Une loi tunisienne vise à museler ceux qui critiquent le gouvernement

ÉFAI-16 juin 2010

Amnesty International est préoccupée par l’adoption cette semaine par le gouvernement tunisien de dispositions législatives qui visent à museler ceux qui critiquent le gouvernement et qui militent en faveur des droits humains.

L’organisation a souligné que la modification apportée au Code pénal tunisien, qui porte sur les violations de la « sûreté extérieure » a dans sa ligne de mire les militants des droits humains qui demandent à des organisations étrangères telles que l’Union européenne (UE) de faire pression sur le gouvernement au sujet de son bilan en matière de droits humains.

« Au lieu d’améliorer leur triste bilan en matière de droits humains les autorités tunisiennes ont choisi de sanctionner encore plus sévèrement ceux qui défendent ces droits et de saper les courageuses initiatives que prennent les défenseurs des droits fondamentaux et les autres personnes qui dénoncent les violations commises quotidiennement en Tunisie », a déclaré Amnesty International.

Ce texte qui modifie les dispositions de l’article 61 bis du Code pénal réprime le fait d’avoir « entretenu avec les agents d’une puissance étrangère des contacts dont le but ou le résultat est de porter atteinte à la situation militaire ou diplomatique de la Tunisie ». Les personnes déclarées coupables de cette infraction sont actuellement passibles d’une peine de cinq à 20 ans d’emprisonnement.

Ces nouvelles dispositions législatives sanctionnent également les personnes qui contactent des organisations étrangères en vue de nuire aux intérêts vitaux de la Tunisie, notamment à la « sécurité économique » du pays.

Elles constituent manifestement une riposte directe des autorités tunisiennes à la suite de réunions organisées en mai par des défenseurs tunisiens des droits humains avec des députés et responsables de l’UE à Madrid et à Bruxelles.

Au cours de ces réunions les militants tunisiens ont exhorté ces responsables à faire pression sur le gouvernement pour qu’il respecte ses obligations internationales en matière de droits humains.

Les nouvelles dispositions renforcent en outre les restrictions déjà très sévères auxquelles sont soumis les défenseurs des droits humains ainsi que les libertés d’expression et d’association, en visant ceux qui parlent à des organisations étrangères de la situation des droits humains en Tunisie.

Les militants en Tunisie font l’objet de manœuvres de harcèlement et d’intimidation. Un grand nombre ont déclaré être surveillés en permanence par les forces de sécurité et avoir été empêchés de voyager à l’étranger ou dans le pays, ce qui constitue une violation de leur droit à la liberté de mouvement.

De nombreux militants ont également signalé avoir été battus par des hommes en civil qui semblaient être des agents des forces de sécurité.

Des militants tunisiens qui avaient publiquement critiqué le bilan du gouvernement en matière de droits humains alors qu’ils se trouvaient à l’étranger ont été harcelés et interrogés à leur retour en Tunisie. Plusieurs ne sont depuis plus autorisés à voyager à l’étranger.

Amnesty International demande instamment à l’UE et à ses États membres de réagir fermement face à cette mesure cynique et de faire pression sur le gouvernement tunisien afin qu’il respecte ses obligations en matière de droits humains.

« Les autorités tunisiennes doivent abroger toutes les dispositions de la législation tunisienne qui sanctionnent l’exercice pacifique des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion », a ajouté Amnesty International.

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