Précisant que « ça ne se passe pas ici, mais [que] ça se passe maintenant », plusieurs professionnel·les de la santé belges étaient menotté·es devant l’ambassade de Pologne afin de dénoncer les graves restrictions auxquelles font face leurs confrères et consoeurs polonais·es. Tenant dans les mains un panneau indiquant leurs noms et leurs fonctions, ces personnes ont ensuite été photographiées une à une pour un « mugshot » symbolique.
« Ces dernières années, des millions de personnes en Pologne ont été privées du droit de disposer de leur corps. Le 15 octobre, le pays élira un nouveau parlement. En cette Journée mondiale pour le droit à l’avortement, notre objectif est de rappeler avec insistance aux responsables politiques et aux électeur·rices que les soins relatifs à l’avortement sont des soins de santé fondamentaux. L’accès à un avortement sûr et légal est un droit humain », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.
La Pologne possède l’une des législations les plus restrictives d’Europe en matière d’avortement. Tout médecin ou autre personne qui aide une personne enceinte à avorter encourt trois ans d’emprisonnement. Ainsi, chaque année, des milliers de
personnes se rendent à l’étranger afin obtenir des soins relatifs à l’avortement dans d’autres pays européens, dont la Belgique.
Complément d’information
Depuis l’arrivée au pouvoir du parti Droit et Justice (PiS) en 2015, le gouvernement polonais a pris de manière répétée diverses mesures pour restreindre les droits et soins de santé sexuels et reproductifs. L’avortement est ainsi presque totalement interdit, n’étant légal que lorsque la santé ou la vie de la personne enceinte est en danger ou lorsque la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste. Cependant, dans les faits, il est pratiquement impossible d’avorter, même pour les personnes qui en ont légalement le droit. Quant aux militant·es qui défendent le droit à l’avortement, ils et elles sont confronté·es à un environnement de plus en plus hostile, qui se traduit par des menaces, des violences et des persécutions.
Dans ce contexte où, par ailleurs, toute aide apportée à une personne enceinte dans le but d’avorter est sanctionnée d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à trois ans, les militant·es et les groupes de défense des droits des femmes pointent la crainte des répercussions par les professionnel·les de santé, même dans des situations où l’avortement est légal, ce qui exacerbe les risques en matière de santé pour les personnes qui souhaitent avorter.
Ainsi, chaque année, des milliers de personnes enceintes sortent des frontières polonaises pour accéder à un un avortement dans d’autres pays européens, notamment en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en République tchèque. D’autres commandent des médicaments abortifs à l’étranger, la possession de tels produits ne constituant pas une infraction au regard du droit polonais.