Turquie. Une attaque contre la liberté d’expression et de religion fait trois morts


Déclaration publique

EUR 44/006/2007

Amnesty International déplore le meurtre de deux Turcs et d’un Allemand, commis le 18 avril aux éditions Zirve, une maison d’édition chrétienne, à Malatya. Ces trois personnes auraient été égorgées, pieds et poings liés. On pense qu’il s’agissait d’employés de la maison d’édition.

Ces derniers mois, le personnel des éditions Zirve avait, semble-t-il, reçu des menaces de mort de la part de groupes qui les accusaient d’activités missionnaires. Dans le passé, cette entreprise avait déjà été la cible de manifestations nationalistes.

Amnesty International estime que cette attaque brutale vise les principes même de la liberté de religion et d’expression. Elle survient alors que l’intolérance va croissant en Turquie, dans un climat créé et aggravé par les restrictions de leur liberté d’expression que subissent, en droit et en pratique, les journalistes, les défenseurs des droits humains et tous ceux qui cherchent à susciter un débat critique. L’organisation rappelle la déclaration faite par Kofi Annan, alors secrétaire général des Nations unies, à l’occasion de la Journée internationale pour la Tolérance en 2006 :

« … des individus et des groupes entiers sont attaqués et brutalisés sans aucun autre motif que leur identité ethnique, religieuse, nationale ou autre. Qu’elle soit à l’origine de génocides caractérisés ou d’humiliations quotidiennes, l’intolérance est un phénomène alarmant. Chacun d’entre nous doit s’efforcer de faire respecter les principes de la tolérance, du pluralisme, du respect mutuel et de la coexistence pacifique. Chacun d’entre nous doit être prêt, à tout moment, à dénoncer les stéréotypes et les idées préconçues et à prendre fait et cause pour ceux qui sont victimes de discrimination.

« La lutte contre l’intolérance passe notamment par des garanties juridiques. La liberté de culte, et le droit de ne faire l’objet d’aucune discrimination fondée sur la religion, sont depuis longtemps inscrits dans le droit international et dans la législation de bien des pays.

« Mais le droit n’est qu’un point de départ. Pour que les gens se comprennent, il faut avant tout qu’ils apprennent. Qu’ils apprennent à connaître les différentes religions, traditions et cultures et sachent donc déceler les mythes et les idées fausses. Il faut aussi que les jeunes voient s’ouvrir d’autres portes que celles qui débouchent sur la haine et sur l’extrémisme. Et il faut, tout en protégeant la liberté d’expression, éviter que les médias ne puissent servir à diffuser des messages de haine ou de mépris.

« Tout cela ne se produira que si des personnalités influentes et des institutions publiques prennent les choses en main. »

Amnesty International prend acte de ce que les autorités turques ont condamné ces meurtres. L’organisation constate cependant avec préoccupation que l’attaque révèle en Turquie une tendance à l’intolérance meurtrière. À cet égard, l’organisation rappelle le meurtre d’Andrea Santoro, prêtre catholique, à Trabzon en février 2006 et celui de Hrant Dink, journaliste turc d’origine arménienne, à Istanbul en janvier 2007.

Elle demande donc instamment aux autorités turques de condamner toutes les formes d’intolérance et de discrimination et de faire respecter les droits à la liberté d’expression et de religion inscrits dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, traités auxquels la Turquie est partie.

Amnesty International demande également aux autorités turques de veiller à ce que les meurtres qui viennent de se produire fassent sans délai l’objet d’une enquête indépendante et efficace et à ce que les auteurs présumés de ces crimes soient traduits en justice.

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