Issa Amro, coordinateur de Youth Against Settlements (La jeunesse contre les colonies), un groupe pacifique qui rend compte des violations des droits humains et organise des manifestations contre la politique israélienne à Hébron, a été arrêté le 4 septembre pour avoir posté des commentaires sur Facebook critiquant les autorités palestiniennes. À l’issue de l’audience qui s’est tenue à huis clos le 7 septembre, le tribunal de district d’Hébron a prolongé sa garde à vue de quatre jours et l’a inculpé de trouble à l’ordre public au titre de la Loi sur la cybercriminalité récemment adoptée, ainsi que d’avoir « causé des dissensions » et d’« outrage aux autorités supérieures » au titre du Code pénal jordanien de 1960, toujours en vigueur en Cisjordanie.
« La décision d’inculper Issa Amro et de prolonger sa détention est une mesure inquiétante, qui démontre jusqu’où les autorités palestiniennes sont prêtes à aller pour faire taire les détracteurs pacifiques, a déclaré Magdalena Mughrabi, directrice adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.
« Le fait qu’elles fassent preuve d’une telle rapidité pour se servir de la loi sur la cybercriminalité récemment adoptée afin d’écraser la dissidence est très préoccupant. Cette loi bafoue de manière flagrante le droit international et viole le droit des citoyens à la vie privée. Elle doit être abrogée sur-le-champ – au lieu de servir à envoyer des détracteurs pacifiques derrière les barreaux. »
Dans une lettre répondant aux préoccupations d’Amnesty International au sujet de cette loi, le procureur général palestinien Ahmad Barak a fait valoir qu’elle ne servirait pas à restreindre la liberté d’expression, ni à sanctionner les critiques visant « le gouvernement, le président, des représentants de l’État ou des partis politiques palestiniens ».
Les autorités palestiniennes ont intensifié leur répression contre la liberté d’expression ces derniers mois en arrêtant des journalistes, en fermant des sites Web de l’opposition et en adoptant la Loi sur la cybercriminalité. Amnesty International a analysé cette loi qui impose des restrictions sévères à la liberté des médias et interdit la dissidence en ligne. Elle demande son abrogation.
Le responsable du bureau des districts du sud au sein de la Commission indépendante des droits humains Farid al Atrash, présent à l’audience du 7 septembre, a déclaré à Amnesty International : « C’est un jour sombre pour l’histoire de la justice palestinienne, le tribunal aurait dû protéger le droit d’Issa à la liberté d’expression. »
Par ailleurs, Issa Amro comparaît actuellement devant un tribunal militaire israélien pour son rôle dans l’organisation des manifestations contre les politiques discriminatoires et les colonies israéliennes à Hébron, en Cisjordanie occupée – ce qui bafoue le droit international. Amnesty International estime que les charges pesant sur Issa Amro sont infondées et découlent uniquement de ses activités militantes pacifiques.
« Le fait que les autorités israéliennes et palestiniennes harcèlent Issa Amro en raison de son militantisme pacifique illustre le rétrécissement de l’espace dédié à la liberté d’expression des défenseurs des droits humains – ils se retrouvent attaqués des deux côtés », a déclaré Magdalena Mughrabi.
Selon Farid al Atrash, Issa Amro est détenu dans une cellule minuscule, dans de très mauvaises conditions. Il a entamé une grève de la faim peu après son arrestation et refuse d’être examiné par un médecin. Lors de son audience devant le tribunal de district d’Hébron, il a déclaré au juge qu’il avait été frappé à l’épaule, insulté et soumis à des menaces de mort durant son interrogatoire.