Index AI : AFR 62/014/2005
DÉCLARATION PUBLIQUE
Amnesty International s’est jointe ce mercredi 7 septembre à trois autres organisations internationales importantes de développement et de défense des droits humains pour lancer un appel au gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC), aux Nations unies, à l’Union africaine et au gouvernement britannique, pour qu’ils veillent à ce que justice soit rendue dans l’affaire Pascal Kabungulu Kibembi, l’un des plus importants défenseurs des droits humains congolais assassiné le 31 juillet 2005.
Pascal Kabungulu Kibembi, secrétaire exécutif des Héritiers de la Justice, a été abattu par trois hommes armés chez lui, à Bukavu, dans la province du Sud-Kivu en RDC, à l’aube du 31 juillet. Pascal Kabungulu était connu pour défendre courageusement les droits humains dans un pays déchiré par des années de conflit et de violations systématiques des droits humains. Après sa mort s’est propagée une onde de tristesse, de choc et de peur parmi la population civile congolaise et l’ensemble des ONG présentes dans l’est de la RDC.
Personne n’a encore été inculpé dans le cadre de cette affaire. Le gouvernement de RDC a mis en place une Commission d’enquête, présidé par le procureur militaire du Sud-Kivu, afin de mener des investigations sur la mort de Pascal Kabungulu. La Commission n’a toutefois fait que peu de progrès, disposant de peu de ressources et ses membres ayant, semble-t-il, fait l’objet d’actes d’intimidation. Les organisations locales de défense des droits humains ont mis en doute l’impartialité de la Commission. Des interférences de la part d’éléments de l’armée de RDC se seraient produites : le 4 août, deux soldats de l’armée de RDC soupçonnés d’être impliqués dans l’affaire et détenus à la prison centrale de Bukavu avaient été illégalement remis en liberté, soi-disant sur ordre d’un commandant de l’armée de RDC. Après des manifestations locales de protestation, les suspects ont été remis en détention quelques jours plus tard.
Les quatre organisations, Amnesty International, Christian Aid, Front Line et Human Rights Watch ont adressé des lettres conjointes au président de RDC, Joseph Kabila, au représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour la RDC, William Swing, à la rapporteure spéciale de l’Union africaine sur les défenseurs des droits humains en Afrique, Mme Janaiba Johm et au ministre britannique des Affaires étrangères, Jack Straw. Dans leurs lettres, les organisations ont souligné l’importance de traduire en justice les assassins de Pascal Kabungulu Kibembi et ont demandé que des mesures décisives soient prises afin de s’assurer que l’enquête sur cet homicide est menée en toute transparence et en toute indépendance, de manière approfondie et impartiale. Les organisations ont insisté sur la nécessité pour l’enquête de disposer de ressources suffisantes et de n’avoir pas à craindre d’actes d’intimidation ou d’interférences d’aucune sorte.
Dans leur lettre à William Swing, les organisations ont également appelé la MONUC, la Mission de l’Organisation des Nations unies en RDC, à mener sa propre enquête sur la mort de Pascal Kabungulu Kibembi et à rendre publiques ses conclusions.
L’assassinat de Pascal Kabungulu s’inscrit dans une série déjà bien établie d’attaques menées contre des défenseurs des droits humains par les forces de sécurité gouvernementales et des groupes armés. C’est en ayant cela à l’esprit que les quatre organisations ont demandé instamment, au gouvernement de la RDC et à la communauté internationale, d’élaborer de toute urgence un plan d’action pour la protection des défenseurs des droits humains congolais et de veiller à ce que des enquêtes soient ouvertes sur les menaces et agressions signalées de militants congolais. Les organisations ont lancé un appel à Mme Janaiba Johm, rapporteure spéciale sur les défenseurs des droits humains en Afrique, pour qu’elle demande à se rendre en RDC au plus vite.