Rappelons-donc encore et encore à Israël qu’existe le droit international ! Jean-Jules Docquir, coordinateur Israël et Territoires occupés à Amnesty International Belgique francophone

Le 11 décembre prochain, les ministres des Affaires étrangères des 28 pays membres de l’Union européenne se réuniront à Bruxelles. Un invité de marque sera présent parmi eux : le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Il semble d’ailleurs que M. Netanyahou se soit invité lui-même..

Le même M. Netanyahou qui a récemment déclaré : « Le comportement de l’Union européenne envers Israël est fou » et : « Acceptez Israël en tant qu’occupant et colonisateur ».

Les discussions risquent d’être très intéressantes.

Ce serait d’ailleurs l’occasion de faire le point sur la demande de compensation liée à la destruction d’équipements scolaires et à la confiscation de panneaux solaires financés en Cisjordanie... par des membres de l’UE.

Il serait également nécessaire de mettre au menu de ces échanges les nombreuses violations des droits humains des Palestiniens commis dans le cadre de l’occupation de la Cisjordanie (y compris de Jérusalem-Est) et de la bande de Gaza depuis plus d’un demi-siècle.

Depuis le début de l’occupation en juin 1967, les politiques impitoyables de confiscation des terres, de colonisation illégale et d’expropriation menées par Israël, associées à la discrimination omniprésente, ont causé d’immenses souffrances aux Palestiniens et les ont privés de leurs droits fondamentaux.

Le régime militaire israélien bouleverse tous les aspects de la vie quotidienne dans les territoires palestiniens occupés. C’est lui qui détermine s’ils peuvent, quand ils peuvent et comment ils peuvent se déplacer, aller travailler ou se rendre à l’école, voyager à l’étranger, rendre visite à leurs proches, participer à une manifestation, accéder à leurs terres agricoles ou même avoir accès à l’électricité ou à une source d’eau potable. Cela entraîne une humiliation, une peur et une oppression quotidiennes. Israël a de fait pris en otage la vie de ces personnes.

Le pays a également adopté un ensemble complexe de lois militaires destinées à étouffer la critique de ses politiques, et des hauts responsables du gouvernement ont qualifié de « traîtres » les Israéliens faisant campagne pour les droits des Palestiniens.

Une politique d’occupation et de colonisation qualifiée de crimes de guerre

La politique israélienne de construction et d’expansion des colonies illégales sur les terres palestiniennes occupées est l’un des principaux éléments moteurs des violations massives des droits humains provoquées par l’occupation. Ces cinquante dernières années, Israël a détruit la propriété de dizaines de milliers de Palestiniens et a déplacé une grande partie de la population pour construire des logements et des infrastructures pour installer sa propre population sur les territoires occupés. Israël a également détourné des ressources naturelles palestiniennes telles que l’eau ou des terres agricoles pour les utiliser dans les colonies.

L’existence même des colonies dans les territoires palestiniens occupés bafoue le droit international humanitaire et constitue un crime de guerre. Malgré les nombreuses résolutions de l’ONU, Israël a continué de s’approprier des terres palestiniennes et de soutenir au moins 600 000 colons installés en Cisjordanie occupée, notamment à Jérusalem-Est. En plus de la construction illégale de logements et d’infrastructures dans les colonies sur le territoire palestinien, des entreprises israéliennes et internationales ont créé dans les colonies une économie prospère permettant d’assurer leur présence et leur développement. Ce « programme de colonisation » dépend de l’appropriation illégale des ressources palestiniennes (notamment les terres, l’eau et les minéraux) pour produire des biens qui sont exportés et vendus au profit d’entités privées.

L’établissement par Israël du programme de colonisation dans les territoires palestiniens occupés et son expansion continue, ainsi que l’annexion de jure de Jérusalem-Est (et du plateau du Golan syrien occupé), violent une catégorie particulière d’obligations appelées « normes impératives du droit international ». Ces normes entraînent des obligations pour les États tiers, qui doivent non seulement s’abstenir d’encourager des violations du droit international humanitaire mais doivent en plus user de leur influence pour y mettre un terme. Ainsi, ils sont dans l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite créée par ces violations ainsi que celle de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation et de coopérer activement pour y mettre un terme.

En autorisant l’entrée sur leurs marchés de biens produits dans les colonies et qui contribuent à leur maintien, les États tiers pourraient conférer une reconnaissance implicite à la création des colonies dont proviennent ces produits. Ces États apportent aussi une aide au projet illégal de colonisation et contribuent au maintien de l’économie des colonies, laquelle finance l’existence et l’expansion continue des colonies illégales.

Pour ces raisons, Amnesty International appelle les États tiers à interdire, au moyen de lois et de règlements, l’importation vers leur marché de biens en provenance des colonies et à empêcher les entreprises domiciliées sur leur territoire d’avoir des activités dans les colonies ou de commercialiser des produits qui y sont fabriqués.

Une telle interdiction leur permettrait de remplir leur obligation de ne pas reconnaître une situation illicite, de n’y apporter ni aide ni assistance et de coopérer par des moyens licites en vue de mettre fin aux violations graves du droit international commises par Israël.

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