouvement ouvrier chrétien ; Adriana Costa Santos et Mehdi Kassou, Co-présidents de la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés ; Antoinette Maia, Coordinatrice de Solidarité mondiale ; Prof. François Gemenne, Université de Liège ; Prof. Sabine Henry, Université de Namur ; Eva Smets, Directrice générale d’Oxfam Solidarité ; Pierre Santacatterina, Directeur général Oxfam Magasins du Monde, Olivier Valentin, Secrétaire national de la CGSLB.

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