UNION EUROPÉENNE - Accord d’association entre l’UE et l’Algérie : l’Union devrait dénoncer les tentatives d’étouffement des graves violations des droits humains

Index AI : MDE 28/011/2005

COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU BUREAU EUROPÉEN D’AMNESTY INTERNATIONAL

L’Accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne devant entrer en vigueur demain (jeudi 1er septembre 2005), Amnesty International appelle l’Union européenne à dissuader les autorités algériennes de promulguer toute loi qui mettrait hors de cause les personnes soupçonnées d’être responsables de graves atteintes aux droits humains.

Le 15 août 2005, le président Abdelaziz Bouteflika a promulgué un décret sur un « projet de Charte pour la paix et la réconciliation nationale » qui fixe le cadre de futures mesures destinées à mettre un terme à une décennie de conflit violent. La charte sera soumise à référendum le 29 septembre 2005.

Amnesty International craint que la charte n’ouvre la voie à l’adoption de lois dispensant les forces de sécurité et les groupes armés de répondre des crimes commis pendant le conflit extrêmement violent qui a secoué le pays. Ceci conduirait à un déni définitif de justice pour les victimes et leur famille, y compris pour les milliers de personnes qui ont été arrêtées depuis 1993 et ont « disparu » par la suite.

« L’Union européenne doit montrer que les dispositions de l’accord sont fondées, a déclaré Dick Oosting, directeur du Bureau européen d’Amnesty International. Celles-ci engagent les deux parties dans une relation basée sur le respect des droits humains, l’état de droit et les principes de démocratie. »

« En décrétant une amnistie générale, l’Algérie ferait non seulement défaut à ses obligations en vertu des traités internationaux relatifs aux droits humains mais elle remettrait aussi en question la crédibilité des engagements en matière de respect des droits fondamentaux que l’Union européenne prend à son compte dans ses accords d’association », a ajouté Dick Oosting.

Le président Bouteflika a déclaré publiquement que 200 000 personnes avaient été tuées pendant le conflit. Des dizaines de milliers de civils - hommes, femmes, enfants - sont morts lors de violentes attaques. Des milliers de personnes ont été torturées en détention. Des milliers d’autres ont « disparu » après avoir été arrêtées par les forces de sécurité algériennes ou ont été enlevées par des groupes armés et sommairement exécutées. Pour Amnesty International, certaines de ces violences constituent des crimes contre l’humanité. Pourtant la grande majorité de ces atteintes aux droits humains n’ont jamais donné lieu à enquête et leurs auteurs n’ont jamais été identifiés.

On ignore pour l’instant si la charte conduira à l’adoption d’une amnistie générale ou à d’autres mesures. Il est clair cependant qu’elle propose des mesures d’exemption de poursuites ou de clémence pour les membres de groupes armés actuels ou anciens, et qu’elle soutient que les forces de sécurité et les milices armées par l’État ont agi dans l’intérêt du pays, refusant ainsi de reconnaître que ces forces armées peuvent avoir commis de graves infractions au droit. La Charte refuse spécifiquement d’admettre que les forces de sécurité se sont rendues responsables de milliers de « disparitions ».

Après toutes ces années de conflit sanglant en Algérie, l’UE devrait faire tout ce qui est en son pouvoir pour que la justice et la nécessité d’être tenu responsable de ses actes s’inscrivent dans tout processus de transition vers la paix. Pour être fidèle aux dispositions relatives aux droits fondamentaux incluses dans l’Accord d’association, l’Union devrait prendre clairement position contre toute loi accordant l’impunité aux personnes responsables de graves atteintes aux droits humains, qui contreviennent au droit international. Amnesty International craint qu’une telle loi empêche de résoudre les problèmes hérités de ces dix années de conflit et ne sape définitivement l’état de droit et la protection de droits humains dans le pays.

L’organisation de défense des droits humains exhorte par conséquent l’UE à demander à l’Algérie de :

 ne pas adopter de loi qui empêcherait l’émergence de la vérité sur les crimes graves commis lors du conflit interne, une décision judiciaire définitive de culpabilité ou d’innocence et une pleine réparation pour les victimes et leur famille ;

 d’autoriser sans délai supplémentaire le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires, le rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture à effectuer une visite dans le pays comme ils en font la demande depuis longtemps ;

 de permettre pleinement aux groupes de défense des droits humains et aux organisations s’occupant des victimes de se préoccuper des séquelles du conflit.

Voir également sur le site d’Amnesty International la déclaration publique intitulée Algérie. Le président organise un référendum pour effacer les crimes du passé (http://www.amnestyinternational.be/doc/article.php3?id_article=5846, index AI : MDE 28/010/2005).

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