En réaction à l’adoption du projet de loi sur la nationalité et les frontières, Steve Valdez-Symonds, directeur du programme Droits des réfugiés et des migrants à Amnesty International Royaume-Uni, a déclaré :
« C’est un jour bien sombre pour les réfugié·e·s qui fuient les conflits et les persécutions.
« Malgré une forte opposition, y compris dans les rangs de ses propres député·e·s, le gouvernement britannique a aujourd’hui déchiré la Convention relative au statut des réfugiés – un accord international de longue date – et honteusement renoncé à la responsabilité qui lui incombe vis-à-vis des réfugié·e·s.
« La tentative de la ministre de l’Intérieur de présenter ce projet de loi comme ciblant les gangs criminels impitoyables sert en fait à dissimuler sa véritable intention, à savoir simplement et à tout prix punir, sanctionner et dissuader les gens de demander l’asile.
« La xénophobie qui sous-tend ce projet de loi est évidente : il est aussi dur envers les victimes de la répression, de la torture et de l’exploitation qu’il exploite le racisme et les préjugés auxquels elles sont confrontées.
« Si les mesures relatives à l’asile contenues dans ce projet de loi sont appliquées, les personnes ayant droit à un refuge se retrouveront encore davantage à la merci des passeurs et des agresseurs, tandis que la réputation du Royaume-Uni sera traînée dans la boue. »
Position d’Amnesty concernant le projet de loi sur la nationalité et les frontières et le système d’asile britannique
Le gouvernement prétend briser le modèle économique des groupes de passeurs
Le projet de loi ne comporte pas de dispositions permettant de lutter contre les situations qui placent les demandeurs·euses d’asile à la merci de l’exploitation des gangs de passeurs et autres agresseurs – il les rend encore plus vulnérables.
« Ce projet de loi laissera l’exploitation criminelle prospérer, et lui permettra même de se développer »
En avivant leurs peurs, en les excluant davantage et en les rendant plus étrangers – que ce soit au Royaume-Uni, dans le cadre de voyages secrets au Royaume-Uni ou ailleurs – ce projet de loi laissera l’exploitation criminelle prospérer, et lui permettra même de se développer.
Des voies sûres et légales
Le gouvernement persiste à laisser entendre qu’il fournit des voies sûres et légales en vue de demander l’asile au Royaume-Uni. Ce n’est guère plus qu’une cynique pirouette.
Aux termes de la réglementation britannique relative à l’immigration, les personnes fuyant les pays en conflit ou répressifs doivent obtenir un visa pour se rendre au Royaume-Uni. Or, le pays n’accorde aucun visa permettant d’entreprendre un tel voyage et de demander l’asile.
« Les personnes fuyant les pays en conflit ou répressifs doivent obtenir un visa pour se rendre au Royaume-Uni. Or, le pays n’accorde aucun visa permettant un tel voyage et de demander l’asile »
La politique qui prévaut de longue date, et que confirme ce projet de loi, est qu’une personne ne peut demander l’asile au Royaume-Uni que si et quand elle arrive ici. La quasi-totalité des réfugié·e·s relativement peu nombreux qui y demandent l’asile n’ont donc d’autre choix que d’entreprendre des voyages dangereux, et de s’en remettre à des personnes souvent dangereuses, pour gagner le Royaume-Uni et déposer leur demande.
Cette situation s’applique quel que soit le degré de connexion qu’une personne peut avoir avec le Royaume-Uni, y compris si elle a de la famille proche qui vit ici.
Dispositions pour les ressortissants d’Ukraine, d’Afghanistan et de Hong-Kong
Le gouvernement persiste à attirer l’attention sur les régimes de réglementation relative à l’immigration qui s’appliquent aux ressortissant·e·s ukrainien·ne·s, afghan·e·s et britanniques (d’outre-mer).
Les programmes destinés aux réfugié·e·s ukrainien·e·s et afghan·e·s s’avèrent inefficaces et inaccessibles à la plupart des personnes auxquelles ils sont théoriquement destinés.
Il ne fait guère de doute que la ministre de l’Intérieur n’a jamais fait preuve d’un réel enthousiasme s’agissant de soutenir les réfugié·e·s ukrainien·e·s et afghan·e·s, et demeure hostile dans ses propos et ses actes à l’octroi de l’asile aux personnes fuyant d’autres situations de conflit et de répression.
Le régime pour les ressortissant·e·s britanniques (d’outre-mer) de Hong Kong n’est, en revanche, pas concerné par l’asile. Les règles fixent des critères qui portent uniquement sur la nationalité et la relative richesse financière. Le fait qu’une personne ait subi ou risque de subir des persécutions n’est pas pris en compte. Cela explique pourquoi les statistiques officielles n’incluent pas dans les chiffres relatifs à l’asile les personnes qui arrivent au Royaume-Uni dans le cadre de ce régime.
Protocole d’accord entre le Royaume-Uni et le Rwanda visant à expulser des demandeurs et demandeuses d’asile du Royaume-Uni
Si le gouvernement britannique souhaite réellement encourager et soutenir le Rwanda au sujet de sa population de réfugié·e·s relativement importante et améliorer son bilan en termes de droits humains, il ne devrait pas conclure d’accord en vue de déléguer ses propres responsabilités à ce pays.
Cela adresse un message profondément irresponsable au Rwanda et au monde en général sur la façon dont le Royaume-Uni considère ses responsabilités internationales et ses devoirs en matière de droits humains. Si d’autres pays lui emboîtent le pas, les perspectives déjà faibles pour les réfugié·e·s de trouver un lieu sûr diminueront considérablement.
Les passeurs, trafiquants et autres exploiteurs continueront de prospérer, puisqu’un nombre accru de personnes aura besoin de partir en quête de sécurité et qu’un nombre accru d’entre elles cherchera à éviter les autorités, s’exposant encore davantage au risque d’exploitation.
Des retards dans le système
Les ministres ont souligné que le projet de loi vise à soulager un système d’asile selon eux sous pression, alors que le système britannique continue de recevoir relativement peu de demandes. En vérité, le Royaume-Uni est loin derrière de nombreux voisins européens, tels que la France et l’Allemagne, en termes de volume de demandes d’asile reçues et de personnes se voyant accorder une protection.
En fait, plusieurs dispositions ajouteront une charge de travail importante aux attributions du ministère de l’Intérieur.
« La ministre de l’Intérieur devrait s’attacher à rendre le système d’asile britannique plus accessible : réduire, et non augmenter, les délais et améliorer la qualité de la prise de décisions »
Loin de ces nouvelles lois et règles répressives, la ministre de l’Intérieur devrait s’attacher à rendre le système d’asile britannique plus accessible : réduire, et non augmenter, les délais et améliorer la qualité de la prise de décisions, afin que les réfugié·e·s, jeunes et moins jeunes, reçoivent de ce pays la protection à laquelle ils ont droit.
Droits à la nationalité
La première partie du projet de loi comprend des dispositions importantes relatives à la loi britannique sur la nationalité, qui rétabliront les droits à la citoyenneté de milliers de personnes exclues à tort au moyen de discriminations et d’injustices de longue date. Amnesty International se félicite de ces dispositions. Cependant, cette partie du projet de loi comporte aussi de terribles injustices, notamment le fait de priver du droit à la citoyenneté des personnes nées et grandissant apatrides au Royaume-Uni et d’habiliter le ministre de l’Intérieur à priver secrètement des Britanniques de leur citoyenneté.