Le gouvernement tchadien doit arrêter Omar el Béchir, le président soudanais, lorsqu’il se rendra au Tchad lundi 18 mars, et le remettre à la Cour pénale internationale (CPI), a déclaré Amnesty International.
Si le gouvernement tchadien n’appréhende par le président el Béchir, le Conseil de sécurité des Nations unies doit intervenir et exiger que le Tchad honore les obligations qui sont les siennes aux termes du droit international.
La visite du président soudanais coïncidera avec le 10e anniversaire du début du conflit au Darfour.
En sa qualité d’État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, le Tchad est légalement tenu de coopérer pleinement à l’arrestation de l’ensemble des suspects recherchés par la CPI et de veiller à ce qu’ils soient remis à celle-ci.
« Si le président el Béchir n’est pas appréhendé, sa quatrième visite planifiée au Tchad constituera un nouvel affront pour l’ensemble des victimes de violations graves des droits humains au Darfour », a souligné Netsanet Belay, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.
« Il ne faut plus fermer les yeux sur des invitations aussi régulières et ouvertes adressées à un homme qui cherche à échapper à la justice internationale. »
Malgré les deux mandats d’arrêt émis en mars 2009 et juillet 2010 pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, le président el Béchir s’est rendu au Tchad en juillet 2010, en août 2011 et en février 2013.
Ces visites sont incompatibles avec l’obligation faite à chaque État de refuser de constituer un lieu d’asile pour quiconque, quel que soit le statut de la personne en question, si celle-ci est soupçonnée de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.
Si certaines décisions récemment adoptées par l’Union africaine (UA) exhortent les États membres à ne pas coopérer avec l’arrestation du président el Béchir, ces initiatives à caractère politique ne doivent pas l’emporter sur les obligations auxquelles sont tenus les États membres de l’UA en vertu du droit international, et en particulier de textes comme le Statut de Rome et la résolution 1593 du Conseil de sécurité.
D’ailleurs, un certain nombre d’États africains, dont l’Afrique du Sud, le Botswana, le Burkina Faso, le Malawi, le Niger et la Zambie ont confirmé qu’ils coopèreraient pleinement avec l’arrestation et le transfert des personnes inculpées par la CPI.
Dix ans après le début du conflit au Darfour, la situation des droits humains sur place reste catastrophique. Les civils continuent à faire l’objet d’attaques de la part des forces gouvernementales, de milices pro-gouvernementales et de groupes d’opposition armés.
Les forces de sécurité ont à de nombreuses reprises été accusées de recourir à la torture et à une force excessive contre les manifestants et les dissidents.
« Ces dix dernières années, la population du Darfour a connu homicides, enlèvements, violences sexuelles et pillages. Et si de nombreuses violations sont signalées à la police, les auteurs sont rarement condamnés », ajoute Netsanet Belay.
« Pour que la situation des droits humains au Darfour s’améliore, il faut veiller à ce que les auteurs de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de violations des droits humains ne puissent plus bénéficier de l’impunité. Le gouvernement soudanais doit remettre les personnes inculpées à la CPI, et la communauté internationale doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour arrêter le président el Béchir et les autres personnes inculpées par la CPI. »
« Pour commencer, il faut que le Tchad appréhende le président el Béchir et le remette à la CPI. Il est temps de rendre justice au peuple du Darfour, dont les souffrances n’ont que trop duré. »