Guinée-Équatoriale

Les autorités ont continué à restreindre la liberté d’expression en emprisonnant certaines personnes pour leurs opinions, en interpellant des militants politiques et en les incarcérant pour de courtes périodes. Bien qu’elle soit interdite par la loi, la torture était toujours pratiquée par la police sur des détenus, en particulier dans la région continentale. Plusieurs policiers ont été arrêtés pour des faits en relation avec des morts en détention. Au moins trois personnes ont été exécutées. De très nombreuses familles ont été chassées de chez elles et des centaines d’autres risquaient de l’être.

Contexte
En janvier, une vague d’incendies a dévasté plusieurs quartiers de Malabo qu’il était prévu de démolir ; le feu a détruit plus de 100 maisons, jetant à la rue autant de familles. Certains quartiers ont été la proie des flammes à plusieurs reprises. L’un des incendies, qui s’est déclaré dans le quartier de Campo Yaoundé, a eu lieu deux jours après que le Premier ministre eut annoncé aux riverains que les immeubles existants seraient détruits pour permettre la construction de nouveaux logements sociaux. Les autorités ont affirmé que les incendies étaient d’origine accidentelle mais, à la mi-janvier, la police a indiqué avoir interpellé 20 incendiaires présumés. Aucune autre information n’a été communiquée.
En juillet, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire s’est rendu dans les prisons et autres centres de détention du pays. Les délégués ont eu le loisir de s’entretenir avec la plupart des détenus mais n’ont pas pu rencontrer quatre prisonniers transférés du Bénin et du Nigéria en 2005, dont les autorités démentaient le placement en détention, malgré des éléments prouvant de manière crédible qu’ils étaient incarcérés à la prison de Black Beach, à Malabo.
En août, les autorités ont admis que 60 p. cent de la population vivait dans une extrême pauvreté et que seulement 33 p. cent avait accès à l’eau potable et à l’électricité, alors même que l’économie équato-guinéenne avait enregistré l’un des plus forts taux de croissance du monde (21,5 p. cent).
Le Parlement a adopté, en octobre, une loi de réorganisation du système judiciaire. L’une des mesures approuvées était la création d’un Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, présidé par le chef de l’État.

Arrestations et détentions arbitraires
Quatorze prisonniers d’opinion ont été maintenus en détention, dont un qui attendait d’être inculpé et jugé depuis octobre 2003.
Des agents de sécurité et des responsables civils, mais également des membres du Parti démocratique de Guinée équatoriale (PDGE, au pouvoir) s’en sont pris à des opposants politiques : manœuvres de harcèlement, arrestations ou ordres d’interpellation, brefs placements en détention. La plupart des incidents se sont produits sur le continent.
 ?Le secrétaire général adjoint du parti politique Convergence pour la démocratie sociale (CPDS), Ireneo Sialo Sialo, a été arrêté chez lui, à Sampaka (île de Bioko), en février. Les personnes qui sont venues l’appréhender ne possédaient pas de mandat. L’interpellation avait semble-t-il été effectuée à la demande du président du conseil municipal, qui accusait Ireneo Sialo de l’avoir insulté en public, celui-ci ayant émis des réserves sur son mandat lors d’une réunion publique. Le secrétaire général adjoint, qui a été contraint d’effectuer des travaux pénibles, a été remis en liberté le jour suivant après s’être acquitté d’une amende.
 ?Secundino Boleko Brown, un homme d’affaires installé en Espagne depuis 2000, a été interpellé au commissariat central de Malabo en avril, le lendemain de son arrivée en Guinée équatoriale. Arrêté le même jour, son fondé de pouvoir local a été remis en liberté sans inculpation deux semaines plus tard. Secundino Boleko, en revanche, est resté détenu au poste de police jusqu’en juillet, sans inculpation ni jugement. Il n’a pas été informé des raisons de son arrestation, mais son avocat a appris de manière officieuse que la police l’accusait de s’être introduit dans ses locaux et d’avoir dessiné une carte des lieux. Secundino Boleko a reconnu avoir visité la caserne où vivait son fondé de pouvoir, un policier en fonction, mais a nié avoir tracé un plan, qui ne lui a d’ailleurs jamais été montré. La cour d’appel a ignoré la requête en habeas corpus introduite par son avocat en avril.

Torture et autres mauvais traitements
Malgré l’adoption, en novembre 2006, d’une loi interdisant la torture et les autres formes de mauvais traitements, des actes de torture ont encore été signalés. Dans la plupart des cas, les faits se sont produits dans des postes de police de Bata ou d’autres villes de la partie continentale du pays. Deux personnes, peut-être davantage, sont mortes à la suite de tortures infligées par des policiers. Au moins trois fonctionnaires ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête sur ces décès, mais à la connaissance d’Amnesty International, ils n’ont été ni inculpés ni jugés.
 ?Salvador Ndong Nguema est mort à l’hôpital de Bata le 6 octobre, quatre jours après avoir été frappé par un gardien à la prison d’Evinayong. En 2006, il avait été condamné pour complicité d’un meurtre commis en décembre 2005, pour lequel José Nzamyo « Tipú » a été exécuté le 22 octobre 2007. Le 2 octobre, un soldat qui était de garde à la prison est entré dans la cellule de Salvador Ndong Nguema et l’a roué de coups. Deux jours plus tard, sa sœur l’a découvert gisant au même endroit et présentant une distension de l’abdomen. Il est mort lors de l’opération destinée à réparer les ruptures intestinales provoquées par les coups. Le soldat responsable de l’agression a été arrêté en novembre.
 ?En février, 16 enfants âgés de cinq à seize ans ont été placés en détention durant une courte période et frappés sur la plante des pieds par un policier agissant sur ordre du vice-ministre de l’Agriculture et des Forêts ; celui-ci soupçonnait les jeunes de lui avoir dérobé sa montre et ses habits pendant qu’il se baignait. Les enfants ont donc été emmenés au poste de police voisin de la ville d’Acurenam (dans la partie continentale du pays), où ils ont été battus. Le policier auteur des coups n’a pas été poursuivi.

Procès inéquitables
Quatre hommes qui avaient été « extradés » de Libreville, la capitale du Gabon, en juin 2004, et inculpés de terrorisme et de rébellion en juin 2006, ont été jugés par un tribunal civil de Bata en juillet et reconnus coupables des faits qui leur étaient reprochés. Ils ont été condamnés, en novembre, à des peines de dix à dix-sept ans d’emprisonnement. Leur condamnation s’est exclusivement fondée sur des déclarations obtenues par la torture, puisque le ministère public n’a fourni aucun autre élément pour étayer les accusations. Après leur renvoi de Libreville, ils avaient été détenus au secret et incarcérés environ deux ans à la prison Black Beach de Malabo, où ils étaient restés menottés jour et nuit et avaient été torturés à plusieurs reprises. Dans l’attente de leur procès, ils ont été transférés à la prison centrale de Bata en juillet et contraints d’effectuer des travaux non rémunérés au domicile de plusieurs responsables civils et militaires.

Peine de mort
Au moins trois personnes ont été exécutées en 2007. Selon les informations recueillies, c’est dans l’enceinte de l’école militaire d’Ekuku, à Bata (sur le continent), que les exécutions ont eu lieu, dans la semi-clandestinité, sans que les familles des condamnés en soient informées. Salvador Ncogo et Benedicto Anvene ont été mis à mort le 18 mai. On sait que le premier avait été arrêté en décembre 2006 pour le meurtre d’un jeune handicapé mental, mais on ne disposait d’aucun détail sur le contenu de leur procès. Selon les informations disponibles, les deux hommes étaient incarcérés à la prison centrale de Bata, où ils ont passé plusieurs mois enchaînés. José Nzamyo « Tipú » a été exécuté le 22 octobre. Il avait été condamné en 2006 pour le meurtre de son amie, tuée en décembre 2005.


Logement – expulsions forcées<
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Bien que le nombre d’opérations ait diminué par rapport à l’année précédente, des expulsions forcées ont eu lieu cette année encore à Malabo et à Bata. Des centaines de familles résidant dans ces deux villes vivaient sous la menace d’être chassées de chez elles. Dans la majorité des cas, il n’y a pas eu de consultations ni de négociations en bonne et due forme, et les personnes concernées n’ont pas été indemnisées pour les pertes subies.
Sans que personne n’en ait été avisé au préalable, un tracteur est entré un matin de juillet dans Ikunde, aux abords de Bata, et s’est mis à tracer une voie d’accès entre le fleuve et la route, en détruisant maisons et potagers sur son passage. Une dizaine de familles se sont retrouvées à la rue. Cette voie aurait été créée pour faciliter l’accès à un hôtel du village de Ntobo, à six kilomètres de là environ, dont le propriétaire est un parent du chef de l’État. Ces travaux n’ont donné lieu à aucune information préalable, consultation, indemnisation ou procédure légale, et les familles dont la maison a été détruite n’ont pas été relogées.

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