Ouganda. Le gouvernement laisse les victimes du conflit livrées à elles-mêmes

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants continuent de vivre dans une extrême pauvreté et de souffrir des séquelles physiques et mentales des violences qu’ils ont subies lors du conflit qui a déchiré le nord de l’Ouganda pendant vingt ans, parce que le gouvernement n’a pas mis en place de programme général de réparation, a déclaré Amnesty International ce lundi 17 novembre 2008.

L’organisation a rendu public un rapport qui décrit les souffrances que continuent d’endurer les victimes du conflit brutal qui a ravagé le nord du pays ; il contient plusieurs recommandations concernant la prise en charge par le gouvernement des conséquences des violations des droits humains commises à ce moment-là.

Pendant le conflit, des milliers de personnes ont été tuées, enlevées, violées ou frappées par les membres de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA). Les forces gouvernementales se sont également rendues coupables de violations des droits humains telles que des homicides illégaux, des violences sexuelles et des actes de torture. Les soldats ayant commis des violations des droits humains contre des civils ont bénéficié d’une impunité générale, et le conflit a chassé environ 1,8 million de personnes de chez elles.

Des milliers d’Ougandais sont encore marqués physiquement et mentalement par les violences dont ils ont été victimes, a déclaré Godfrey Odongo, spécialiste de l’Ouganda à Amnesty International. Ils ne sont pas en mesure de prendre leur vie en main et ont désespérément besoin que le gouvernement les aide à surmonter les atrocités auxquelles ils ont été confrontés et à reconstruire leur vie. Malheureusement, cette aide ne leur a jamais été fournie.

En septembre 2007, le gouvernement ougandais a lancé un plan en trois ans pour la paix, la reprise et le développement (PRDP), mais ce programme ne porte pas sur la question des réparations pour les victimes du conflit.

L’accord signé entre le gouvernement et la LRA dans le cadre du processus de paix tente de dresser les grandes lignes en matière de réparation mais cette tentative est loin de constituer un programme global et comporte plusieurs lacunes flagrantes comme l’absence de disposition pour la consultation des victimes. Il n’est pas précisé, non plus, si et quand le gouvernement va mettre en œuvre ces ententes.

Ce qu’il faut c’est un programme de réparation centré sur les victimes, qui prenne en compte les souffrances qui affectent encore ceux qui ont subi des violations des droits humains pendant le conflit , a déclaré Godfrey Odongo.

Les personnes qui ont survécu ont besoin d’une surveillance médicale, de conseils et d’un soutien psychologique. Les enfants qui ont été victimes d’enlèvements ont besoin de pouvoir aller à l’école. Les familles doivent être indemnisées pour les décès et les blessures qui les ont affectées ; elles ont besoin de récupérer leurs terres et leurs biens ; il faut qu’il y ait des excuses pour les violations commises et de nouvelles inhumations pour les êtres chers qui sont morts. Le gouvernement doit commencer dès maintenant à répondre à tous ces besoins , a conclu Godfrey Odongo.

Dans son rapport, Amnesty International décrit le sort des personnes suivantes :

• les femmes et les jeunes filles qui ont été victimes de violences sexuelles. Une jeune fille de dix-huit ans originaire du district de Pader et enlevée par les forces de la LRA a dit à Amnesty International : Je fais des cauchemars à propos de mon mariage forcé, des personnes que j’ai dû tuer et de celles que j’ai vu mourir quand j’étais avec la LRA. A cause de ce que j’ai vécu, je me mets parfois à hurler sans pouvoir me retenir  ;

• les jeunes hommes et les garçons que l’on a forcés à devenir soldats. Un garçon de vingt ans originaire du district d’Amuru a arrêté les études ; il n’arrivait pas à se concentrer en cours à cause du souvenir lancinant des choses horribles qu’il a été amené à faire, comme de frapper son père sous la contrainte ou de tuer des personnes qui avaient été enlevées. Quand je pense à cela je n’arrive pas à me sentir normal  ;

• les personnes qui ne parviennent pas à reprendre pied par manque d’argent et de soins médicaux. Une jeune femme de vingt-six ans, originaire du district de Pader et retournée parmi les siens après avoir été maintenue captive pendant dix ans par la LRA, a tenu les propos suivants à Amnesty International : J’ai toujours un éclat d’obus dans la jambe droite. Je souffre terriblement depuis trois ans [...] Je ne sais pas comment me faire soigner. Je ne suis pas sûre d’avoir assez d’argent pour cela. La seule chose que je fais pour l’instant est de nettoyer la plaie de temps en temps .

Complément d’information

Le conflit dans le nord de l’Ouganda entre les forces gouvernementales et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) a éclaté en 1986. Les affrontements ont connu une accalmie depuis le lancement du processus de paix en 2006.

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