SOUDAN : Pas de paix sans justice

SOUDAN : Pas de paix sans justice

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Le 2 décembre 2004

À l’occasion des pourparlers de paix qui se déroulent actuellement au Soudan, Amnesty a souligné ce jeudi 2 décembre que ceux-ci doivent porter avant tout sur des réformes judiciaires immédiates, afin de protéger l’ensemble de la population et d’éviter de nouveaux conflits.

L’organisation fait cette mise en garde parce que les pourparlers sur le Darfour doivent reprendre la semaine prochaine à Abuja, la capitale nigériane, et que les négociations de paix entre le nord et le sud à Naivasha au Kenya entrent dans le dernier mois avant la date butoir fixée pour un accord, avant la fin de l’année.

« Les médiateurs pour la paix doivent dépasser les considérations liées au partage du pouvoir et les négociations économiques, en répondant aux demandes légitimes des millions de victimes d’atteintes graves aux droits humains. Ce n’est qu’en établissant une infrastructure juridique indépendante et transparente que le Soudan pourra commencer à surmonter la crise actuelle, et parvenir à une paix durable pour tous », a déclaré Erwin van der Borght, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International.

Dans un rapport rendu public ce jeudi, sous le titre « Darfour (Soudan). Personne auprès de qui porter plainte. Les victimes ne connaissent pas de répit et les responsables présumés demeurent impunis », Amnesty International montre comment des centaines de milliers de personnes se voient refuser toute justice au Darfour, et sont exposées sans protection à des homicides, des actes de torture, des viols et des déplacements forcés. Cette situation forme un contraste marqué avec l’impunité généralisée dont bénéficient les responsables de ces violations des droits humains, et avec la politique consistant à les incorporer dans les forces de sécurité de l’État.

« J’ai signalé le meurtre de mon frère à la police, mais ils m’ont dit d’aller voir les forces armées. Je me suis alors rendu à la Sécurité où l’on m’a à nouveau dit de signaler les faits aux forces armées. À chaque fois, à la police comme à la Sécurité, j’ai dû donner de l’argent ; cela m’a coûté 35 millions [de livres soudanaises] en tout. Ensuite, quelqu’un a dû contacter un membre de l’armée à Saraf Omra et, le 20 août 2003, j’ai été arrêté. Les forces armées m’ont emmené dans un camp militaire près de Kebkabiya ; là, j’ai été passé à tabac, on m’a ligoté les chevilles et les bras et j’ai été suspendu à un arbre du matin au soir. » Témoignage recueilli par Amnesty International en octobre 2004 auprès du frère d’un homme exécuté au Darfour de manière extrajudiciaire par les forces armées.

Le rapport d’Amnesty International présente de nombreux cas d’arrestations et de détentions arbitraires, de morts en détention, de tortures, de procès inéquitables et de harcèlement. Les victimes n’ont aucun accès à la justice au Darfour.

Amnesty International formule une série de recommandations au gouvernement du Soudan, parmi lesquelles :

 l’abrogation des textes de lois qui offrent l’impunité aux forces de sécurité et leur permettent de maintenir des personnes en détention au secret de manière prolongée ;

 l’abolition des textes de lois contraires aux normes internationales pour un procès équitable, notamment les dispositions qui empêchent l’accusé ou le prévenu de revenir sur ses aveux ou d’interjeter appel de la déclaration de culpabilité et de la peine ;

 l’introduction de mesures visant à donner à chacun un accès égal à la justice, le temps de préparer sa défense, ainsi qu’une assistance juridique gratuite si nécessaire ;

 la libération immédiate de toute personne détenue seulement pour ses opinions pacifiques et des personnes victimes d’arrestations arbitraires ;

 l’annonce claire et publique par le gouvernement que la torture et les mauvais traitements ne seront tolérés dans aucun centre de détention et feront l’objet de poursuites.

« Sous le prétexte du conflit armé et de l’état d’urgence, le gouvernement soudanais continue à opprimer des victimes d’atteintes aux droits humains, tout en laissant les véritables responsables en liberté, qu’il s’agisse de la guerre au sud-Soudan ou au Darfour. La communauté internationale doit exiger que les droits humains fondamentaux soient pleinement protégés par le droit soudanais, et renforcer la présence et le mandat des observateurs internationaux chargés d’étudier les violations des droits humains », a déclaré Erwin van der Borght.

Le rapport complet peut être consulté sur le site de l’organisation à l’adresse suivante

http://web.amnesty.org/library/index/engafr541382004. Pour l’instant, seul le résumé du rapport est disponible en français, la traduction du reste du document est en cours.

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