COMMUNIQUÉ DE PRESSE
ÉFAI
4 novembre 2010
Index AI : PRE 01/366/2010
Amnesty International exhorte les autorités ukrainiennes à mettre fin au harcèlement dont est victime un syndicaliste qui vit caché depuis qu’un tribunal a ordonné le 29 octobre qu’il se soumette à un examen psychiatrique forcé.
Un tribunal de Vinnitsa, dans le sud-ouest de l’Ukraine, a en effet ordonné le 29 octobre que cet examen soit réalisé, après que le ministère public a fait valoir qu’Andreï Bondarenko avait une « conscience excessive de ses droits et des droits d’autrui et [une] propension incontrôlable à défendre ces droits de manière irréaliste ».
Andreï Bondarenko n’a pas d’antécédents de troubles mentaux et a déjà passé trois examens psychiatriques pour prouver sa bonne santé mentale. Le dernier examen a eu lieu en octobre.
La décision de justice prononcée contre Andreï Bondarenko fait suite à plusieurs affaires dans lesquelles des militants ont été agressés et harcelés au cours des derniers mois.
« Les craintes sont très vives qu’Andreï Bondarenko ne soit contraint de subir un examen psychiatrique parce qu’il défend de manière légitime les droits syndicaux et les droits fondamentaux, a déclaré Heather McGill, spécialiste de l’Ukraine au sein d’Amnesty International.
« Tout examen doit être réalisé hors de la région de Vinnitsa par un psychiatre officiellement reconnu afin de garantir son impartialité. Andreï Bondarenko ne doit pas être soumis à un quelconque traitement tant qu’il n’a pas épuisé toutes les voies légales. »
Andreï Bondarenko se mobilise en faveur des droits des travailleurs de la région de Vinnitsa depuis 2006. Dans le cadre de son travail, il a souvent dénoncé le comportement irresponsable et illégal des responsables locaux.
En août 2010, il a fondé une organisation non gouvernementale (ONG) appelée Mouvement pour un bureau du procureur de la région de Vinnitsa non corrompu .
En outre, il semble qu’Andreï Bondarenko se soit attiré les foudres des autorités en s’efforçant de défendre les droits des ouvriers d’une usine sucrière. Ces travailleurs saisonniers ne sont employés que quelques mois par an après la récolte de la betterave sucrière, et il est fréquent qu’ils ne soient pas rémunérés.
Nombre de ces usines sont officiellement détenues par des sociétés écrans, alors que les véritables propriétaires sont des personnalités locales influentes, occupant souvent de hautes fonctions dans l’administration locale.
Andreï Bondarenko a lancé une campagne visant à traduire ces sociétés écrans en justice afin d’obtenir le versement des salaires. D’après la déclaration d’un procureur, il a engagé 80 procédures sur la seule année 2008.
Absent lors de son procès vendredi 29 octobre, le syndicaliste était représenté par deux défenseurs civils et un avocat, à qui un panel de juges a enjoint de sortir de la salle d’audience.
Le harcèlement infligé récemment à d’autres militants révèle un climat de plus en plus tendu s’agissant des droits humains en Ukraine.
Le 15 octobre 2010, à Vinnitsa, des policiers ont perquisitionné au domicile et au bureau de Dimitri Groysman, président du Groupe de défense des droits humains de Vinnitsa, qui soutient les demandeurs d’asile et fait campagne contre la torture.
Les policiers ont interrogé les membres du personnel sur leur travail et saisi plus de 300 éléments, dont des fichiers du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), des disques informatiques, des clés USB et un ordinateur portable.
Andreï Fedossov, président d’Uzer, association de défense des droits des personnes souffrant d’un handicap mental, a été agressé par des hommes non identifiés en mai, après avoir reçu des menaces par téléphone en avril. La police n’a rien fait. En juillet, il a été placé en détention pendant une journée dans le cadre d’une enquête sur un crime qui aurait été commis il y a 10 ans, alors qu’il avait 15 ans.
« Tous ces militants semblent avoir été pris pour cibles en raison de leur travail légitime. Les autorités ukrainiennes doivent veiller à ce que les défenseurs des droits humains puissent mener leurs activités librement et les protéger contre les violences, les menaces et les mesures de représailles », a conclu Heather McGill.