Soudan. Amnesty International déplore la perte de vies humaines au camp de Kalma, dans le Darfour

Déclaration publique

Index AI : AFR 54/038/2008 (Public) -
ÉFAI

Amnesty International appelle le gouvernement soudanais à cesser de recourir à une force disproportionnée et meurtrière dans ses actions de maintien de l’ordre. La mort de dizaines de civils au camp de Kalma, dans le Darfour, le lundi 25 août, aux mains des forces de sécurité soudanaises est inacceptable et injustifiable.

Bien que des informations contradictoires circulent sur le nombre des victimes, tuées ou blessées, plusieurs sources à l’intérieur du camp de Kalma ont fait état auprès d’Amnesty International de la mort d’au moins 47 personnes, parmi lesquelles beaucoup de femmes et d’enfants, au cours de l’opération.

Ces pertes tragiques illustrent - une nouvelle fois – avec force l’incapacité du gouvernement soudanais, des groupes d’opposition armés et de la force de maintien de la paix au Darfour, la MINUAD (Mission des Nations unies et de l’Union africaine au Darfour) de protéger une population civile déjà à bout de forces, vivant pour une grande partie dans des camps pour personnes déplacées internes disséminés dans le Darfour ou comme réfugiés de l’autre côté de la frontière, dans l’est du Tchad.

Le lundi 25 août, les forces de sécurité soudanaises sont entrées dans le camp de Kalma, dans le Darfour méridional ; avec une population de 90 000 personnes déplacées internes, c’est le plus grand camp de personnes déplacées internes au Darfour. Selon les informations dont nous disposons, les forces de sécurité avaient l’intention de désarmer et d’arrêter des résidents du camp de Kalma en possession d’armes. Le camp de Kalma est toujours encerclé par les forces gouvernementales.

Il est regrettable que les autorités gouvernementales soudanaises n’aient pas expliqué en détail comment on en était arrivé aux faits qui se sont produits dans le camp de Kalma et quelles circonstances avaient conduit à la perte tragique de vies humaines et au grand nombre de blessés civils recensés. Le gouvernement soudanais doit, dans les meilleurs délais, ouvrir une enquête sur ces décès et sur les circonstances dans lesquelles s’est déroulée l’opération de sécurité dans le camp et autour de Kalma.

Amnesty International rappelle aux forces de sécurité soudanaises qu’elles ont pour obligation de protéger les civils et de ne pas s’en prendre à eux. Elles doivent en outre immédiatement permettre aux agences d’aide humanitaire et aux observateurs chargés de veiller au respect des droits humains de se rendre sur place et faciliter leur travail.

Amnesty International rappelle que prendre délibérément pour cible des civils, mener des attaques aveugles contre des populations civiles ou utiliser des populations civiles comme boucliers humains constitue une violation du droit international humanitaire, quelle que soit la partie au conflit qui y a recours.

Amnesty International appelle les groupes d’opposition armés au Darfour à respecter le caractère civil des camps de personnes déplacées internes. Les groupes d’opposition armés ne doivent pas opérer dans ou à partir des camps de personnes déplacées internes ni se livrer à des activités risquant de compromettre la sécurité des civils vivant dans ces camps. En outre, les groupes armés d’opposition ne doivent ni armer les civils, ni fournir des armes aux civils se trouvant à l’intérieur des camps de personnes déplacées internes.

Amnesty International s’étonne que la force de maintien de la paix de la MINUAD qui patrouille normalement dans le camp de Kalma ne soit pas intervenue et n’ait pas cherché à engager les autorités soudanaises à trouver une solution visant à éviter les affrontements qui ont suivi, en prenant des mesures appropriées afin de maintenir le caractère civil des camps de personnes déplacées internes.

La force de maintien de la paix de la MINUAD est responsable au titre de la résolution n° 1769 des Nations unies de la protection de la population civile au Darfour, y compris dans les camps de personnes déplacées internes. Son efficacité et sa réputation dépendront en partie de la façon dont elle accomplira son mandat, qui est de protéger des populations civiles vulnérables dans l’ouest du Soudan.

Amnesty International renouvelle son appel à la communauté internationale pour qu’elle fournisse à la force de maintien de la paix de la MINUAD des moyens adéquats, tant en termes de transport que de matériel militaire, afin de permettre à cette force de protéger comme il convient la population civile du Darfour.


Complément d’information

Trois cent mille personnes sont mortes jusqu’à maintenant pour des raisons liées au conflit au Darfour. On compte plus de 2,3 millions de personnes déplacées, vivant pour la plupart dans des camps de personnes déplacées internes ou des camps de réfugiés dans l’est du Tchad. Le camp de Kalma est le plus grand camp de personnes déplacées internes au Darfour. En dépit de la signature d’un accord de paix sur le Darfour en 2006, le conflit continue de faire rage. Les groupes d’opposition armés ne cessent d’éclater pour former de nouvelles factions, ce qui rend la conclusion d’un accord de paix de plus en plus problématique. La MINUAD est présente au Darfour depuis le 1er janvier 2008, mais ses effectifs continuent de stagner au dessous des dix mille hommes.

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