« Votre Excellence,
Les soussignés 33 organisations apprécient le rapport que votre bureau a publié le 26 janvier 2018 en application de la résolution 31/36 du Conseil des droits de l’homme sur les colonies de peuplement israéliennes dans les territoires palestiniens occupés (OPT), relativement au projet de constituer une base de données de toutes les entreprises exerçant certaines activités spécifiques liées aux colonies de peuplement israéliennes dans les territoires palestiniens occupés.
Nos organisations reconnaissent que d’importants progrès ont été réalisés dans la création de la base de données et dans l’établissement d’une méthodologie claire, ainsi que d’un cadre normatif solide à cette fin.
Le rapport réitère le langage sans équivoque de la résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations Unies : l’établissement par Israël de colonies de peuplement dans les territoires palestiniens occupés n’a aucune validité légale et constitue une violation grave et flagrante du droit international. Il affirme en outre que les entreprises devraient être prêtes à accepter toutes les conséquences - de réputation, financières ou juridiques - de leur implication dans les violations des droits de l’homme. Compte tenu de la clarté avec laquelle votre bureau a discuté et a réfuté les arguments habituels avancés par certaines sociétés cherchant à justifier leur engagement dans les colonies de peuplement, il ne peut y avoir aucun doute qu’une entreprise qui mène de telles activités le fait à ses propres risques.
Bien que nous reconnaissions les progrès réalisés à ce jour, il reste beaucoup de travail à faire. A cet égard, et conscients du fait que ce mandat a été créé il y a près de deux ans, nous invitons votre bureau à faire de l’achèvement de l’examen de toutes les sociétés désignées une affaire urgente.
Comme beaucoup de nos organisations l’ont déjà souligné, la base de données devrait être un mécanisme qui aide les États à respecter leurs obligations en matière de droit international, y compris l’obligation de ne pas reconnaître comme licites - même implicitement -
la situation illégale créée par les colonies de peuplement israéliennes et de ne pas contribuer à maintenir cette situation illégale. Cette obligation implique de réglementer les entreprises domiciliées sur leur territoire pour s’assurer qu’elles ne sont pas engagées dans les activités énumérées dans les colonies.
Pour aller de l’avant avec ce processus, nous demandons à votre bureau de clarifier et d’élaborer davantage les questions spécifiques de méthodologie et de processus. Par exemple, dans le cadre du processus de sélection, nous demanderions à votre bureau de définir la notion d’ activités commerciales "minimales et éloignées" qui a pour conséquence d’exclure les entreprises de la base de données et expliquer comment cette définition peut être liée à la sous-traitance et aux chaînes d’approvisionnement. Dans un objectif de transparence accrue, nous demandons instamment que vous reconsidériez la possibilité de donner aux entreprises la possibilité de conserver confidentielle la substance des réponses écrites.
Bien que nous reconnaissions qu’il peut être utile de permettre aux sociétés de conserver la confidentialité des informations qu’elles soumettent à l’étape de l’établissement des faits dans le but de permettre un engagement constructif, nous suggérons néanmoins que les réponses des entreprises aux allégations de faits soient rendues publiques. Alternativement, à tout le moins, un résumé exact de la réponse de l’entreprise devrait être rendu public. Cette divulgation relève d’un accès vital à l’information pour les communautés et les personnes touchées dans les régions de colonisation. De même, en ce qui concerne vos communications avec les États où certaines entreprises commerciales concernées sont établies dans leur pays, nous vous demandons de fournir davantage d’informations sur les engagements que ces États "d’origine" ont peut-être accepté de prendre à cet égard. En outre, les données recueillies sur les entreprises impliquées dans des violations des droits de l’homme dans le territoire palestinien occupé devraient être transmises par le HCDH au Conseil des droits de l’homme en tant que document officiel mis à jour chaque année fournissant une base de données vivante.
Les organisations soussignées reconnaissent l’effort et les ressources nécessaires pour accomplir les progrès indiqués dans le rapport, où votre bureau a examiné 321 sociétés qui auraient participé à des activités en application du paragraphe 96 du rapport de la mission d’établissement des faits sur les colonies (A/HRC/22/63). Nous suggérons fortement que toutes les entreprises qui ont été dûment examinées et contactées conformément à la méthodologie et à la norme de preuve énoncées dans le rapport, et qui ont par la suite fourni une réponse rejetant le processus et le mandat du HCDH ou qui n’ont pas fourni de réponse dans le délai imparti de 60 jours, soient immédiatement rendues publiques. Il convient de rappeler que la Base de données a pour but d’être un document vivant avec des mises à jour périodiques. Par conséquent, la publication des conclusions actuelles constituerait une première étape vers les travaux en cours énoncés dans le mandat. De plus, nous croyons qu’il faut établir un échéancier clair pour l’engagement d’une entreprise envers votre Bureau, y compris des délais maximums, pour les entreprises qui choisissent de s’engager de façon constructive avec votre Bureau, afin d’accroître la transparence et la clarté du processus pour toutes les parties intéressées.
Nous savons que les organismes des Nations Unies, y compris votre bureau, ont subi des pressions sans précédent de la part de certains États et organisations pour empêcher la publication de cette base de données. Nous félicitons donc votre bureau d’avoir quand même publié ce rapport. La base de données représente un grand pas en avant pour l’agenda mondial des entreprises et des droits de l’homme. Il donne l’exemple d’un outil efficace pour garantir une plus grande responsabilisation face aux violations des droits de l’homme commises par les entreprises, y compris le droit des victimes à un recours adéquat, en particulier dans les situations d’occupation. Elle aide également les États à mettre leurs entreprises en conformité avec les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (A/HRC/17/31), ainsi qu’avec les principes du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Une base de données efficace donnerait une lueur d’espoir au peuple palestinien qui subit une occupation militaire longue d’un demi-siècle et rappellerait que la communauté internationale est déterminée à mettre un terme à l’implantation illégale de colonies de peuplement qui étouffe leur économie, épuise leurs ressources naturelles et porte atteinte à leurs droits fondamentaux.
Compte tenu de ce qui précède, nous vous prions instamment de :
a) Dresser immédiatement la liste des entreprises qui ont été dûment examinées et contactées conformément à la méthodologie et à la norme de preuve énoncées dans le rapport, et qui ont par la suite fourni une réponse rejetant le processus et le mandat du HCDH, ou qui n’ont pas fourni de réponse dans le délai imparti de 60 jours ;
b) Continuer à travailler en toute transparence avec les organisations de la société civile et les défenseurs des droits de l’homme pour compléter et actualiser en permanence la base de données et renforcer les méthodes et procédures ;
c) Veiller à ce que des ressources appropriées soient allouées afin de permettre le développement continu du mécanisme de la base de données ;
d) Inclure, dans le prochain rapport, des recommandations directes à l’intention des États sur la manière de s’engager dans le nouveau mécanisme pour les aider à faire la distinction, dans leurs relations d’affaire pertinentes, entre le territoire de l’État d’Israël et les territoires occupés depuis 1967, comme le stipule la résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations Unies.
Sincèrement vôtre,
Al-Haq
Amnesty International
Cairo Institute for Human Rights Studies
Al Mezan Center for Human Rights
ADDAMEER Prisoner Support and Human Rights Association
Aldameer Association for Human Rights
Arab Organization for Human Rights
Article 1 Collective
Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
BADIL - Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights
Bytes For All, Pakistan
CNCD-11.11.11
Community Action Center – Al-Quds University
Conectas Direitos Humanos
DCI - Defense for Children International – Palestine
EuroMed Rights
Forum Tunisien Pour les Droits Economiques et Sociaux
Hurryyat - Center for Defense of Liberties and Civil Rights
International Federation for Human Rights (FIDH)
International Trade Union Confederation
Italian General Confederation of Labour
Jerusalem Legal Aid and Human Rights Center
Lawyers for Palestinian Human Rights (LPHR)
National Institution of Social Care & Vocational Training
Odhikar Palestinian Centre for Human Rights
Palestina Solidariteit vzw, Belgium
Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Ramallah Center for Human Rights Studies
QADER for Community Development
Trócaire
Health Work Committees
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