Sri Lanka. Les déclarations des médecins détenus soulignent la nécessité d’une enquête indépendante

Déclaration publique

ÉFAI-
9 juillet 2009

Les déclarations faites aux médias par des médecins actuellement détenus pour avoir fourni ce que le gouvernement sri-lankais clame être de fausses informations sur le nombre de victimes civiles au cours des derniers jours de son offensive contre les Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul (LTTE) soulignent une nouvelle fois la nécessité d’une enquête indépendante sur les allégations selon lesquelles les deux parties auraient commis des crimes de guerre, a déclaré Amnesty International.

Amnesty International met en doute la crédibilité des récentes déclarations des médecins pour plusieurs raisons, notamment :

 du fait que ces médecins sont maintenus en détention, sans possibilité de consulter un avocat et qu’ils pourraient subir des actes de torture ou de mauvais traitements et subir des pressions du gouvernement sri-lankais, dont le bilan en matière de traitement des détenus et des témoins est particulièrement médiocre ;

 des contradictions relevées entre les déclarations des médecins et des faits vérifiés indépendamment ;

 des deux mois qui se sont écoulés entre le départ des médecins des zones tenues par les LTTE et leur récente « rétractation » des propos qu’ils avaient tenus précédemment.

Amnesty International s’inquiète de la sécurité et du bien-être de ces hommes qui ont fourni les seuls soins médicaux disponibles à des centaines de milliers de civils pris au piège des combats, ce qui devrait leur valoir des éloges et non des sanctions. Obtenir des aveux par la force et contraindre des détenus à donner des interviews aux médias pour soutenir les positions du gouvernement est un exercice pratiqué depuis longtemps par les autorités sri-lankaises, comme en témoigne Amnesty International dans un rapport récent (Twenty Years of Make Believe : Sri Lanka’s Commissions of Inquiry, disponible en anglais seulement). Dans de telles conditions, il est impossible d’évaluer la validité de leurs propos, mais Amnesty International souligne que les informations communiquées par des organisations indépendantes internationales engagées dans l’assistance humanitaire au plus fort de la crise, notamment les Nations unies et le Comité international de la Croix-Rouge, contredisent les récentes déclarations des médecins.

Entre la mi-février et le 9 mai, le CICR affirme avoir évacué près de 14 000 patients blessés ou malades et soignants accompagnateurs avec l’aide de ces médecins, ce qui contredit les déclarations du Dr Varatharajah qui a affirmé lors de la conférence de presse gouvernementale que 600 à 650 personnes seulement avaient été blessées entre janvier et mi-avril 2009.

Lors de leur conférence de presse, les médecins sont également revenus sur les déclarations qu’ils avaient faites concernant les tirs d’artillerie qui auraient touché l’hôpital de Puthukkudiyiruppu en février, bien que des membres du personnel des Nations unies et du CICR affirment avoir été témoins de l’attaque. Des témoignages obtenus de façon indépendante par Amnesty International ont confirmé les évènements vécus par les médecins après que des tirs d’artillerie eurent endommagés leurs hôpitaux de Kilinochchi et Mullaitivu en décembre 2008.

Amnesty International attire l’attention sur le fait que les médecins sont toujours détenus et qu’ils n’ont pas eu la possibilité de consulter un avocat. De hauts responsables du gouvernement n’ont cessé de brandir la menace de poursuites pour des accusations graves, telles que la trahison, contre ces hommes bien qu’ils reconnaissent que les médecins agissaient sous la pression des LTTE. Amnesty International a recueilli des témoignages décrivant la pression imposée par les LTTE sur les civils tamouls, personnel médical compris.

Amnesty International demande instamment aux Nations unies, aux organisations humanitaires internationales et aux autres membres de la communauté internationale qui ont pu rassembler des informations sur les conditions et le déroulement de la phase finale de la guerre de rendre publique toute information en leur possession. Ils contribueront ainsi à l’enquête, qui devra être systématique et indépendante, sur les allégations de crimes de guerre et devra comprendre des entretiens confidentiels avec des témoins – dont la plupart sont actuellement détenus dans des camps d’internement du gouvernement.

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