Communiqué de presse

Myanmar. Un suivi indépendant de la situation des droits humains reste nécessaire

Alors que Thein Sein, le président du Myanmar, termine sa visite en Europe, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies s’apprête à débattre de la situation des droits humains au Myanmar et de la nécessité de prolonger le suivi international des droits fondamentaux dans le pays. Étant donné les problèmes qui subsistent au Myanmar dans ce domaine, il est essentiel que des mécanismes internationaux de suivi restent en place.

Depuis 2008, le Myanmar a permis au Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits humains au Myanmar d’effectuer des visites périodiques dans le pays. Le mandat du Rapporteur spécial a été créé en 1992 et a été prolongé chaque année depuis. Le 11 mars, le Conseil des droits de l’homme doit débattre, entre autres, du renouvellement de ce mandat. S’il n’est pas renouvelé, la fonction cessera d’exister.

Malgré certaines évolutions positives au cours des deux dernières années, la situation des droits humains au Myanmar reste préoccupante, comme en témoigne le récent rapport du Rapporteur spécial, qui a visité le pays en février 2013 . Dans des situations comme celle qui prévaut encore au Myanmar en matière de droits humains, les mécanismes de suivi internationaux indépendants et objectifs jouent un rôle crucial (et souvent unique) dans la promotion et la protection des droits fondamentaux, parallèlement aux organismes nationaux travaillant dans le même domaine.

Des sources crédibles continuent de faire état d’atteintes au droit international relatif aux droits humains et au droit humanitaire dans le nord du Myanmar. En dépit de la reprise des pourparlers de paix début 2013 entre le gouvernement du Myanmar et l’Organisation pour l’indépendance kachin (KIO), un conflit armé persiste dans le nord de l’État de Kachin. Plus de 75 000 civils de l’ethnie kachin sont toujours déplacés par le conflit et beaucoup ont des difficultés à bénéficier de l’aide des organisations humanitaires.

Amnesty International est également préoccupée par la situation des droits humains dans l’État d’Arakan depuis que des violences ont éclaté entre les communautés bouddhiste et musulmane, en juin 2012. Le calme n’est pas encore revenu et de nombreux morts et blessés sont à déplorer des deux côtés. Des informations fiables indiquent que, dans certains cas, les forces de sécurité n’ont pas rempli leur mission de protection, malgré la nécessité de protéger les deux communautés. Les forces gouvernementales ont effectué des rafles massives, ciblant en grande partie les Rohingyas et les autres communautés musulmanes. Des centaines de personnes sont toujours en détention dans l’État d’Arakan. Plus de 120 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays vivent actuellement dans des abris temporaires avec un accès limité à la nourriture, aux soins médicaux, aux installations sanitaires et à d’autres types de ressources.

Bien que les amnisties gouvernementales aient abouti depuis mai 2011 à la libération de milliers de prisonniers, dont des prisonniers d’opinion, de nombreuses personnes sont toujours détenues arbitrairement au Myanmar. Parmi elles se trouvent des individus qu’Amnesty International considère comme des prisonniers d’opinion, détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits, en particulier à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Beaucoup d’autres personnes ont été faussement accusées ou déclarées coupables d’infractions graves à l’issue de procès inéquitables. Certaines condamnations reposaient sur des « aveux » obtenus sous la torture. Parmi les personnes emprisonnées arbitrairement, on compte des agriculteurs et des villageois de zones où résident des minorités ethniques, comme les États de Chan et de Kachin.

Enfin, malgré de récents changements législatifs assouplissant en apparence les restrictions à la liberté des médias et à la liberté de réunion, des lois existantes ou nouvelles continuent de restreindre la liberté d’expression. L’an dernier, le gouvernement a arrêté et inculpé de nombreux manifestants pacifiques en vertu des lois de 2011 sur les réunions et les manifestations pacifiques.

En outre, des sources crédibles font état de recours inutiles et excessifs à la force par des membres des forces de sécurité à l’égard de manifestants pacifiques. De nombreuses lois du pays ne respectent pas le droit international relatif aux droits humains. Le gouvernement les a utilisées pour étouffer la libre expression, ainsi que les libertés de réunion et d’association.

Ces lois portent notamment sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, sur les associations illégales, sur l’enregistrement des imprimeurs et des éditeurs, sur les transactions électroniques, sur la protection de l’État, sur les dispositions d’urgence et sur la formation des organisations. On trouve également dans le code pénal des articles non conformes au droit international relatif aux droits humains.

Amnesty International recommande au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, à ses États membres et aux États observateurs :

  • de veiller à ce que le mandat du Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits humains au Myanmar soit renouvelé ;
  • de traiter les problèmes de droits humains qui subsistent au Myanmar dans la résolution du Conseil des droits de l’homme sur ce pays ;
  • de demander au gouvernement du Myanmar de garantir un suivi continu et international de la situation des droits humains, afin de promouvoir et protéger ces droits, en parallèle avec les mécanismes nationaux connexes ;
  • d’exhorter le gouvernement du Myanmar à respecter et à protéger les droits humains, ainsi qu’à remplir ses obligations en la matière.
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