Syrie : un militant du « Printemps de Damas » est remis en liberté

Kamal al Labwani, éminent dissident et prisonnier d’opinion syrien, a été libéré mardi 15 novembre après avoir passé six ans derrière les barreaux en raison de son opposition politique pacifique au régime en place.

Il devait être remis en liberté le 9 novembre, mais il a été transféré ce jour-là vers un centre de détention administré par l’un des services de sécurité syriens et libéré après avoir été retenu quelques jours de plus.

Dès sa libération, Kamal al Labwani est retourné auprès de sa famille, chez lui à al Zababdeh, près de Damas.

« Nous nous réjouissons vivement que Kamal al Labwani ait été remis en liberté et qu’il ait retrouvé sa famille, après avoir passé de longues années en prison, dont une partie à l’isolement cellulaire, a indiqué Philip Luther, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

« Ces dernières années, nous avons constaté que les autorités syriennes retardent de plus en plus fréquemment la libération de prisonniers d’opinion ayant purgé leur peine, selon toute vraisemblance dans le but d’exercer une ultime pression afin qu’ils renoncent à reprendre leurs activités politiques ou à défendre les droits humains à leur sortie de prison. Il convient de mettre un terme à cette pratique. »

La libération de Kamal al Labwani intervient alors que les violences se poursuivent en Syrie, et que des milliers de personnes sont mortes au cours de plusieurs mois de manifestations pro-réformes. Ces derniers jours, on signale notamment plusieurs dizaines de victimes parmi les manifestants et les soldats.

Aux termes d’un accord signé avec la Ligue arabe, le gouvernement syrien s’est engagé à libérer les prisonniers placés en détention dans le cadre des troubles qui secouent actuellement le pays.

Kamal al Labwani, l’un des fondateurs de l’Union démocratique libérale, parti d’opposition, a passé neuf des 10 dernières années derrière les barreaux à l’issue d’une série de procès iniques.

Il a été incarcéré une première fois en 2001 pour son implication dans le mouvement pacifique en faveur de réformes appelé le « Printemps de Damas », période qui a suivi l’arrivée au pouvoir du président Bachar el Assad. Arrêté après avoir assisté à un séminaire politique au domicile d’un autre opposant, il a été incarcéré pendant trois ans, entre autres pour « incitation à la révolte armée ».

Bien qu’il ait enduré des conditions de détention éprouvantes, notamment des périodes d’isolement cellulaire, lorsqu’il a été libéré en 2004, Kamal al Labwani a immédiatement repris sa campagne en faveur d’une réforme politique.

En novembre 2005, il a été interpellé à l’aéroport de Damas alors qu’il rentrait en Syrie d’un voyage en Europe et aux Etats-Unis. Ce voyage, au cours duquel il s’est notamment entretenu avec des représentants de la Maison-Blanche et des organisations de défense des droits humains, lui a valu d’être condamné à 12 ans d’emprisonnement pour « complot avec un pays étranger […] en vue de l’inciter à attaquer la Syrie ». Le tribunal n’a pas pris en compte les éléments qui démontraient son opposition à une telle attaque.

En prison, Kamal al Labwani était incarcéré avec des criminels qui le considéraient comme un « traître » parce qu’il avait séjourné aux États-Unis.

Certains d’entre eux ont affirmé qu’il avait critiqué les autorités syriennes lorsqu’il a réintégré sa cellule après une audience devant le tribunal. Il a alors été condamné en 2008 à une peine supplémentaire de trois ans d’emprisonnement pour « diffusion de nouvelles fausses ou exagérées susceptibles de porter atteinte au moral du pays ».

Au cours de sa dernière incarcération, il a subi des mauvais traitements : il a notamment été roué de coups et placé à l’isolement dans une toute petite cellule souterraine. Certains de ses proches ont été placés en détention parce qu’ils avaient réclamé sa libération.

À la faveur d’une mesure de grâce présidentielle annoncée le 31 mai 2011, sa peine de 12 ans de prison a été réduite de moitié. Par la suite, au mois d’août, sa condamnation à trois ans de prison supplémentaires a été infirmée en appel. Sa peine d’emprisonnement a donc été réduite à six années.

« Kamal al Labwani et tous les anciens prisonniers d’opinion en Syrie doivent jouir de leur droit à la liberté d’expression et être autorisés à s’engager dans des activités politiques pacifiques si tel est leur choix  », a conclu Philip Luther.

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