BURUNDI - La paix fragile est menacée par les pressions exercées sur les réfugiés pour qu’ils rentrent chez eux

Après plusieurs décennies de guerre civile, de heurts et de violations des droits humains, le Burundi connaît aujourd’hui une période d’espoir. Cependant, la situation demeure instable et plusieurs défis, s’ils ne sont pas correctement traités, pourraient ruiner le processus de paix. Un de ces défis est d’assurer la protection des droits des centaines de milliers de réfugiés burundais en Tanzanie, dont beaucoup, sous pression du gouvernement tanzanien, retournent actuellement dans leur pays.

777 000 réfugiés burundais vivaient dans les camps, campements et villages de Tanzanie au mois de juin 2004. Ils sont arrivés en deux vagues principales : après les massacres perpétrés en 1972 et après ceux déclenchés par l’assassinat, en 1993, du premier Président démocratiquement élu du Burundi. Alors qu’en 2002, un grand nombre de réfugiés se sont mis à regagner spontanément le Burundi, le HCR, en coopération avec les gouvernements burundais et tanzanien, a décidé de faciliter les retours en assurant le transport des réfugiés jusqu’à leur foyer d’origine, en les faisant bénéficier d’une aide au retour censée couvrir leurs besoins pour trois mois ainsi que d’autres services logistiques et d’information. Plus de 225 000 réfugiés sont ainsi retournés au Burundi entre 2002 et janvier 2005. Le HCR facilite actuellement les rapatriements dans toutes les provinces du Burundi sauf quatre.

Toutefois, Amnesty International craint que ces rapatriements soient involontaires et prématurés, synonymes de violation des principes d’asile et de non-refoulement internationalement reconnus. Les entretiens conduits auprès des réfugiés, des rapatriés, des représentants des ONG et des agences humanitaires indiquent en effet clairement que l’insuffisance des rations alimentaires et les difficiles conditions de vie à l’intérieur des camps incitent les réfugiés à regagner leur foyer d’origine. En outre, les réfugiés font l’objet d’une propagande agressive, de la part des responsables du gouvernement tanzanien comme de ceux du gouvernement burundais, visant à les contraindre à retourner dans leur pays.

Pour Amnesty International, ces retours au Burundi ne sont pas opportuns. La plupart des nombreux problèmes fonciers, à l’origine de multiples conflits dans le passé, n’ont toujours pas été réglés. Par ailleurs, selon les témoignages, les rapatriés sont victimes de violations de leurs droits civils et politiques (menaces, détentions arbitraires, etc.) et victimes de l’impunité persistante des groupes armés qui opèrent dans les différentes régions du Burundi. Ils sont enfin confrontés à des difficultés dans la réalisation de leur droit au logement, à l’alimentation, à l’éducation, à la santé et à un niveau de vie suffisant.

Amnesty International craint par conséquent, qu’à très court terme, le déni de ces droits menace la viabilité du processus de paix au Burundi. Un rapatriement prématuré et massif pourrait en effet contribuer à déstabiliser la situation au Burundi, où les institutions chargées d’assurer l’accueil et la réintégration des rapatriés ne disposent que de faibles moyens.

C’est pourquoi Amnesty International prie les autorités de Tanzanie de veiller à ce que toutes les personnes demandant l’asile en Tanzanie bénéficient d’une procédure équitable de détermination du statut de réfugié. Amnesty International demande également qu’aucun de ces réfugiés ne soit renvoyé au Burundi ou vers d’autres pays où ils pourraient subir de graves violations des droits humains, conformément à vos obligations qui découlent des conventions des Nations unies et de l’Union africaine concernant les réfugiés.

Amnesty International demande aussi aux autorités du Burundi de veiller à la viabilité des retours ayant déjà eu lieu, notamment en s’efforçant de régler dans les meilleurs délais tous les conflits fonciers, dans l’équité et la transparence.

Pour plus d’informations, vous pouvez lire le rapport « Burundi/Rwanda/Tanzanie : Violations des droits des réfugiés et des rapatriés » (index AI : AFR 16/006/2005), disponible sur http://web.amnesty.org/library/print/FRAAFR160062005.

Passez à l’action !

Veuillez écrire aux autorités de Tanzanie et du Burundi. Vous pouvez vous inspirer des modèles ci-dessous.

1. Modèle de lettre à l’attention des autorités de Tanzanie

[Salutation],

Membre/Sympathisant d’Amnesty International, je suis gravement préoccupé(e) par la situation des réfugiés burundais dans votre pays.

Conscient(e) du très grand nombre de réfugiés qu’abrite la Tanzanie, je crains cependant que le gouvernement tanzanien ne respecte plus suffisament les droits des réfugiés burundais et ne leur permette plus de rester dans des conditions conformes aux exigences internationales en matière de droits humains. Les conditions de vie dans les camps de réfugiés sont devenues si difficiles qu’elles les poussent à rentrer dans un pays dont les infrastructures ont été dévastées par des années de guerre et dont la population vit toujours dans une extrême pauvreté.

Je regrette par ailleurs profondément la campagne menée par les autorités tanzaniennes et burundaises visant à inciter ces réfugiés à rentrer au Burundi. Les mesures prises par ces deux gouvernements en faveur d’un retour prématuré, conjuguées à une facilitation de ces retours par le HCR, ne laissent guère de doute : les réfugiés subissent des pressions les incitant à quitter la Tanzanie dès que possible.

Or, à très court terme, ces pressions en vue d’un rapatriement massif et prématuré pourraient contribuer à déstabiliser le processus de paix au Burundi. En outre, les Burundais rentrés au Burundi font face à des violations de leurs droits civils et politiques, telles que des menaces et des détentions arbitraires, parfois provoquées par des conflits fonciers.

C’est pourquoi je vous serais très reconnaissant(e) de :

  ne plus renvoyer de réfugiés au Burundi ou vers d’autres pays où ils pourraient subir de graves violations des droits humains, conformément à vos obligations qui découlent des conventions des Nations unies et de l’Union africaine concernant les réfugiés ;

  vous assurer de ce que les réfugiés ne sont pas maltraités ou victimes de graves violations des droits humains exercées par les forces de sécurité tanzaniennes ;

  enquêter sur toutes allégations de telles violations et traduire les responsables en justice ;

  améliorer les installations des centres d’accueil et de transit en sorte qu’elles fournissent toute l’assistance nécessaire et satisfassent les besoins essentiels - nourriture adéquate, abris décents et installations sanitaires et médicales de base.

Amnesty International insiste aussi auprès des gouvernements donateurs pour qu’ils honorent leurs engagements en faveur des réfugiés et que les pays africains ne supportent pas d’une manière disproportionnée le poids de la protection et de l’assistance aux réfugiés burundais.

En espérant que vous accorderez bonne attention à ma requête, je vous prie d’agréer, [Salutation], l’expression de ma haute considération.

DESTINATAIRES :

President Benjamin Mkapa - Office of the President - The State House, Magogoni Road, PO Box 9120, Dar es Salaam - Fax : +255 22 211 3425 - Salutation : Monsieur le Président

Omar Ramadhani Mapuri, Minister of Home Affairs - Ministry of Home Affairs, Ohio/Ghana Ave, PO Box 9223, Dar es Salaam - Fax : +255 22 212 0486 - Salutation : Monsieur le Ministre

Copie à :

Judith Mtawali, Director, Refugee Services Department - Ministry of Home Affairs, Ohio/Ghana Ave, PO Box 9223, Dar es Salaam - Fax : +255 22 212 0486 - Salutation : Madame la Directrice

Ambassade de la République de Tanzanie - Avenue Louise 363, 1050 Bruxelles

2. Modèle de lettre à l’attention des autorités du Burundi

[Salutation],

Membre/Sympathisant d’Amnesty International, je suis gravement préoccupé(e) par la situation des réfugiés burundais en Tanzanie ainsi que par leur retour au Burundi. En effet, les conditions de vie dans les camps de réfugiés sont devenues si difficiles qu’elles poussent les réfugiés burundais à rentrer au pays alors que les institutions chargées d’assurer l’accueil et la réintégration des rapatriés ne disposent que de faibles moyens.

Je regrette donc profondément la campagne menée par les autorités tanzaniennes et burundaises visant à inciter ces réfugiés à rentrer au Burundi. Les mesures prises par ces deux gouvernements en faveur d’un retour prématuré, conjuguées à une facilitation de ces retours par le HCR, ne laissent guère de doute : les réfugiés subissent des pressions les incitant à quitter la Tanzanie dès que possible.

Or, à très court terme, ces pressions en vue d’un rapatriement massif et prématuré pourraient contribuer à déstabiliser le processus de paix au Burundi. En outre, je m’inquiète du fait que, selon de nombreux témoignages, des Burundais rapatriés sont victimes de violations de leurs droits civils et politiques, telles que des menaces et des détentions arbitraires, parfois provoquées par des conflits fonciers.

C’est pourquoi je vous serais très reconnaissant(e) de :

  assurer que tous les Burundais rapatriés puissent bénéficier d’un retour dans la sécurité et la dignité sans subir de pressions, de discriminations ou de menaces physiques pendant et après le retour ;

  assurer le respect des droits humains de toutes les personnes revenues au pays, en particulier en leur assurant au moins l’essentiel de droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit à la terre et à la restitution de leur propriété ;

  enquêter rapidement sur toutes les allégations de violations des droits humains à l’encontre de ces personnes et en poursuivre les auteurs ;

  prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le droit à la restitution de l’habitat, des terres et des propriétés dont ces personnes ont été arbitrairement privées ou, si ce n’est pas possible, leur assurer une compensation fixée par un tribunal indépendant et impartial.

En espérant que vous accorderez bonne attention à ma requête, je vous prie d’agréer, [Salutation], l’expression de ma très haute considération.

DESTINATAIRES :

Son Excellence Monsieur Domitien NDAYIZEYE, Président de la République - Présidence de la République, BP 1870 Bujumbura, Burundi, Fax : + 257 21 26 70 - Salutation : Monsieur le Président de la République

Bamvuginyumvira Frédéric, Président de la Commission Nationale de la Réhabilitation des Sinistrés - Commission Nationale de la Réhabilitation des Sinistrés (CNRS), Bujumbura, République du Burundi - Salutation : Monsieur le Président de la Commission Nationale de la Réhabilitation des Sinistrés

Mme Françoise Ngendahayo, Ministre à la Réinsertion et à la Réinstallation des Déplacés et des Rapatriés - Ministère à la Réinsertion et à la Réinstallation des Déplacés et des Rapatriés, Bujumbura, République du Burundi - Salutation : Madame la Ministre

Copie à :

Ambassade du Burundi - Square Marie-Louise 46, 1000 Bruxelles

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