L’enquête sur les tortures policières présentée cette semaine au Sénat des Philippines est l’occasion à ne pas manquer pour mettre fin à la torture dont se rendent responsables des agents de la police nationale et mettre fin à la culture de l’impunité qui la favorise, a déclaré Amnesty International.
L’audience conjointe de la Commission sénatoriale pour la justice et les droits humains et de la Commission pour l’ordre public, qui se déroulera mercredi 14 janvier, a été annoncée comme étant la conséquence directe du rapport publié en décembre 2014 par Amnesty International sous le titre
« Cette audience pourrait être une première étape en vue de s’attaquer à la torture endémique que nous observons aux Philippines. Personne ou presque en détention policière n’est à l’abri de cette pratique abjecte et les policiers demeurent impunis », a déclaré Richard Bennett, directeur du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International, qui témoignera lors de l’audience.
« Nous nous réjouissons que le gouvernement prenne cette question au sérieux. L’audience du Sénat doit être suivie d’une action concrète et ferme. Les Philippines ont l’occasion de se positionner comme leader dans la région en termes de droits humains et de marquer le début de la fin de la torture. »
Selon le rapport d’Amnesty International, bien que les Philippines ont ratifié deux traités internationaux majeurs de lutte contre la torture et promulgué une loi nationale qui l’érige en infraction, la pratique demeure monnaie courante dans les centres de détention de la police à travers le pays. Parallèlement, la culture de l’impunité permet que les responsables de ces agissements soient rarement, voire jamais, amenés à rendre des comptes. Plus de cinq ans après l’adoption de la Loi contre la torture, texte historique, aucune condamnation n’a été prononcée au titre de cette loi.
« Il ne faut pas se tromper, mettre en place une police professionnelle et fiable, qui ait la confiance de la population, est un véritable défi. Il n’existe pas de solution miracle. Il faut à la fois des lois applicables et appliquées, un cap, des ressources adéquates et une professionnalisation – une approche partielle ne fonctionnera pas, tout simplement », a déclaré Richard Bennett.
« Au cœur de la réforme, pour ne pas voir la torture perdurer, il faut imposer l’obligation de rendre des comptes. Le Sénat des Philippines peut et doit passer en revue les organes qui en sont actuellement chargés s’agissant des violence policières et des violations des droits humains, en vue de mettre en place deux systèmes indépendants : un organisme de surveillance des lieux de détention et une institution unifiée et efficace chargée d’enquêter sur les violences policières et d’engager des poursuites le cas échéant. »
L’audience du Sénat se déroule la veille de la toute première visite du pape François aux Philippines. Le pape critique fermement la torture, qualifiant cette pratique de « péché très grave ».
« Le peuple des Philippines est, on le comprend aisément, très enthousiaste à l’approche de la visite du pape. Le meilleur moyen pour le gouvernement d’honorer cette visite serait de prendre des mesures concrètes afin d’éradiquer la torture, fléau que le pape François lui-même a dénoncé à maintes reprises », a déclaré Richard Bennett.