Tunisie. Amnesty International déplore la peine de prison infligée au journaliste Slim Boukhdir

Déclaration publique

MDE 30/012/2007

Amnesty International est très préoccupée de la peine d’un an d’emprisonnement imposée ce mardi 4 décembre au journaliste indépendant Slim Boukhdir, par un tribunal de Sakiet Ezzit (Sfax), pour « insulte à un fonctionnaire pendant l’accomplissement de son devoir », « atteinte à la moralité publique » et « refus de présenter sa carte d’identité ».

Slim Boukhdir a été arrêté le 26 novembre 2007 alors qu’il se rendait de Sfax à Tunis, après une convocation pour récupérer son passeport à Khaznadar, la banlieue de Tunis où il réside. Slim Boukhdir a comparu devant un juge à Sakiet Ezzit le lendemain et a été poursuivi aux termes des articles 125 et 226bis du Code pénal tunisien.

Son procès, ce mardi 4 décembre, a été observé par des membres d’une délégation d’Amnesty International actuellement en visite en Tunisie, ainsi que par des membres d’organisations tunisiennes de défense des droits humains et un représentant diplomatique de l’ambassade des États-Unis à Tunis. Pendant l’audience, les avocats de la défense ont fait valoir une série d’irrégularités dans les rapports de police et d’interrogatoire, demandant au tribunal de procéder à un contre-interrogatoire d’autres témoins.

Cependant, le juge l’a refusé, en violation des droits de la défense, et a condamné Slim Boukhdir à une année de prison pour les deux premiers chefs d’inculpation et à une amende supplémentaire de cinq dinars (soit environ quatre dollars des États-Unis) pour avoir refusé de présenter sa carte d’identité. Slim Boukhdir a été immédiatement renvoyé à la prison de Sfax, tandis que ses avocats indiquaient qu’ils interjetteraient appel de sa condamnation et de sa peine.

Amnesty International craint que ce jugement ne soit une tentative de réduire au silence Slim Boukhdir pour sa critique des autorités. En mai 2007, il avait signalé avoir reçu des menaces de mort après un entretien qu’il avait accordé à al Hiwar (Dialogue), une chaîne de télévision installée à Londres, dans lequel il avait critiqué des membres de la famille du président Ben Ali.

La semaine précédant les menaces, Slim Boukhdir avait été agressé par des policiers. Journaliste indépendant, il avait été employé par Al Chourouk, un quotidien, mais avait été licencié après avoir publié sur Internet des entretiens qu’il avait menés avec un certain nombre de critiques et opposants du gouvernement ayant mené une grève de la faim lors du Sommet mondial sur la société de l’information, en novembre 2005. Avant son arrestation, Slim Boukhdir avait lui-même mené quinze jours de grève de la faim, pour protester contre les retards de l’administration qui devait lui délivrer son passeport.

Les poursuites visant Slim Boukhdir sont les dernières en date d’une série d’inculpations visant les journalistes indépendants et les opposants pacifiques aux autorités tunisiennes. Celles-ci semblent vouloir dissuader les journalistes et rédacteurs, les journaux et les magazines, de critiquer les pratiques du gouvernement tunisien ou les actions et décisions des ministres et responsables de haut rang. Ces inculpations entrent dans le cadre d’un système plus vaste de répression de l’opposition, qui implique une censure directe de publications tunisiennes et étrangères, notamment des sites Web, critiquant le gouvernement ; cette répression se traduit aussi sous la forme de harcèlement et d’intimidation des critiques du gouvernement et des défenseurs des droits humains, par une surveillance étroite et d’autres méthodes.

Amnesty International considérerait Slim Boukhdir comme un prisonnier d’opinion et demanderait sa libération immédiate et inconditionnelle s’il était emprisonné à la suite de cette inculpation. Notre organisation estime qu’il n’aurait pas dû être poursuivi pour avoir légitimement exercé son droit à la liberté d’expression, et s’oppose à l’utilisation des lois pénales sur la diffamation pour « geler » la libre expression et la libre circulation des informations et des idées, telle que la garantissent les normes internationales relatives aux droits humains, comme la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

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