Philippines. Il faut enquêter sur les allégations d’atteintes aux droits humains et protéger les frères Manalo

Déclaration publique

ASA 35/004/2007 (Public)

Le 8 novembre 2007, Raymond et Reynaldo Manalo, deux fermiers soupçonnés d’être des sympathisants d’une insurrection locale et incarcérés pendant dix-huit mois, témoigneront lors de leur audience devant la Cour suprême du fait qu’ils ont été maintenus en détention illégale et soumis à des actes de torture et à des traitements inhumains et dégradants.

Amnesty International demande aux autorités philippines d’enquêter sur leurs allégations d’enlèvement, de mauvais traitements et de torture aux mains des forces armées. L’organisation redoute toutefois qu’aucune poursuite ne soit engagée, comme ce fut le cas à plusieurs reprises lorsque des accusations d’atteintes aux droits humains ont été portées contre les forces armées. Manifestement, les preuves manquaient et les témoins avaient peur de faire une déclaration sous la foi du serment.

Le 14 février 2006, Raymond et Reynaldo Manalo ont été emmenés de force de leur résidence par des hommes armés non identifiés. Puis, pendant dix-huit mois, ils ont été transférés dans divers camps de détention militaire et torturés. Le 13 août 2007, ils se sont échappés. Au cours de leur détention, ils ont reconnu un officier militaire de haut rang, qui est impliqué dans de nombreuses disparitions forcées mais n’a jamais été poursuivi. Selon eux, cet homme était au courant des tortures et autres mauvais traitements qui leur étaient infligés.

Tandis que Raymond et Reynaldo étaient maintenus en détention par l’armée, leurs familles ont introduit des requêtes en habeas corpus (procédure permettant la comparution immédiate d’un détenu devant une autorité judiciaire, afin de contester la légalité de la détention, et de permettre ainsi une éventuelle remise en liberté). Les militaires ont réagi en niant toute implication dans leur disparition.

Amnesty International souligne que les frères Manalo prennent le risque d’être harcelés voire arrêtés en se présentant pour faire leur déposition devant la Cour suprême. Après leur évasion, craignant pour leur sécurité et celle de leurs proches, ils ont fait appel à la Cour afin d’être protégés et non au programme de protection des témoins mis en place par l’État – programme dont ils mettent en doute l’efficacité.

Lors de leur audience devant la Cour suprême, ils introduiront une demande d’amparo, principe analogue à celui de l’habeas corpus, qui peut être invoqué en cas de détention arbitraire (par le détenu, ou par son avocat ou sa famille lorsqu’il s’agit d’une personne « disparue »). Un recours en amparo peut être également présenté par quiconque s’estime menacé d’arrestation ou d’expulsion. Les frères Manalo souhaitent ainsi obtenir de la Cour un placement en détention comme mesure de protection, la nomination d’un commissaire indépendant chargé d’examiner leurs allégations et des ordonnances d’inspection et d’accès pour enquête sur les lieux de leur détention.

Amnesty International engage les autorités philippines à répondre à leurs demandes et à garantir leur protection prolongée.

Amnesty International, la commission Melo et le rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Philip Alston, ont tous mis l’accent sur la nécessité de renforcer le programme de protection des témoins et de veiller à ce que des enquêtes impartiales et approfondies soient menées dans les meilleurs délais sur les atteintes aux droits humains.

L’organisation souhaite rappeler au gouvernement des Philippines qu’il a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), qui prohibe la détention arbitraire, la torture, et les sanctions et traitements inhumains ou dégradants. Afin de mettre un terme à l’impunité, il est absolument essentiel d’enquêter sur les affaires de disparitions et d’exécutions extrajudiciaires. En outre, il est primordial d’assurer la protection des témoins, afin que les procureurs puissent obtenir de précieuses informations et engager des poursuites judiciaires contre les responsables présumés.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit