Demander la mise en place d’un embargo, c’est reconnaître de facto que la situation des droits humains n’est pas favorable à l’exportation d’armes. Cet embargo reposerait en effet sur l’application du Décret wallon sur les exportations d’armes, qui stipule que la Région wallonne « refuse la licence d’exportation s’il existe un risque manifeste que la technologie ou les équipements militaires (...) servent à la répression interne ou s’il existe suffisamment d’indications à l’égard d’un pays destinataire donné que l’exportation y contribuera à une violation flagrante des droits de l’homme (...) ».
Demander que cet embargo — et donc l’application de la loi wallonne — ne soit pris que si d’autres pays font de même, est tout à fait illégal. Cela démontre, s’il fallait encore le prouver, que le jeu politique de la Région wallonne l’emporte sur le respect de la loi et des droits humains.
Les déclarations de Willy Borsus ne sont pas sans rappeler celles de Rudy Demotte en 2009, à propos des ventes d’armes à la Libye.
Les armes vendues à la Libye ont été — et sont encore — utilisées pour commettre des violations des droits humains. Comment peut-on vérifier dans un pays comme l’Arabie saoudite que les armes seront bien utilisées pour une très longue période de façon appropriée et qui respecte la lettre et l’esprit du décret ?
L’affirmation selon laquelle les armes wallonnes ne sont vendues qu’à la Garde nationale et la Garde royale, et qu’elles ne sont donc pas destinées à être utilisées au Yémen, pose question.
D’une part, l’Arabie saoudite est connue pour les ré-exportations illégales et peu scrupuleuses d’armes vers d’autres États. Il est fort possible que des armes belges se retrouvent sur des champs de bataille, au Yémen ou ailleurs. De nombreux documents indiquent que l’Arabie saoudite a ré-exporté vers la Syrie des armes qu’elle a achetées auprès de nombreux pays d’Europe, d’Asie centrale et des Etats-Unis. La Garde nationale est massivement déployée à la frontière yéménite et il est fort probable qu’elle fasse des incursions au Yémen. En 2011, elle a été le fer de lance de la répression à Bahreïn.
D’autre part, quel crédit accorder aux Gardes nationale et royale d’un régime qui se rend coupable de violations massives des droits humains sur son territoire ? Rappelons que l’Arabie saoudite est responsable, entre autres, de la répression sanglante de la minorité chiite, notamment au cours de manifestations pacifiques.
Si M.Borsus peut appliquer la loi uniquement quand cela l’arrange, que va devenir la Wallonie si tous ses habitants font comme lui ?