RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO : Les combattants de Bukavu doivent cesser leurs attaques contre des civils

Index AI : AFR 62/013/2004
ÉFAI

Jeudi 3 juin 2004

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amnesty International condamne dans les termes les plus forts les graves
atteintes aux droits humains qui continuent de se produire dans la ville de
Bukavu, à l’est de la République démocratique du Congo (RDC).

« Le général Laurent Nkunda et le colonel Jules Mutebusi, dont les forces
ont pris la ville le 2 juin, doivent veiller à ce que les combattants sous
leur commandement respectent le droit international humanitaire et cessent
leurs attaques contre des civils », a indiqué l’organisation.

Amnesty International demande également à la MONUC, la force de maintien de
la paix des Nations unies en RDC, présente également à Bukavu, de faire le
maximum pour protéger les civils dans la ville et ses environs.

Le général Nkunda et le colonel Mutebusi ont pris le contrôle de la ville
après en avoir chassé les forces loyales au gouvernement de transition de la
RDC. Un nombre indéterminé de civils a été tué durant les combats, beaucoup
l’ont été par des tirs à l’aveugle d’obus ou d’armes à feu qui ont été le
fait de toutes les forces en présence.

L’organisation a reçu des informations faisant état d’homicides, de viols et
autres exactions commises par les forces de Nkunda et Mutebusi. Un
commerçant du nom de Soleil aurait été exécuté sommairement vers cinq heures
du matin le jeudi 3 juin, dans le quartier Ndendere ; des combattants
avaient pénétré chez lui à la recherche d’argent et d’objets de valeur. Une
personne de sa famille aurait été violée. Selon les informations reçues,
Soleil avait déjà été contraint de remettre tous ses objets de valeur à deux
groupes précédents de combattants qui avaient pillé sa maison.

Au moins six autres personnes auraient été tuées dans des circonstances
analogues et des cas de viols ont également été signalés. En dépit
d’informations qui nous sont parvenues ce jeudi, faisant état de l’accord
donné par les forces de Nkunda et Mutebusi de rester cantonnées, le pillage
de la ville par les soldats se poursuit de manière intensive.

D’autres atteintes aux droits humains ont également été répertoriées depuis
le début des violences le 26 mai. Le viol d’une femme de dix-neuf ans par
des soldats de Mutebusi le 27 mai dans le quartier de Nguba a été signalé,
ainsi que des exécutions sommaires de civils lors de l’avancée des troupes
de Nkunda sur Bukavu, en provenance du nord.

Le général Nkunda et le colonel Mutebusi ont affirmé que leur assaut sur
Bukavu avait pour but de faire cesser les tueries et autres exactions
commises par les forces pro-gouvernementales à l’encontre de la minorité
banyamulenge de la ville. À ce jour, Amnesty International n’est pas en
mesure de confirmer ces informations. Aucune enquête n’a pu être menée sur
ces affirmations par les responsables des droits humains au sein de la MONUC
du fait des violences. On estime qu’environ trois mille civils, des
Banyamulenge pour la plupart, ont fui vers le Rwanda voisin depuis la
semaine dernière, affirmant craindre des persécutions. Environ sept cents
autres civils déplacés ont trouvé refuge à l’intérieur du complexe de la
MONUC à Bukavu.

Un certain nombre de sources d’Amnesty International expliquent que les
pillages s’accompagnent souvent de menaces de mort pour venger ce que les
combattants décrivent comme des exactions commises contre des civils de
l’ethnie banyamulenge.

Le Rwanda, qui soutient le groupe armé du RCD-Goma commandé, entre autres,
par Laurent Nkunda et Jules Mutebusi, nie toute implication dans les
violences. Toutefois, un certain nombre de sources à Bukavu continue de
faire état de la présence de soldats rwandais dans la ville.

Le gouvernement de transition pour un partage du pouvoir est entré en
fonction en juin 2003. Parmi ses tâches les plus urgentes, il y a
l’intégration des différentes forces armées de RDC - notamment celles du
RCD-Goma, dans une nouvelle armée nationale. Cette intégration se fait
lentement, retardée par une mauvaise coordination et un manque évident de
volonté des différents groupes armés pour placer leurs troupes sous le
commandement d’une autorité centrale. L’échec du gouvernement de transition
et de la communauté internationale à traiter cette question de l’intégration
de façon efficace et rapide est l’un des facteurs majeurs responsables de
l’insécurité dans l’est de la RDC.

Les violences à Bukavu menacent de faire dérailler le processus en cours et
le fragile gouvernement de transition de la RDC. Des manifestations
violentes ont eu lieu à Kinshasa et dans d’autres villes après les
évènements d’hier. Amnesty International craint pour la sécurité des
personnes perçues comme étant d’origine banyamulenge dans la capitale et qui
ont dû se protéger des manifestants.

Nkunda et Mutebusi ainsi que le gros des troupes sous leur commandement font
partie d’une aile dissidente du groupe armé RCD-Goma, aujourd’hui représenté
dans le gouvernement de transition où il occupe l’un des quatre postes de la
vice-présidence. Depuis longtemps déjà, des rumeurs circulent sur le retour
au combat de dissidents du RCD-Goma dans l’est de la RDC.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit